À la suite de son décès, les éloges n’ont pas manqué sur la personne et la carrière de Jacques Parizeau... et ils étaient bien mérités.
Mais les médias n’ont pas raté l’occasion de passer en boucle sa déclaration controversée prononcée le soir du référendum de 1995.
Je vous la rappelle: «Nous avons été battus, par qui? Par l’argent et les votes ethniques, essentiellement!»
Évidemment, personne n’a osé évoquer les cris furieux d’indignation en provenance des gazettes et de la cohorte des bien-pensants du multiculturalisme en réaction à cette déclaration percutante.
C’est tout juste si, à l’époque, il ne fut pas lapidé sur la place publique. Même au PQ, plusieurs en eurent honte et tombèrent dans la repentance.
Rien que des faits, pourtant...
C’est d’ailleurs à partir de là que le PQ s’embourba dans le «nationalisme civique», insignifiant et sans consistance, et prit ses distances avec le nationalisme qualifié péjorativement «d’ethnique», c’est-à-dire trop imprudemment centré sur la communauté nationale enracinée depuis des siècles dans ce coin d’Amérique appelé Québec.
Je suis de ceux qui n’ont jamais trouvé indigne ni méprisable la déclaration de M.Parizeau. Elle rompait avec la langue de bois et n’évoquait que des faits.
Le gouvernement fédéral avait effectivement puisé à pleines mains dans le Trésor public pour financer une orgie de propagande et, de plus, les «usines de citoyenneté» ont fonctionné à plein régime pour ajouter des électeurs au camp du NON. Ce sont là des faits avérés et documentés.
Ces derniers jours, j’ai noté que parmi les encenseurs du défunt, il y en a qui, en ce temps-là, prônaient la crucifixion comme punition pour ces propos tellement... intolérants. Pourtant, qu’y a-t-il de répréhensible à reconnaître que les communautés dites culturelles sont plus ou moins acquises massivement au Parti libéral et que la grande majorité des membres de ces communautés sont, sur le plan identitaire, davantage Canadiens que Québécois?
Ce sont là des faits, pas des opinions, encore moins des états d’âme.
Ambivalence identitaire
Mais il y a un autre fait que M.Parizeau n’a pas évoqué, et c’est qu’un grand nombre de Québécois dits «de souche» (les Canadiens français d’autrefois) ont privilégié, en 1980 aussi bien qu’en 1995, leur appartenance canadienne.
Oui, «l’argent et les votes ethniques» ont eu des effets non négligeables sur les résultats référendaires et la mise au banc de M.Parizeau, à l’époque, fut un étalage nauséabond d’hypocrisie. Mais les deux défaites référendaires sont d’abord le fruit de l’ambivalence identitaire des Québécois francophones. C’est là une réalité que l’on ne peut pas glisser sous le tapis dans la perspective d’un autre scrutin référendaire.
Autre question: M.Parizeau était-il tenu de démissionner comme premier ministre du Québec? Je ne le pense pas. M.Lévesque ne l’a pas fait après le référendum de 1980.
En fait, il est essentiel de distinguer, dans de telles circonstances, comme le spécifie Claude Morin dans son dernier livre, Je le dis comme je le pense, l’objectif et le moyen. «L’objectif, écrit-il, est la sauvegarde et l’épanouissement de l’identité québécoise, la souveraineté est le moyen que le PQ privilégie à cette fin».
On peut être convaincu que la souveraineté (c’est toujours mon cas) est le moyen le plus approprié par rapport à l’objectif (le renforcement de l’identité québécoise), mais si le peuple refuse d’y recourir, il ne faut pas renoncer à l’objectif.
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