Le nouveau visage de l'Union européenne

Il est important que les Québécois connaissent bien l'Union européenne

Tribune libre

L'Union européenne vient d'achever la phase ultime de son organisation interne. Sa constitution a été ratifiée par les 27 États membres. Son rôle dans le monde s'affirmera et son poids démographique, politique et économique lui donnera l'occasion de peser sur les grandes décisions qui se prendront dorénavant dans toutes les enceintes. Il est essentiel de bien connaître cette nouvelle Europe qui parlera d'une seule voix par l'intermédiaire de son Président et qui négociera sur tous les fronts par l'intermédiaire de son ministre des Affaires étrangères.
Je vous soumets quelques textes et quelques tableaux qui illustreront l'évolution de l'Union européenne, son potentiel et ce que cela peut vouloir dire pour nous.
La nouvelle Europe
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“Nous avons désormais un système de culture fédérale”. Valéry Giscard d’Estaing, Président de la Convention sur l’avenir de l’Europe. (Le Figaro, 12 septembre 2002)
Présentation et Tableau
L’Union européenne a connu des succès impressionnants au cours des cinquante années qui l’ont vue passer de 6 à 15 puis à 27 États membres.(Voir le tableau qui suit ce texte). Ces pays fiers, puissants et indépendants depuis des millénaires sont parvenu à abolir leurs frontières, à dégager plusieurs politiques communes, à conclure d’importants et nombreux transferts de compétences vers les institutions européennes, à adopter une monnaie commune tout en affirmant le rôle essentiel de l’Union européenne sur le vieux Continent de même que la présence et la puissance de l’Union européenne à l’étranger. Et maintenant que le Traité de Lisbonne a été ratifié par tous les États membres, l’Union européenne est engagée dans une série de transformations, sans contredit les plus conséquentes de son histoire. Les deux plus importants phénomènes en cours, sont l’élection d’un Président permanent et la nomination d’un Ministre des Affaires étrangères qui sera également vice-président de la Commission européenne. Vis à vis les autres grandes puissances, l’Europe, forte de ses 500 millions de citoyens et de son unité retrouvée aura désormais un visage, une voix, une politique commune.
Tous les observateurs trouvent cette période captivante, mais certains soutiennent qu’elle est également périlleuse. D’autres y voient des difficultés à l’horizon car, les élargissements successifs de cette Union européenne n’auraient pas entraîné en même temps un degré suffisant d’intégration économique et politique. L’avenir pourrait bien leur donner raison, même si, jusqu’ici, les optimistes européens et la patience des promoteurs d’une intégration “sans cesse plus étroite” des peuples, ont généralement contribué à solidifier l’édifice européen.


L’Union européenne a cependant déjà connu des moments difficiles qui ont retardé son évolution, elle devrait donc assez rapidement tenter de trouver un terrain d’entente dans ce domaine crucial de la politique étrangère, ce qu’elle devra faire aussi dans bien d’autres, afin de maintenir un modus vivendi dans ses opérations quotidiennes et de garder sur les rails les grands projets qui sont envisagés depuis plusieurs années.
Sans doute assisterons-nous dans l’avenir à des exposées beaucoup plus étoffés d’une grande et nouvelle politique étrangère européenne. On n’en est pas là, mais le texte vient confirmer que l’Union européenne peut encore arriver à dégager une position commune même sur les questions les plus controversées. La grande question qui demeure, cependant, est de savoir comment sera exposée dans l’avenir, dans les grands forums internationaux, notamment au Conseil de Sécurité de l’ONU cette “position commune” de l’Union européenne qui n’y est pas représentée formellement? Cette position commune obligera-t-elle tous les pays membres à voter éventuellement de la même façon sur toutes les questions qui seront soulevées sur la scène internationale? Peut-être un jour, mais qu’en sera-t-il à court terme?
On voit bien tout l’intérêt que suscite ces efforts d’harmonisation et d’intégration dans lesquelles sont engagés les pays européens.

