En marge du 1er Congrès d’ON

La critique est une force

Option nationale

Ex-président et ex-candidat d’Option nationale dans Hochelaga-Maisonneuve.
Le 14 novembre 2012, je démissionnai de toutes mes fonctions au sein d’Option nationale, tout en demeurant membre du parti. À ce titre, comme beaucoup d’autres observateurs de la vie d’ON, je ne peux qu’être troublé par certains faits entourant la tenue de son 1er Congrès.
Dans ma lettre de démission adressée à Jean-Martin Aussant (lettre qu’un petit malin, démasqué depuis, s’était empressé de couler au journal La Presse), j’exprimais mes motifs, y dénonçant l’absence de vision organisationnelle claire et cohérente de la direction d’ON qui ne pouvait qu’amener notre parti droit vers une impasse.
Les nombreux témoignages lus et entendus à la suite du cafouillis du Congrès des 2 et 3 mars 2013 me donnent malheureusement raison.
Je déteste avoir raison de cette façon.
Le contraste est frappant entre l’Assemblée de fondation d’Option nationale du 25 février 2012 et le Congrès tenu à Montréal. Autant la rencontre de Bécancour a laissé l’impression d’une machine bien rôdée dégageant une atmosphère sereine et positive dont les membres présents eurent la satisfaction de pouvoir pleinement s’exprimer, y compris amender les propositions devant constituer la plateforme électorale, autant le premier Congrès a laissé nombre de participants sur leur faim, perplexes voire irrités devant l’amateurisme et les ratés de l’organisation.
Les participants à l’Assemblée fondatrice, dont moi-même, sortirent confiants et enthousiastes de l’exercice. Le 1er Congrès, au contraire, n’aura pas fini de laisser un goût amer et de susciter grogne et insatisfaction chez nombre de congressistes, comme en témoignent les nombreux textes publiés sur Facebook en marge de l’événement.
La question se pose : comment en est-on arrivé à une telle dégradation de l’organisation ?
Il serait facile de tout mettre sur le dos de la jeunesse du parti et de l’inexpérience.
ON avait à peine cinq mois d’existence lors de son Assemblée de fondation. Mais après un an et demi d’existence et une campagne électorale intense, l’on dirait que les capacités organisationnelles du parti n’ont fait qu’empirer au lieu de s’améliorer.
Certains invoquent le fait qu’ON bénéficiait d’un personnel salarié et du bureau de circonscription du député lors de l’assemblée fondatrice. Or le 1er Congrès de Montréal aussi pouvait compter sur une directrice générale et un personnel payés, disposant en plus d’un secrétariat national permanent situé à quelques kilomètres du lieu de la rencontre.
Il n’y a qu’à lire cet extrait, plein de candeur, du texte de Paolo Zambito publié sur Facebook le 28 janvier 2013 pour se faire une idée de l’état de déliquescence qui s’est emparée de la permanence du parti :
«2) Sur la gestion des bénévoles:
La difficulté, c'est de gérer la croissance. On a pleins de monde très motivés mais il n'y a pas assez de personnes pour gérer et former tous ces gens-là. Voyez-vous, on ne réalise pas que la plupart des tâches demandent une certaine expertise que parfois les gens n'ont pas. Il est d'ailleurs arrivé de former des bénévoles de bonne foi qui, finalement ont réalisé que ce qui était exigé pour une tâche était plus gros que ce qu'ils avaient imaginé au départ. Dans ce temps-là, le travail de formation est a recommancer et c'est d'autant plus difficile.»
Pendant que M. Zambito, vice-président à l’organisation au sein du Conseil national, déplorait le manque d’expertise pour soutenir les bénévoles, des militants émérites ont été mis de côté, des organisateurs d’expérience ont démissionné ou ont été écartés par la direction. Le tort de ces gens : donner l’heure juste ou questionner les mesures douteuses et les décisions mal avisées de la permanence.
Je suis juste assez vieux pour me rappeler qu’à l’époque où les Frères des écoles chrétiennes dispensaient l’enseignement dans les classes, s’ils devaient subir un élève particulièrement grouillant et critiqueux, ils le mettaient en charge d’une activité, et cela faisait des merveilles. ON choisit plutôt de mettre de côté ces jeunes énergies et ces talents.
«Mieux vaut entendre les critiques de ses amis que subir les foudres de ses ennemis», dit l’adage. Il semble que la direction d’ON ne sait pas faire sienne cette vieille maxime.
D’aucuns ont dénoncé une atmosphère de camp retranché installée à la permanence du parti ayant pour effet de décourager les talents prometteurs à force de faire taire leur esprit critique ou d’étouffer leurs questionnements. Pour certains membres de la direction, la critique est vue comme une attaque contre le parti ou, pire, vécue comme une attaque personnelle.
Comment pouvons-nous laisser l’organisation du parti aux mains de gens qui ont peur de la critique ?
Or la critique a un rôle essentiel à jouer dans toute organisation. La critique est une force, car elle est la meilleure façon pour un individu ou une organisation d’éviter de se planter. C’est par ce moyen qu’une personne ou une direction peut être mise en contact avec les problèmes et les réalités du terrain, recevant les mises en garde, les avertissements ou les conseils des gens aguerris qui les entourent.
Fermer la porte à la critique, c’est paver la voie aux ratés, aux dysfonctionnements et, dans le cas qui nous occupe, aux frustrations comme celles générées par le dernier Congrès d’ON.
Il est temps qu’un coup de barre soit donné à la permanence du parti. Malgré la satisfaction légitime suscitée par le plébiscite à 97 % en faveur du chef J.-M. Aussant et la montée dans les sondages, Option nationale ne pourrait être qu’un feu de paille, comme d’autres partis l’ont été avant lui, s’il ne se dote pas d’une organisation à la hauteur d’un mouvement qui se veut porteur d’une aussi grande ambition que la souveraineté du peuple québécois.
Aucune cause, aucune ambition digne de ce nom, pour réussir, ne saurait se priver des meilleurs talents et des meilleures compétences.


