Réplique à Patrice Garant

Le sens de la fête de 2008 à Québec

Les propos de monsieur Garant illustrent l’ambiguïté qu’on entretient autour du concept « Canada » pour justifier le gouvernement fédéral de s’inviter à la fête.

Québec 2008 - autour du 400e


Monsieur Patrice Garant s’est précipité dans une porte largement ouverte
en relevant les occurrences du mot « Canada » dans notre histoire en vue de
convaincre les lecteurs de [La Presse (22 mai 2008)->13538] qu’il s’agit d’une
réalité qui a plus de quatre siècles et demi et que le Canada n’est pas
apparu « 250 ans la fondation de Québec ». À force de citations, il
pourrait bien nous amener à une conclusion étonnante : si le Canada
existait avant Cartier, Champlain ne peut pas en être le fondateur et 1608
ne peut en marquer l’origine !
Les propos de monsieur Garant illustrent l’ambiguïté qu’on entretient
autour du concept « Canada » pour justifier le gouvernement fédéral de
s’inviter à la fête. Le Canada qui existe aujourd’hui comme État de type
fédéral a été créé en 1867 ; on a assez fêté en 1967 pour s’en souvenir.
Mais « Canada » désigne aussi une réalité qui a pris diverses formes depuis
500 ans : une région qui se confond avec la vallée du Saint-Laurent du
temps de Cartier ; la partie centrale de la Nouvelle-France sous le régime
français ; la colonie où vivaient des « Canadiens » entre 1763 et 1791 mais
qui s’appelait « province de Québec » ; l’ensemble de deux provinces de
1791 à 1840 (Bas-Canada et Haut-Canada), ces deux provinces réunies en 1840
sous une forme déjà quasi fédérale… Les citoyens s’y retrouvent-ils quand
leurs leaders s’y perdent ? À deux reprises, dans le programme officiel des
fêtes du 400e, monsieur Harper a écrit que la fondation de Québec « marque
aussi la fondation de l’État canadien ». On comprend tous qu’il parle du
pays qu’il dirige, créé en 1867, et non du Canada de Jacques Cartier.
Peut-on reprocher aux Québécois d’y voir une récupération ? Veut-on en
faire de Champlain un quasi-père de la Confédération ? On l’imagine assez
mal en train de construire une fédération avec les colons anglais qui
s’installaient à Terre-Neuve et les Écossais qui tentaient de faire de même
en Acadie…
S’il y a une fête en 2008, si on a mobilisé autant de ressources et
d’énergies pour organiser des célébrations, c’est parce que Champlain a
fondé un établissement à Québec en 1608 pour servir de comptoir à la
compagnie qui avait le monopole de la traite et de base pour ses
explorations et ses expéditions guerrières avec ses alliés amérindiens. Ce
faisant, il a posé le fondement de la présence continue des Français sur le
continent et le début de l’Amérique française. 1608 marque le début d’une
ville, d’une capitale et d’un peuple dont on retrouve des traces à la
grandeur du continent. Qu’il y ait eu des Amérindiens ici avant et d’autres
immigrants de toutes origines après, que les descendants de pionniers qui
ont accompagné Champlain et se sont établis ici soient devenus par la suite
citoyens canadiens ou américains, Manitobains ou Californiens, Métis, voire
« Indiens » (au sens de la loi qui les gouverne), partisans de l’annexion
aux États-Unis en 1849 ou de l’union des provinces en 1867 ne change rien à
l’essentiel de l’événement qui s’est produit il y a 400 ans et qui justifie
la fête : des Français se sont établis à demeure ici à partir de 1608 et
c’est l’anniversaire que leurs descendants veulent souligner avec ceux et
celles qui voudront s’y associer. Si les Québécois d’origine française (les
« de souche » qu’on n’ose plus nommer) ne peuvent pas fêter leurs origines
cette année, auront-ils une autre occasion de le faire ?
Gaston Deschênes, historien, Québec
-- Envoi via le site Vigile.net (http://www.vigile.net/) --

Featured d289f7aff001d4f18edc169eaa8e33f3

Gaston Deschênes32 articles

  • 36 376

Historien

[http://openlibrary.org/a/OL184953A/Gaston-Desche%CC%82nes->http://openlibrary.org/a/OL184953A/Gaston-Desche%CC%82nes]


[Gaston Deschênes reçoit le Prix Monique Miville-Deschênes de la Culture->http://lepeuplecotesud.canoe.ca/webapp/sitepages/content.asp?contentid=99138&id=815&classif=Nouvelles]





