Le cirque

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Ottawa doit aussi assainir ses pratiques

Le « plus grand projet de transport d’hydrocarbures dans l’histoire du Canada », l’oléoduc Énergie Est, bat dramatiquement de l’aile. La suspension des audiences publiques à Montréal cette semaine confirme non seulement la solide opposition au gigantesque pipeline, elle révèle également l’imbroglio entourant le projet.

On voit maintenant qu’il ne s’agit plus simplement d’évaluer si le jeu en vaut la chandelle, si les bénéfices économiques dépassent les inconvénients environnementaux — ce dont doutent même les maires de Montréal et de Laval et l’Union des municipalités —, il s’agit également du manque de crédibilité de l’Office national de l’énergie ainsi que des tactiques suspectes de TransCanada, le promoteur du projet. Il n’y a plus qu’un problème, en d’autres mots, il y en a trois.

L’environnement, d’abord. Le transport de 1,1 million de barils de pétrole par jour d’un bout à l’autre du Canada est insensé en regard des engagements de réduction de gaz à effet de serre. Il est impossible de promouvoir la production des sables bitumineux, un produit trois ou quatre fois plus toxique que le pétrole traditionnel, tout en réduisant les émissions de CO2, disent les experts. Comme ce n’était pas assez, nous n’avons pas besoin de ce pétrole, expliquait lundi une porte-parole de Vigilance hydrocarbure Québec. Traversant 4600 km depuis l’Alberta jusqu’au Nouveau-Brunswick, ce pétrole ne servira ni au Québec ni même au Nouveau-Brunswick. Il est destiné presque entièrement à la vente outre-mer.

L’Office national de l’énergie, ensuite. Depuis que le gouvernement conservateur a aboli les agences environnementales devant surveiller le secteur énergétique, pelletant ces responsabilités dans la cour de l’ONE, on sait que l’organisme n’est pas à la hauteur. Le régulateur fédéral publie rarement des lettres d’exécution et punit encore plus rarement les compagnies fautives. En janvier dernier, un rapport de la Commission fédérale sur l’environnement et le développement durable jugeait que le processus de surveillance d’oléoducs était défaillant dans 50 % des cas étudiés. De plus, jusqu’à l’année dernière, l’ONE n’avait aucun mécanisme en place pour imposer des amendes aux compagnies ne respectant pas les codes.

Basé à Calgary et dirigé par un homme, Peter Watson, qui a d’abord fait carrière dans le secteur énergétique, l’ONE a longtemps été soupçonné d’être à la solde de cette industrie. Depuis que deux de ses commissaires ont rencontré « en secret » un certain conseiller spécial de TransCanada, l’ex-premier ministre Jean Charest, il n’est plus possible d’en douter. Les mensonges du régulateur à ce sujet, affirmant à deux reprises que cette rencontre n’avait pas eu lieu, suivis du refus de récuser les deux commissaires, n’ont fait qu’enfoncer le clou. Et que dire d’un homme ayant musclé sa carrière politique en tant que ministre de l’Environnement (sous Brian Mulroney) se retrouvant, sitôt sorti de la politique, dans le camp adverse ? Un parcours qui en dit long sur l’histoire d’amour entre le politique et le secteur énergétique.

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