La paille et la poutre

James Joyce, l'Irlande, le Québec, les mots - Victor-Lévy Beaulieu

Quand on ne veut pas vraiment prendre connaissance du message, on tire sur le messager. Pour [Jean-François Nadeau, je suis donc un récidiviste->5297] qui, les yeux fermés, appuierait tout ce que dit ou fait Mario Dumont.
Permettez que je précise les choses une fois pour toutes.
Je ne suis pas membre de l'ADQ et je ne l'ai jamais été. Le texte que j'ai publié dans Le Devoir de lundi dernier rendait tout simplement compte de l'opinion qui est la mienne depuis les élections de mars 2007. Tenant pour acquis qu'il n'y a plus de parti indépendantiste au Québec et que les trois partis qui nous représentent actuellement à l'Assemblée nationale sont de centre-droit, royaume du néolibéralisme, je disais que, tout compte fait, l'ADQ n'avait pas si mal fait que ça depuis qu'elle est l'opposition officielle.
Je disais surtout que je ne prenais pas pour rien le grand brassage d'idées que la présence de l'ADQ à l'Assemblée nationale devrait susciter surtout auprès des intellectuels dits de gauche. Si j'en juge par le manifeste de Gérald Larose sur la gouvernance souverainiste qu'il propose, ce n'est toutefois pas demain qu'on va se déprendre de nous-mêmes!
Dans l'attente de la création d'un parti résolument indépendantiste auquel je me rallierais avec joie, pas question que je finasse avec ces deux vieilles choses mortes que sont le Parti libéral et le Parti québécois. En attendant, je me sens le droit de réfléchir à haute voix comme je veux, quitte à me tromper. Et si je me trompe, je préfère me tromper avant qu'après. Et ce ne sont pas ceux qui jouent aux p'tits Jos Connaissant prétendument gauchistes, comme Jean-François Nadeau, qui m'interpellent vraiment.
Avant de condamner le populisme chez les autres, Nadeau devrait relire les 200 dernières pages de la biographie qu'il a consacrée à Pierre Bourgault. Cette recension de tous les potins et ragots de la colonie dite artistique et de la presse à sensation à propos de la sexualité de Bourgault, pleine de sous-entendus vicieux, qu'est-ce donc, sinon du populisme dont le seul but est de racoler le bon peuple afin de lui vendre le plus grand nombre possible d'exemplaires? À trop voir la paille dans l'oeil de son voisin, on ne se rend plus compte de la poutre qu'on a dans le sien.
Et c'est ainsi qu'on finit par mépriser les gens de rien, les illettrés et les ignorants parce que, bourgeois dit de gauche, on se croit en possession de toute la vérité, une, universelle et apostolique comme le prétendait et le prétend toujours l'Église catholique. Je préfère être du côté des gens de rien, des illettrés et des ignorants au milieu desquels je vis par ailleurs, dans l'inquiétude, la misère culturelle et sociale dont nous essayons courageusement de sortir sans l'aide de grand monde pour nous aider. Quant aux bourgeois dits de gauche, ils lisent peut-être beaucoup et mieux que l'autodidacte que je suis, mais ils ne sont pas nombreux à passer par chez nous, même en été. Pourtant, je ne doute pas que s'ils se mettaient plus souvent les pieds dans ce fumier que nous sommes souvent pour eux, grand bien leur ferait.
***
Réplique
Victor-Lévy Beaulieu a le droit d'exprimer sa pensée. Évidemment. Mais ses admirateurs, dont je suis comme il le sait, ont j'imagine le même droit que lui. Je ne suis pas le seul à trouver que les récents propos de VLB dépassent l'entendement, comme en donnent déjà un indice les lettres de lecteurs que Le Devoir a publiées ces derniers jours. Écrire que c'est par souci d'humanisme que l'ADQ voudrait réduire à néant les commissions scolaires, écrire encore qu'une politique économique de droite, comme en propose l'ADQ, mérite l'attention parce qu'il faut bien battre la même mesure que tout le monde, voilà qui est fort de café.
Mais plutôt que de répondre aux arguments que plusieurs lecteurs ont avancés en réplique à ses propos surprenants, VLB joue les matamores blessés et tire dans tous les sens. Revoilà donc, en forme de pirouette, un vieux couplet sur les régions, assaisonné d'attaques personnelles, servi au nom du peuple lui-même. Est-ce là un indice de la profondeur de sa réflexion au sujet de l'ADQ? C'est en tout cas faire injure aux gens de rien de vouloir faire croire qu'ils préfèrent se contenter de bouillies intellectuelles pour se nourrir.
Jean-François Nadeau
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Victor-Lévy Beaulieu84 articles

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Victor-Lévy Beaulieu participe de la démesure des personnages qui habitent son œuvre. Autant de livres que d'années vécues, souligne-t-il à la blague, comme pour atténuer l'espèce de vertige que l'on peut éprouver devant une œuvre aussi imposante et singulière. Une bonne trentaine de romans, une douzaine d'essais et autant de pièces de théâtre ; des adaptations pour la télévision





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