Mois de la francophonie

La langue de chez nous!

Tribune libre

À travers le monde, le mois de mars est consacré à la francophonie dans toute sa diversité. Cette initiative est organisée annuellement pour promouvoir la diversité culturelle, mais aussi pour soutenir les initiatives de dialogue et de rapprochement des personnes dans cette vaste communauté linguistique. Cette année, les Amériques sont à l’honneur. Saviez-vous que c’est plus de 33 millions de personnes qui parlent le français dans cette vaste région de la planète? On estime à 275 millions la population francophone dans le monde, à 9,4 millions au Canada et à 11 millions aux États-Unis. Tout un monde à découvrir!

La question de la langue demeure toujours un sujet sensible au pays. Les francophones sont minoritaires dans cette vaste contrée aux allures d’un continent. Cette minorité latine a réussi avec courage et détermination, après plus de 480 ans, à maintenir vivante cette langue fabuleuse. Il ne faut pas sous-estimer le rôle majeur que joua l’Église catholique, par ses organisations éducatives et sociales, dans le maintien et la défense du fait français au pays. Cette aventure francophone dans cette terre d’Amérique est un cas d’espèce dont la survie demeure fragile pour les héritiers de ce trésor national. Les statistiques le démontrent hors de tout doute, les citoyens de langue française diminuent au pays de façon constante, voire inquiétante selon certains. Même le Québec subit, malgré l’adoption de la loi 101, une érosion certaine. Quel est l’avenir des francophones de ce vaste territoire?

Ce mois de la francophonie, à la fois culturel et festif, nous fait prendre conscience de la réalité du fait francophone au pays et dans le monde. De l’Atlantique au Pacifique, les francophones comptent aujourd’hui pour 22% de la population canadienne. En 2011, 7 274 090 personnes déclaraient avoir le français comme langue maternelle. Évidemment, il y en a beaucoup plus qui le parle à travers le pays.

C’est au Québec que l’on retrouve la majorité de ceux-ci (6 231 600), puis en Ontario (561 160) et au Nouveau Brunswick (240 445). Langue fondatrice du pays, le français a perdu du terrain au fil des décennies au détriment de l’anglais, langue dominante en Amérique du Nord. Les batailles linguistiques n’ont pas manqué au fil de notre histoire. Défendre sa langue, c’est lutter pour sa culture, ses droits, sa reconnaissance, sa nation. Les francophones hors-Québec en savent quelque chose. Dans les coins reculés du Manitoba, les descendants de l’héroïque Louis Riel ont souvent monté aux barricades pour préserver leurs droits linguistiques et avec raison. Il en est de même pour les Acadiens qui ont été décimés scandaleusement à travers la terrible déportation, sorte de nettoyage ethnique, entre 1713 et 1755.

On estime à 275 millions de personnes qui utilisent la langue française couramment ou partiellement dans leur vie quotidienne. Le français est la 5e langue la plus parlée dans le monde et la seule, avec l’anglais, à l’être sur les cinq continents. Elle est la 3e langue des affaires dans le monde et 2e langue des Organisations internationales. La francophonie regroupe quelque 80 États et gouvernements. Dans plusieurs pays dans le monde, le français a le statut de langue officielle ou co-officielle, ce qui en fait la deuxième langue du monde au plan de l’importance géopolitique.

C’est en 1986 que s’est tenu à Versailles le premier Sommet de la francophonie sous la présidence de François Mitterrand. Lors du récent sommet tenu à Dakar en novembre 2014, la Canadienne, Michaëlle Jean, fut élue secrétaire générale de l’Organisation internationale de la francophonie après de longues tractations à huit clos. Un poste prestigieux qui, selon de nombreux observateurs, positionne le Canada sur le plan international; sans aucun doute une consolation pour la perte de son siège au conseil de sécurité de l’ONU.

Au Québec, nous constatons malheureusement, particulièrement dans la métropole, une perte effective de terrain au profit de l’anglais. Les batailles de chiffres sont fréquentes et chacun fait bien dire ce qu’il veut aux données des firmes de sondage. Force est de constater que la difficile intégration des immigrants reste entière. L’avenir du français dans la métropole passe inévitablement par une intégration réussie et valorisante du français.

Dans un article de Joseph Facal, publié dans le Journal de Montréal en 2012, nous apprenons que « la moitié des immigrants qui ne connaissent pas le français sont ici depuis de 15 ans. » Inimaginable mais vrai! Et qui plus est, selon l’auteur, l’usage du français par les allophones en milieu de travail n’a aucunement progressé depuis 30 ans. Il y a de quoi s’inquiéter. Le quotidien Le Devoir, nous rapportait la fin de semaine dernière que l’Office québécois de la langue française n’a pas encore réussi, après trois ans, à forcer l’usage du français sur le chantier de construction du nouveau CHUM. C’est quand même incroyable!

L’avenir du Québec passe inévitablement par l’immigration si l’on veut maintenir à tout prix une vitalité économique. L’intéressant article de Joseph Facal nous fait prendre conscience « que 30 à 40% des immigrants qui ne parlent pas français ne suivent pas de cours de français et travaillent en anglais ou dans leur langue d’origine. » Ne l’oublions pas, le Québec accueille pas moins de 50 000 immigrants par année. Il importe que la langue de travail soit aussi le français. Si l’on souhaite contrer l’érosion du français, il faudra qu’il soit priorisé dans toutes les sphères de la société.

Dans cette région du monde, nous sommes tous conscients de la nécessité d’apprendre et de parler l’anglais, mais pas au détriment de notre langue française, de notre culture, de notre identité. Il revient à chacun de promouvoir notre langue commune et aux autorités concernées d’abroger les législations en vigueur afin de soutenir adéquatement le développement du français chez nous.

En écrivant ces mots, la magnifique chanson La langue de chez nous d’Yves Duteil remonte en moi : « C’est une langue belle avec des accents superbes qui porte son histoire à travers ses accents. (…) C’est une langue belle à qui sait la défendre. Elle offre les trésors de richesses infinies. Les mots qui nous manquaient pour pouvoir nous comprendre et la force qu’il faut pour vivre en harmonie. » N’est-ce pas Albert Camus qui disait: «Ma patrie, c’est la langue française.»?


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2 commentaires

  • Ouhgo (Hugues) St-Pierre Répondre

    26 mars 2015

    Vrai qu'un texte de plusieurs paragraphes pique toujours la curiosité vers la recherche d'accrocs. Voulant ajouter à "huis", n'ai repéré qu'un vice qui s'insère de plus en plus régulièrement: "Cette aventure francophone..." Rigoureusement, "phone" réfère à "entendre". Les phonèmes, les sons qu'on entend. Les francophones, les anglophones: de langue française, anglaise. On dit maintenant, régulièrement, album francophone, spectacle francophone, musique francophone... fort bien, si on présume que ces substantifs ont des oreilles sensibles à la langue française... d'où: aventure francophone. S'il n'y a pas abus, ce ne serait qu'évolution de la langue? Ça semble pourtant partie du vent, fort en Amérique du Nord, qui tend à faire disparaître le mot FRANÇAIS: "Cette aventure française en Amérique..."

  • Archives de Vigile Répondre

    25 mars 2015

    Très interessant et informatif.
    Un petit clin d'œil pour la langue française: "huis clos" et non "huit clos" à propos de cette élection manipulée de Mme Jean.