Laissez un commentaire



1 commentaire

  • Archives de Vigile Répondre

    24 mai 2008

    M. Deschênes,
    En effet, nous sommes les authentiques fondateurs de cette Amérique du Nord. Et non seulement, en sommes-nous les fondateurs, mais nous sommes toujours Français. Notre nationalité française est, à notre avis, inaliénable et imprescriptible.
    À tout hasard, voici un résumé du mémoire que mon procureur Me Christian Néron a déposé au ministère de la Justice français, à la suite de ma demande d'un passeport français.
    Malgré un refus en vertu de l'article 30-3 du code civil français, nous sommes en APPEL de la décision auprès de la ministre Rachida Dati. Et le cas échéant, nous avons d'autres armes dans notre valise.
    Marie Mance Vallée
    Collectif Nationalité française
    Texte intégral du mémoire : http://www.voxlatina.com/vox_dsp2.php3?art=1974
    * * *
    RÉSUMÉ DU MÉMOIRE
    VOUS ÊTES FRANÇAIS . LE SAVEZ-VOUS ?


    Une Québécoise exerce son droit à l'obtention d'un passeport français


    Le 17 avril 2006, une Québécoise de la région de Montréal déposait à la Chancellerie du Consulat de France une requête afin que lui soit délivré un passeport par les autorités administratives françaises. La requérante joignait à sa demande un mémoire où il est démontré que, bien qu'elle soit née au Québec de parents québécois d'ascendance française, elle serait toujours une naturelle française, au même titre que ses ancêtres français venus s'établir en Nouvelle-France. Ce mémoire démontre, pour l'essentiel et avec autorités à l'appui, que le traité de Paris de 1763, quoique formellement ratifié par le roi de France et enregistré par le Parlement de Paris, n'aurait jamais dépouillé les habitants de la Nouvelle-France de leur statut de naturels français, laissant intact leur droit, confirmé par deux ordonnances royales, d'aller, de retourner ou d'habiter en France, à leur choix, quand bon leur semblerait, et ce, sans être tenus de prendre aucunes lettres de déclaration ni de naturalité.


    Selon l'argumentation présentée dans le dit mémoire, cet état de fait serait dû à des vices de forme et de consentement commis lors des négociations du traité de paix. Ainsi, en vertu des lois fondamentales du royaume de France, les rois, bien que seuls habilités à conclure des traités, ne pouvaient céder légalement aucun territoire ni aucune parcelle du domaine de la Couronne sans avoir, au préalable, obtenu l'assentiment des États Généraux du royaume; ce qui ne fut jamais demandé. De même, toujours en vertu des dites lois, les rois de France ne pouvaient céder légalement leurs sujets ni aucun peuple du royaume sans avoir demandé, et obtenu, leur consentement; ce qui n'a jamais eu lieu non plus. Ces deux graves omissions s’expliquent par le fait que les rois de France et d'Angleterre se sont trop empressés de conclure leur traité de paix en omettant, sciemment, de se conformer à des dispositions incontournables du droit constitutionnel français. Bien qu'il soit incontestable que Louis XV a bel et bien signé, de sa main, le texte final du traité de Paris, il n'en demeure pas moins qu'il a omis, tout d’abord, de convoquer les États Généraux et, par la suite, de solliciter auprès des habitants de la Nouvelle-France leur consentement à devenir les sujets du roi d'Angleterre. En d'autres mots, et pour paraphraser une formule plus contemporaine, le droit constutionnel français garantissait aux habitants le droit de donner une réponse claire à une question claire avant qu'ils ne puissent être cédés légalement à un souverain étranger, ce qui ne fut même jamais abordé avec la population concernée.


    Ironiquement, les autorités anglaises étaient bien au fait de ces particularités propres au droit constitutionnel français, mais, tellement empressées de conclure l'entente convoitée, elles ont consenti à s'engager dans un traité alambiqué, portant en lui-même les germes de sa propre destruction. Ainsi, les habitants de la Nouvelle-France ont été cédés à un souverain étranger
    en violation de leurs droits constitutionnels, droits pourtant explicitement garantis par deux ordonnances royales. Force est donc de conclure que ces habitants n'ont jamais perdu leur statut de naturels français, que leurs descendants ont conservé ces mêmes droits, et que la démarche de la requérante est strictement fondée en droit.
    Source : Me Christian Néron
    594, rue Saint-Patrick
    Québec (Québec)
    G1R 1Y8
    (418) 529-7065