Il y a quelques semaines, un dénommé Naveed Hussain a lancé une pétition pour débaptiser la station de métro Lionel-Groulx et la renommer Oscar Peterson.
Ce n’était pas la première fois qu’une telle charge était lancée. Hussain prétendait mener sa croisade au nom de la diversité dans le contexte de Black Lives Matter.
Elle n’a pas vraiment levé, sauf dans les milieux qui entretiennent une hostilité maniaque à l’endroit du Québec.
Mais le New York Times a décidé de s’en mêler.
Groulx
Lundi, il publiait un article ayant pour titre « Le métro de Montréal devrait-il honorer un prêtre polarisant ou un génie du jazz ? »
Le titre avait néanmoins la vertu de la clarté. Il ne s’agit pas d’abord ici d’honorer Peterson, qui mérite effectivement de l’être, mais de liquider l’héritage du chanoine Lionel Groulx (1878-1967).
Groulx, dans notre histoire, fut d’abord un immense historien, qui a permis aux Québécois de se réapproprier leur mémoire, alors qu’ils en avaient perdu la trace.
Il fut aussi un formidable professeur de fierté nationale, pour un peuple toujours méprisé et s’autodénigrant souvent. Penseur nationaliste de premier plan, il n’acceptait pas notre soumission collective. Il joua un rôle majeur dans la construction du programme qui allait un jour aboutir à la Révolution tranquille.
Hélas, depuis le début des années 1990, sa mémoire a été victime d’une campagne de diffamation permanente, visant à le faire passer pour un cryptofasciste et un antisémite à partir de quelques passages périphériques et décontextualisés de son œuvre.
C’est d’ailleurs sous ces traits que le New York Times le présente à ses lecteurs. Groulx aurait apparemment versé dans un « antisémitisme virulent » et exprimait des « sympathies fascistes ».
Pour paraphraser la formule célèbre, les incultes, ça ose tout, c’est même à cela qu’on les reconnaît.
On aurait envie de recommander à tous la lecture de la biographie que lui a consacrée Charles-Philippe Courtois, en 2017, ou encore à lire les écrits de Groulx lui-même.
Sur le fond des choses, on retrouve ici un vieux problème pour ce qui touche la réputation internationale du Québec. Dans le monde anglophone, le Québec n’apparaît qu’à travers le prisme paranoïaque d’une partie de la communauté anglophone qui se croit persécutée et qui cherche à diaboliser de toutes les manières possibles nos symboles nationaux, qu’il s’agisse de l’indépendance, de la loi 101, de la loi 21 sur la laïcité de l’État ou d’un de nos plus grands intellectuels.
En gros, on y parle du Québec comme on en parle dans la Gazette.
Nationalisme
Même lorsqu’on y exprime une certaine sympathie pour le Québec, c’est en tant que province bilingue multiculturelle festive et non pas en tant que nation de langue et de culture françaises.
C’est le drame des petites nations : leur volonté de ne pas disparaître est assimilée à de la « fermeture à l’autre ».
Les Québécois ne devraient pas se soumettre à cette campagne d’intimidation idéologique, même si elle prend la forme d’un sermon de la version américaine de la Pravda.