Cela, sans compter les différences d’approche de chacun des pays européens dans ses relations avec les autres grandes puissances, notamment la Russie et les États Unis. Comment, en effet, ne pas craindre que les divergences de vues entre les partenaires de l’Union européenne, sans parler de celles qui ont éloigné les membres de l’OTAN, sur la question irakienne en 2002, ne laissent des cicatrices durables qui retarderaient le projet européen. Cet aspect donne souvent lieu à des remarques “pointues” de la part des partenaires européens. Le dernier événement en date fut l’achat en 2004 d’avions militaires américains par la Pologne, au coût de plusieurs milliards de dollars, plutôt que d’appareils, plus ou moins semblables, proposés par des fabricants européens. Il faut dire que l’élargissement de l’OTAN et l’élargissement de l’Union européenne ont souvent joué sur les mêmes “cordes sensibles”.

Nous verrons dans les articles suivants comment fonctionnent ces institutions et quels pourraient être les pouvoirs et les fonctions du nouveau Président de l’Europe et du ministre des Affaires étrangères. Mais il faut savoir que cette proposition a rencontré du scepticisme de la part de plusieurs États, surtout ceux qui se sont récemment détachés de l’empire soviétique, qui y ont craint l’apparition d’un certain dirigisme de la part des “grands”. Certains observateurs s’étaient demandé si ces pays, sortis du “glacis soviétique”, une fois devenus membres de l’Union européenne, n’allaient pas rejeter toute forme de supranationalité par crainte de voir se substituer les pouvoirs de l’Union européenne à ceux de l’ex-Union soviétique. Or on observe avec beaucoup d’intérêt que ces États nouvellement libérés semblent beaucoup plus attachés à la méthode communautaire, c’est à dire aux transferts de souveraineté vers des institutions communes, donc au renforcement de la Commission et du Parlement, plutôt que d’avoir à transiger avec les pressions éventuelles des plus “grands” États de l’Union, ce qui pourrait se produire si les principaux pouvoirs étaient logés au niveau du Conseil des ministres et des chefs d’État plutôt qu’au niveau du Parlement et de la Commission.
Il reste que le défi le plus grand que doit affronter l’Union européenne est de conserver toujours sa force d’intégration et sa capacité d’élaborer et d’appliquer des politiques communes, à l’intérieur comme à l’étranger, tout en englobant de plus en plus d’États membres aux traditions aussi diverses qu’anciennes. En effet, l’Union européenne pourrait bien compter 33 ou 34 États membres d’ici quelques années. ( Voir le tableau). Deviendra-t-elle simplement une grande zone de libre échange, avec une monnaie commune, simple et pratique, ou sera-t-elle, comme on le prédit maingtenant, une grande force politique et économique, parlant d’une seule voix, capable de faire porter son influence aux quatre coins du monde à l’instar, en harmonie ou en concurrence avec les grands ensembles que sont les États Unis, la Fédération de Russie, la Chine et le Japon?

Par ailleurs, ce phénomène d’harmonisation et d’intégration fera-t-il perdre aux États membres certains des attributs et des pouvoirs propres à tout État souverain? Les États membres seront-ils toujours représentés individuellement dans les pays étrangers, à l’ONU et dans les autres grands forums internationaux? Enfin, l’Union européenne, ce partenaire important au point de vue politique et culturel, deviendra-t-il un partenaire économique toujours plus important pour le Canada, ou perdra-t-il de son intérêt?
Dans un autre texte, nous nous demanderons également si cette expérience européenne peut servir de modèle dans les discussions entre les différents niveaux de gouvernement au Canada. Dans un système de culture fédérale, caractéristique qui semble rapprocher l’Europe et le Canada, il n’est pas impossible de songer à revoir le partage des compétences, si et quand les parties constituantes décident de s’y engager. Est-ce que ceux qui proposent que le modèle européen serve un jour à redéfinir les relations entre Québec et Ottawa n’auraient pas l’obligation d’être beaucoup plus précis quant au partage souhaitable des compétences? Car en Europe, ce partage est en pleine évolution. Il n’y a pas pour l’instant un modèle européen classique. La nouvelle Constitution européenne qui est très précise sur le partage des responsabilités deviendra plus connue et plus accessible. C’est à ce moment là que nous pourrons voir si le modèle auquel nos amis européens sont arrivés, intéresse les partenaires, ici.
Nos leaders les plus fédéralistes pourraient bien trouver intérêt à s’inspirer de l’expérience européenne, si un jour ils voulaient accommoder certaines revendications des provinces, et en particulier celles du Québec. Il est possible, par ailleurs, de se demander si ce modèle ne pourrait pas alimenter les propositions qui sont faites pour harmoniser et approfondir les relations économiques et politiques entre les partenaires de la Zone de libre échange des Amériques? Une monnaie unique, une zone de libre circulation des individus, des biens et des services, et une frontière extérieure commune, comme ce que les Européens ont établi entre eux, seraient-ils souhaitables sur le continent Nord américain?
Nous tenterons donc de comprendre ce phénomène captivant, en examinant les composantes de chacune des étapes: Comment s’est construite cette Union, comment s’est organisée son évolution, comment peut-on entrevoir son avenir et quelles leçons peut-on en tirer pour alimenter nos propres débats?
Les autres textes sur “la nouvelle Europe” paraîtront dans l’ordre suivant:
Texte N. 2- L’importance de l’Union européenne

