Le ministre Blackburn doit revoir sa décision

Dérives démocratiques - la société confrontée à sa propre impuissance



Le ministre de l'Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec, M. Jean-Pierre Blackburn, se dit surpris de mes interventions à la suite de sa décision de réduire les subventions accordées aux organismes à but non lucratif du Québec. Il me reproche de le critiquer publiquement. Je me demande ce qui le surprend, puisque mes démarches privées avec lui depuis trois mois sont restées vaines. Il ne m'en donne donc pas le choix. Pas de surprise non plus, puisque, depuis déjà plusieurs semaines, bon nombre d'acteurs économiques expriment publiquement leur désaccord quant à sa décision. Ce qui surprend les intervenants économiques du Québec, c'est plutôt son entêtement et surtout le ton de ses propos.
Le ministre Blackburn prétend que ces organismes figent le Québec dans le statu quo. Je soutiens, bien au contraire, que le développement économique du XXIe siècle s'effectue à partir de grappes industrielles structurées, rassemblant tous les acteurs, les petites, moyennes et grandes entreprises ainsi que les centres de recherche autour d'objectifs de productivité et d'innovation, clés de la compétitivité dans la conquête des marchés. Le développement technologique de Québec et le succès de nos grappes aéronautiques et pharmaceutiques en témoignent.
Les compressions annoncées par DEC ont déjà eu des conséquences néfastes pour certains organismes à but non lucratif québécois. Voici par exemple ce que risque de perdre le Québec: Technopole maritime du Québec, à Rimouski, a pu mettre à l'oeuvre plusieurs projets structurants et mobilisateurs tel que le nouvel Observatoire global du Saint-Laurent. Pour eux, le retrait de DEC représente 30 % de leur budget et ils ont déjà dû réduire les effectifs pour se retrouver avec le strict minimum. Grâce à l'apport du Bureau du cinéma et de la télévision du Québec, qui agit comme guichet unique pour attirer des productions ici en effectuant des missions à l'étranger, les retombées du cinéma au Québec ont doublées entre 2006 et 2007. Le Bureau du cinéma et de la télévision du Québec pourrait fermer dès cet automne.
M. Blackburn a exprimé qu'il ne désire plus «financer l'achat de papier et de crayons». Il considère ces organismes comme un «conseil d'administration autour d'une table, qui parle, qui rêve et qui envoie la facture à l'État». Ce sont des propos irrespectueux qui insultent bon nombre d'entreprises, de leaders économiques, d'hommes et de femmes qui contribuent quotidiennement, et très souvent bénévolement, à la croissance de l'économie québécoise.
Le ministre Blackburn se donne encore une fois un pouvoir arbitraire et opère un véritable retour de cinquante ans en arrière par ses façons de faire, rejetant du revers de la main les principes fondamentaux de transparence et d'égalité des chances qui devraient toujours prévaloir dans les prises de décisions quant au financement accordé par les pouvoirs publics.
Je tiens à dire ceci au ministre Blackburn: la soixantaine d'organismes sans but lucratif affectés par ces compressions ne veulent pas du «tout cuit dans la bouche». Ils attendent plutôt de lui qu'il reconnaisse la manière dont la structure économique du Québec se déploie, c'est-à-dire dans une démarche intégrée de développement économique, qui repose sur un regroupement des forces et des secteurs-clés, s'inscrivant dans le long terme et dans la continuité.
Tout cela n'a rien à voir avec les champs de compétences et les juridictions. Il s'agit de maintenir une action complémentaire. L'heure est à la consolidation des acquis et non à la déconstruction et au morcellement des efforts de développement.
L'Union des municipalités du Québec, l'Association des manufacturiers et exportateurs du Québec, la Chambre de commerce de Québec, Pôle Québec Chaudières-Appalaches, Montréal International, la Société des arts technologiques, l'Association de la recherche industrielle du Québec, la CRE Gaspésie-îles-de-la-Madeleine, les maires de Québec et de Rimouski et la Communauté métropolitaine de Montréal ont tous demandé publiquement à M. Blackburn de revoir sa décision.
Nous sommes de plus en plus nombreux au Québec à unir nos voix afin de défendre les intérêts économiques du Québec. Cela témoigne de l'importance d'unir nos efforts pour arriver à des résultats. C'est ce que les acteurs économiques ont compris. C'est ce que le gouvernement du Québec, qui les a écoutés, a compris. C'est ce que nous demandons au ministre Blackburn.
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Raymond Bachand : Ministre du Développement économique, de l'Innovation et de l'Exportation et du Tourisme


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