Laissez un commentaire



9 commentaires

  • Laurent Desbois Répondre

    19 mars 2013

    @Laurent Desbois
    Étrange votre réaction vis-à-vis la critique de certains membres de QS
    Je n'ai que cité la candidate de ON madame Dorion!!! ;)))

  • Archives de Vigile Répondre

    18 mars 2013

    Je ne partage pas l’ensemble du texte de monsieur Lamy mais il est vrai qu’un nouveau parti – tout comme une nouvelle entreprise – peut avoir certains problèmes de gestion de départ.
    La force d’Option nationale est la clarté de sa mission et le fort leadership de son chef. Et en gestion, on apprend que lorsqu'un leader visionnaire propose une mission claire, le reste – suit ou suivra aisément dans le temps. Les stratégies, les modes opérationnels, les façons de faire vont ultimement s’accommoder et répondre à la flexibilité nécessaire de cette nouvelle organisation. On appelle ça l’enlignement. Et Option nationale est rendu là. Nous sommes rendus à cette période d'ajustements mais sans grave conséquence pour la suite. Nous avons un chef solide possédant un grand leadership visionnaire et une mission claire comme l’eau de roche. Je suis fort optimiste pour l’avenir de ce parti. Quant au congrès au début du mois, il fut un exercice pertinent et offrant une visibilité médiatique très stratégique.
    Vivement Option nationale.

  • Archives de Vigile Répondre

    17 mars 2013

    @Laurent Desbois
    Étrange votre réaction vis-à-vis la critique de certains membres de QS, mais sachez que la critique que vous entendez comme quoi Option Nationale ne serait qu'un PQ 2.0 ne concerne pas la question nationale à savoir si ON serait plus ou moins souverainiste que le PQ, mais concerne surtout sa manière de parvenir à l'indépendance, car effectivement comme vous venez de le dire vous-même ce n'est pas la gauche qui détermine les choix de Option Nationale, mais bien la droite comme c'est exactement le cas du PQ présentement.
    Option Nationale est devenu un PQ 2.0 parce que le parti est devenu ce qu'était le PQ lors de la dissolution du RIN, soit un PQ reluisant de son vernis à gauche, mais avec un fond foncièrement à droite. Beaucoup de membres du RIN après sa dissolution ont toujours refusé de rejoindre le PQ à cause de cela, on a qu'à penser à Paul Rose ou encore à Michel Chartrand qui ont d'ailleurs tous les deux soutenu QS.
    Le problème de Option Nationale c'est ce même discours du PQ de l'époque qu'on a entendu au PQ depuis plusieurs décennies, comme quoi "l'indépendance ne serait ni à gauche, ni à droite, mais en avant", un discours qui jusqu'à maintenant ne s'adresse qu'à la gauche et non à la droite comme quoi le projet d'indépendance a toujours été sous la tutelle de la droite même encore aujourd'hui chez ON, alors qu'on sait très bien que l'histoire du PQ a démontré que ce discours n'a servi que les intérêts de la droite plutôt que de l'indépendance, car à chaque virage à droite du PQ, on a vu l'indépendance et le PQ reculer dans les intentions de vote. Même encore aujourd'hui, nous voyons cette réalité avec Pauline Marois qui applique à la virgule près la même doctrine que Lucien Bouchard nous a servi dans les années 90.