3- D’où est venue l’idée de l’intégration européenne?

4- Quelles structures ont été mises en place?

5- L’euro. La monnaie commune.
6- Une Constitution pour l’Europe
7- Quelles leçons tirer de l’expérience européenne?
La nouvelle EUROPE

tableau
Ce tableau présente des renseignements utiles sur les 27 États qui composent l’Union européenne, et sur les États qui pourraient y être admis dans les prochaines années.
- Le nom des États membres (27) et des États candidats ( 5)
- La date d’adhésion effective ou (probable)
- La population de chaque État
- Le produit intérieur brut par habitant (approx. en dollars canadiens)
(Un euro valait $1.62 canadiens, le 7 novembre 2009)
- E- États (16) qui ont adopté l’euro comme monnaie unique,
et qui l’ont mis en circulation le premier janvier 2002.
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ALLEMAGNE, 1952, pop: 82.0 millions, PIB/h: $24,400. -E-
BELGIQUE, 1952, pop: 10.3 millions, PIB/h: $25,500. -E-
FRANCE, 1952, pop: 59.3 millions, PIB/h: $22,200. -E-
ITALIE, 1952, pop: 57.6 millions, PIB/h: $22,300 -E-
LUXEMBOURG, 1952, pop: 400,000, PIB/h: $41,600. -E-
PAYS BAS, 1952, pop: 15.8 millions, PIB/h: $25,900. -E-
DANEMARK. 1973, pop: 5.3 millions, PIB/h $26,400.
IRLANDE, 1973, pop: 3.7 millions, PIB/h: $26,300. -E-
ROYAUME UNI, 1973, pop: 59.6 millions, PIB/h: $23,100.
GRÈCE, 1981, pop: 10.5 millions, PIB/h: $15,100. -E-
ESPAGNE, 1986, pop: 39.4 millions, PIB/h: $18,600 -E-
PORTUGAL, 1986, pop: 10.0 millions, PIB/h: $17,100. -E-
AUTRICHE, 1995, pop: 8.1 millions, PIB/h: $24,900. -E-
FINLANDE, 1995, pop: 5.2 millions, PIB/h: $23,000. -E-
SUÈDE, 1995, pop: 8.8 millions, PIB/h: $23,200.
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RÉPUBLIQUE TCHEQUE, 2004, pop: 10.3 millions, PIB/h: $12,500.
ESTONIE, 2004, pop: 1.4 millions, PIB/h: $7,700.
CHYPRE, 2004, pop: 640,000 (290,000 Chypriotes turques, 350,000 Chypriotes grecques), PIB/h: $17,100. -E-
LETTONIE, 2004, pop: 2.4 millions, PIB/h: $5,800.
LITUANIE, 2004, pop: 3.7 millions, PIB/h: $6,200.
HONGRIE, 2004, pop: 10.1 millions, PIB/h: $10,700.
MALTE, 2004, pop: 400,000, PIB/h: $8,800. -E-
POLOGNE, 2004, pop: 38.6 millions, PIB/h: $7,800.
SLOVÉNIE, 2004, pop: 2.0 millions, PIB/h: $15,000. -E-
SLOVAQUIE, 2004, pop: 5.4 millions, PIB/h: $10,300. -E-
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BULGARIE, 2007, pop: 8.2 millions, PIB/h: $4,700.
ROUMANIE, 2007, pop: 22.4millions, PIB/h: $5,700.
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TURQUIE, (?) (Une demande d’adhésion a été soumise en 1987), Aucune date d’adhésion n’a été avancée. pop: 63.9 millions, PIB/h: $5,900.

