Plan Marois pour l'indépendance

La leçon écossaise

Les jeunes souverainistes pensent que le fédéralisme canadien n'a rien à offrir au Québec et que la Constitution canadienne est irréformable. Or, la marche vers l'indépendance est encore bien pire.

La marche vers l'indépendance, c'est plus difficile que la subordination. WOW, quelle découverte. Alors, soumettons-nous. Comme des Tanguy. O Canada! O zabris! Il y a de la mollesse dans le pantalon!

Jean-François Landry - Un groupe de [50 jeunes souverainistes->32100] dénonce l'autonomisme de Pauline Marois emprunté à l'ADQ. Selon eux, le PQ ne peut négocier de bonne foi avec Ottawa puisque son objectif premier est de réaliser l'indépendance et qu'aucun gouvernement canadien ne voudra négocier le couteau sur la gorge.
La position des jeunes souverainistes déçus est donc logique, mais radicale. Elle rejette définitivement le beau risque de René Lévesque. Rappelons que l'indépendance québécoise a été rejetée démocratiquement deux fois et plafonne dans les sondages depuis des années, et ce, malgré l'impopularité du gouvernement libéral actuel. L'accession à l'indépendance dans les pays démocratiques est parsemée d'embûches tout aussi difficiles à surmonter les unes que les autres. Les jeunes signataires de la lettre adressée à la chef du PQ devraient réaliser l'ampleur des défis politiques et constitutionnels quasi insurmontables. Le plan Marois est silencieux sur les défis qu'implique la réalisation de l'indépendance. Le PQ n'est pas seul dans cette situation. Elle se répète aussi en Écosse pour le gouvernement minoritaire indépendantiste du Scottish National Party (SNP).
Six défis de la route vers l'indépendance
La croyance populaire veut qu'une victoire du Oui à un référendum sur l'indépendance entraîne automatiquement sa réalisation. Or, la victoire du Oui au Québec ou en Écosse ne serait que le premier pas dans une course à obstacles. Selon le politologue Robert Hazell, la formation d'un gouvernement majoritaire dirigé par le SNP est le premier de six défis dans la réalisation de l'indépendance. Voici les cinq autres.
Le premier défi est le référendum lui-même. Les sondages sur cette question au cours des dix dernières années démontrent que l'appui à l'indépendance en Écosse varie entre 25 et 30 %. De plus, même si ce chiffre augmente à l'approche du référendum, il y a une différence entre ce que les gens affirment a priori et le vote dans l'isoloir. Au Québec, le groupe des 50 rappelle ironiquement que 78 % des Québécois préfèrent la réforme du fédéralisme canadien à l'indépendance. De plus, l'appui à l'indépendance plafonne depuis de nombreuses années et rien n'indique que cette tendance est sur le point de se renverser.
Perte de revenus
Deuxièmement, le référendum proposé par le SNP concerne uniquement l'autorisation pour le gouvernement écossais d'entamer des négociations avec le gouvernement britannique sur les termes de l'indépendance. Certains arrangements pourraient alors être très impopulaires. Les Écossais ne recevraient plus de transferts financiers leur permettant de bénéficier d'un niveau de dépenses publiques par personne plus élevé qu'en Angleterre. Le retrait du Québec de la fédération canadienne entraînerait la perte de revenus pour le trésor québécois en vertu de la péréquation, dont le Québec se fait le triste bénéficiaire depuis trop longtemps en raison de sa pauvreté.
Troisièmement, l'Écosse devra faire une demande pour devenir membre de l'Union européenne (UE). La reconnaissance du SNP de la nécessité de négocier avec l'UE doit logiquement supposer la possibilité de l'échec. En effet, certains pays européens pourraient bloquer les négociations de peur d'encourager les revendications indépendantistes de leurs propres minorités nationales. De son côté, le Québec devra postuler pour adhérer à certaines ententes internationales (ALENA et OMC) en plus d'obtenir la reconnaissance de la communauté internationale.
Tensions politiques
Quatrièmement, la possibilité pour l'Écosse de se voir offrir une nouvelle admission dans l'Union européenne dépend grandement de l'appui du Royaume-Uni. Cette possibilité dépend de l'issue des négociations sur des enjeux fondamentaux. À titre de comparaison, le divorce entre la Slovaquie et la République tchèque a nécessité 31 traités et plus de 2000 accords particuliers. Une fois signés, ces accords représenteront les termes de l'indépendance que les Écossais devront accepter par un autre référendum.
Au Québec, la répartition de la dette nationale et le règlement de la question autochtone sont des enjeux qui risquent de créer des tensions politiques. Ainsi, un deuxième référendum est nécessaire pour respecter le principe du consentement informé. Le premier référendum ne concerne que la question de principe et non les détails de l'indépendance.
Enfin, le dernier défi concerne l'approbation parlementaire. En fait, l'indépendance ne peut être accordée que par les Parlements britannique et canadien. Les parlements
écossais et québécois n'ont pas la compétence de déclarer unilatéralement l'indépendance. Un gouvernement indépendantiste du PQ devra aussi composer avec la loi sur la clarté référendaire. En vertu de cette loi, une question référendaire claire et une majorité claire constituent des conditions sine qua non pour que le Canada accepte de négocier bilatéralement les modalités de sécession de l'une de ses provinces.
En résumé, la marche vers l'indépendance est parsemée d'embûches tout aussi difficiles à surmonter les unes que les autres pour le SNP et le PQ. Les jeunes souverainistes pensent que le fédéralisme canadien n'a rien à offrir au Québec et que la Constitution canadienne est irréformable. Or, la marche vers l'indépendance est encore bien pire.
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Jean-François Landry - Candidat à la maîtrise en science politique de l'Université Laval
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Précision: l'auteur n'est pas le même Jean-François Landry que celui qui a signé la lettre des jeunes militants publiée dans nos pages lundi.


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