  • Luc Bertrand Répondre

    15 mars 2013

    Monsieur Lamy, j'ai dû me rabattre sur la tribune libre pour commenter votre excellente analyse, car je dépassais les 4 800 mots!
    Je n'ai malheureusement pas la plume perforante (genre projectile antichar) de Pierre Cloutier. Il est malheureusement unique et inimitable. Heureusement qu'il est avec nous!
    Madame Ferretti, le temps nous est compté, d'autant plus que le PQ, que les médias continuent sans arrêt de présenter comme un parti souverainiste, continue à mystifier 31% des électeurs et à déshonorer la cause indépendantiste.
    Je répète encore cette analogie, mais elle reste de plus en plus vraie: le Québec est devenu le Titanic. L'illustration est devenue si évidente qu'on peut même la transposer dans le temps.
    Pour la comprendre, Montréal est la troisième classe des passagers du Titanic. S'il est vrai que le français perd sans cesse du terrain au Québec au profit de l'anglais et même d'autres langues (espagnol, chinois entre autres), c'est clair que ce sont les Montréalais qui sont dans les premières loges. Ce sont eux qui doivent sans cesse refluer vers l'arrière du navire (le sud-est de Montréal), à cause de la complaisance des "zélites" de leur État.
    Laval, les banlieues des couronnes nord et sud de Montréal sont les passagers de deuxième classe. L'eau monte si rapidement à leur pont qu'ils n'ont d'autre choix que de s'établir encore plus loin.
    Il y a ensuite la première classe, les régions francophones encore à 95% et plus, sauf la capitale "nationale". À part ceux qui ont eu l'occasion de descendre dans la cale et réalisé la catastrophe inéluctable, on continue à nier la réalité sans réaliser pleinement que la "différence" (lire "accomodements (dé)raisonnables") est un signe que le navire commence à piquer du nez.
    Enfin, il y a la région de Québec et son cirque de clowns interchangeables (PLQ-PQ-CAQ qui donnent le spectacle à l'Assemblée "nationale") qui font semblant que tout va bien (PLQ), que tout peut rentrer dans l'ordre (PQ) ou que le navire ne va pas assez vite (CAQ). On pourrait ajouter Amir Khadir (QS) comme concepteur du paquebot qui connaît la gravité de la situation et que personne n'écoute ou ne prend au sérieux. Le 4 septembre dernier, les passagers originaires de Nicolet-Yamaska n'ont pas cru bon écouter l'officier JMA du Titanic leur déconseillant de faire la traversée sur un navire qu'il savait condamné à la fatalité.
    Il est 2 heures du matin, madame Ferretti. Quand le 20% de non-francophones et à peine plus de 10% des francophones parviennent à réélire ou rater de peu la réélection d'un gouvernement corrompu à l'os, c'est signe que l'eau vient d'atteindre la timonerie (le "Cirque des Mongols" si on veut!). La démocratie a cessé d'être et la fin est proche.

  • Laurent Desbois Répondre

    15 mars 2013


    Catherine Dorion, cadidate ON dans Taschereau, 12 mars 2013 :
    Ma réponse au nouveau préjugé de militants Solidaires selon lequel ON est un PQ 2.0 (commentateurs, por favor, évitez le partisano-manichéisme, les raccourcis intellectuels puants et, surtout, les insultes. Ça commence à me taper solide.)
    "ON n'est pas un parti de gauche. Il y a plusieurs mesures dans notre plateforme qui ont été étiquetées de gauche (j'ai moi-même décrit notre plateforme comme étant de gauche pragmatique), mais c'est pas la gauche qui détermine nos choix. On essaie d'être indépendantistes et pragmatiques avant tout.
    Rien à voir avec le PQ, arrêtez, soyez honnêtes un peu.
    Le PQ n'est plus un parti indépendantiste.
    Alors qu'ON milite pour l'indépendance précisément devant les non-convaincus, le PQ ne parle d'indépendance QUE devant les convaincus, pour conserver leurs votes, comme ils parlent de création de richesse à la chambre de commerce ou d'importance de l'éducation devant les étudiants.
    L'un (ON) est un mouvement, l'autre (PQ) une machine électorale.
    Rien à voir. Arrêtez, là.