Pays des Balkans: Aucune date d’adhésion n’a été fixée, mais les observateurs et certains dirigeants européens reconnaissent que les frontières de l’Union européenne devraient éventuellement englober les pays des Balkans. Ceci porterait à 33 ou 34, le nombre d’États membres. (On ne prévoit plus d’élargissement au-delà de ces territoires).
ALBANIE, pop: 3.1 millions, PIB/h: $3,200.
BOSNIE-HERZÉGOVINE. pop:3.9 millions, PIB/h: $1,800.
CROATIE, pop: 4.6 millions, PIB/h: $7,400.
MACÉDOINE, pop: 2.0 millions, PIB/h: $4,600.
SERBIE - MONTÉNÉGRO (ex-Yougoslavie), pop: 10.5 millions, PIB/h: $1,800.
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Quelques statistiques, pour fins de comparaison:
CANADA, pop: 33 millions, PIB/h: $26,200.
JAPON, pop: 127 millions, PIB/h: $24,800.
ETATS UNIS, pop: 290 millions, PIB/h: $31,800.
N.B:
a) La Norvège, (pop: 4.5 millions, PIB/h: $28,400. ) a déposé, à deux reprises, une demande de candidature à l’Union européenne. Ses demandes avaient été acceptées par les instances européennes, mais, à chaque fois, les Norvégiens ont rejeté, par référendum, en 1973 et en 1994, ces projets d’adhésion.
b) La Suisse, (pop: 7.1 millions, PIB/h: $ 27,200.) tout en étant au coeur du continent européen, ne fait pas partie de l’Union européenne. Les citoyens ont rejeté le projet d’adhésion à 77% des voix, lors du référendum de mars 2001. La coopération commerciale et économique est quand même intense et diversifiée entre la Suisse et l’UE, dans le cadre d’un accord de libre-échange signé en 1972 et de sept autres accords bilatéraux. Par ailleurs, les citoyens de la Confédération helvétique ont accepté l’adhésion de la Suisse à l’ONU, lors du référendum du 3 mars 2002, et elle en est devenue le 190ième membre de la grande Organisation le 10 septembre 2002.
c) La population totale de l’Union européenne actuelle (27 États) est de 500 millions d’habitants.

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Georges Paquet20 articles

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Membre du service diplomatique canadien de 1967 à 2002, notamment au Nigeria, en France, en Belgique (auprès de l'Union européenne), à Haïti, à Rome (auprès du Saint Siège) et en Côte d'Ivoire





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1 commentaire

  • Archives de Vigile Répondre

    6 novembre 2009

    Small is Beautiful
    Ce n’est pas « Le nouveau visage de l’Union européenne », mais plutôt le nouveau masque de l’axe franco-allemand utilisé afin de conquérir, avec le pervers et néocolonialiste « traité d’union », ce qu’ils n’ont pu faire en employant la violence, le pillage et l’extermination de collectivités innocentes.
    JLP
    _______________________
    Note. Pourquoi le Costa Rica se trouve t-il en tête des pays du monde où les citoyens vivent le plus longtemps heureux ? Selon la dernière mise à jour (28/10/2009) de la Base Mondiale du Bonheur (World Database of Happiness), le Costa Rica se trouve en première place, avec 66,7 ans de moyenne de toute leur vie. À son tour, le Québec, une fois indépendant, sera sur la liste des pays les plus heureux du monde.