Après nous avoir brossé un tableau extrêmement négatif des finances publiques du Québec en début d’année pour tenter de faire plaisir aux Lucides et nous faire avaler un budget indigeste et réactionnaire, voici le ministre Bachand qui confirme ce que plusieurs observateurs attentifs, dont le soussigné, répètent depuis le début : le Québec est dans une situation financière enviable, au point d’afficher cette année un déficit de 1,1 milliard $ de moins sur le déficit de 4,2 milliards $ qu’il annonçait en mars dernier.
Quand on sait à quelles tensions est soumise la préparation d’un budget, on ne peut qu’être très surpris d’un écart favorable aussi important entre les prévisions et les résultats, surtout en période de mauvaise conjoncture. À ma connaissance, c’est la première fois qu’une telle chose se produit, et même s’il faut se réjouir de ce développement favorable, il faut au contraire beaucoup s’inquiéter des manoeuvres qui ont entouré la confection du budget l’hiver dernier.
On se souviendra que l’État québécois était alors en négociation avec le secteur public et qu’il plaidait son impécuniosité pour justifier la maigreur de ses offres. Si j’étais un dirigeant syndical, j’aurais aujourd’hui l’impression de m’être fait rouler dans la farine, et je serais en beau « ... ».
Décidément, ce gouvernement fait vraiment tout pour se rendre profondément antipathique. Aujourd’hui, s’il croit que cette « bonne nouvelle » va atténuer la grogne contre lui, il se trompe lourdement. Au contraire, elle ne va qu’exciter la colère des Québécois qui auront à juste titre l’impression de s’être fait enfumer l’hiver dernier.
Alors, la question se pose. Quel était le sens de sa manoeuvre à ce moment-là ? Et si nous ne parvenons pas à y répondre, l’autre question qui se pose est celle de savoir qui elle pouvait bien avantager ? Le gouvernement lui-même ? Certainement pas. Ce budget-là ne lui a gagné aucune sympathie, bien au contraire. Alors qui ? Et nos yeux se tournent lentement vers « the usual suspects »...
En attendant, cette annonce vient complètement ridiculiser les prétentions des Bouchard, Legault, Facal et Pratte et Dubuc selon lesquelles le ciel s’apprêterait à tout moment à nous tomber sur la tête. Et elle va même plus loin. Lisez attentivement ce que dit le ministre Bachand :

« À 1 % de notre produit intérieur brut (PIB), le déficit du Québec se compare favorablement à ceux d'autres juridictions. Par comparaison, l'Ontario a enregistré un déficit de 19,3 milliards de dollars pour la même période, soit 3,3 % de son PIB. Le gouvernement fédéral a, quant à lui, présenté un déficit de 55,6 milliards de dollars, soit 3,6 % du PIB canadien».

La Presse rajoute ensuite :

« Le Québec a aussi su mieux contrôler la croissance de ses dépenses, selon le ministre Bachand. De 2003-2004 à 2009-2010, le Québec a affiché une croissance annuelle moyenne de ses dépenses de 2,1 points de pourcentage inférieure à celle des autres provinces canadiennes. «Durant cette période, la croissance des dépenses du Québec s'est effectivement établie à 5,0%, alors que la moyenne des autres provinces était de 7,1%. Le Québec est donc, avec la Colombie-Britannique, la province ayant la mieux contrôlé ses dépenses», a souligné le ministre. En revanche, au ministère de la Santé, les dépenses ont cru de plus de 7 % dans la dernière année. »

Non seulement le Québec n’est-il pas en mauvaise posture, mais il est en fait dans une situation qui pourrait faire l’envie de plusieurs États souverains s’ils la connaissaient. C’est l’exacte confirmation de ce que j’affirme depuis février dernier dans les colonnes de Vigile, et c’est ce qui m’amène à répéter encore une fois que « jamais la conjoncture n’a été meilleure ».