  • Laurent Desbois Répondre

    15 mars 2013


    Comment pouvons-nous laisser l’organisation du parti aux mains de gens qui ont peur de la critique ? Or la critique a un rôle essentiel à jouer dans toute organisation.
    Catherine Dorion m’a bloqué sur sa page Facebook pour avoir publié son discours lors de la dernière élection ???
    Catherine Dorion candidate d'Option nationale dans Taschereau
    http://www.youtube.com/watch?v=yENc7zsPxUY

  • Jean-Pierre Bélisle Répondre

    15 mars 2013

    Nul doute dans mon esprit, Monsieur Lamy : avec bientôt cinquante ans de pratique indépendantiste et souverainiste, vous êtes très certainement un militant émérite et un organisateur d’expérience.

    Mais les générations se succèdent. Parfois en grimpant sur les épaules de ceux qui les ont précédés, parfois en repartant à neuf, avec des nouvelles idées, des méthodes inusitées de s’organiser. Ces jeunes commettront-ils des erreurs ? – Certainement. Ces erreurs seront-elles fatales ? – Je ne le crois pas.

    Il y a sur le Mont-Royal des milliers de gens d’expérience que l’on n’entend plus. Le monde ne s’est pas écroulé lorsque le temps venu, ils ont tiré leur révérence.
    Un grand sage qui de son vivant et en toute connaissance de cause décide de se retirer devrait le faire sans déchirer sa chemise avec éclats. À ce point dans notre vie, la question n’est même plus de savoir si nous avons ou non raison.
    JPB

  • Archives de Vigile Répondre

    15 mars 2013

    Une lettre passionnée et courageuse de la part d'un sincère souverainiste. Bravo monsieur.
    Vous avez raison sur bien des points, peut-être pas tous. Je suis un souverainiste ben ben ordinaire mais résolut, je suis de centre (ne me parlez pas de QS)depuis mon adolescence, militant du Oui dans les années 1990, j'ai vécut à fond les années Parizeau, les militants qui se souviennent de ce temps, sont de profonds nostalgiques, dont je suis....J'ai quitté le militantisme quand le PQ a cessé d'être souverainiste, soit vers 1996-1997 sous Bouchard, puis, avec le départ d'Aussant du PQ et la fondation d'ON, j'ai repris du service.
    J'ai été président de Laurier-Dorion pour ON de mai à septembre dernier. J'ai contribué, avec mes modestes moyens et compétences, à la campagne d'un des candidats d'ON les plus brillants et dynamiques...battu bien sûr.
    Aux lendemains des élections du 4 septembre, après une longue réflexion sur tout ce qui s'est passé, j'ai démissionné dans un relatif anonymat, sans rancunes à personne, même si j'avais des raisons. Je ne regrette pas cette décision personnelle...égoïsme, carrièrisme, fatigué. J'ai pris la décision d'aller m'endurcir ailleurs pour citer un membre dont je vais taire le nom.
    J'étais, je suis et je vais rester encore longtemps membre et électeur d'ON, mais j'ai quitté le militantisme dans ce parti. Pourquoi? ce serait long à expliquer. Certains symptômes constatés par M. Lamy sont évidents et expliquent, en partie, mon départ: lacunes d'organisation, improvisations, sérieuses difficultés de communication, tassage de certains individus, règlements de comptes, manigances de certains membres contre des candidats ou des présidents, décisions sans consultations, mais surtout décisions prises au niveau national à la pertinence extrêmement douteuse, m'ont fait faire un bilan de tout ca.
    Ce que je retiens d'ON à l'interne : un souverainisme sincère, intelligent, jeune et décomplexé. Mais il est encore loin, le souverainisme organisé.
    Ce parti commence, il ira loin, je l'appuierai sans hésitation, mais je ne participerai pas à son adolescence, décision égoiste, j'ai 36 ans, je m'y emmerdais.
    Le parti commence, il a encore besoin d'une réflexion, de consolidation, d'experts, d'une prise d'expérience et de s'associer et mettre en valeur autre chose que des étudiants, des artistes et des personnalités qui l'appuient, malgré qu'ils soient indispensables. Le message de Parizeau était clair au congrès, l'indépendance ca se prépare. ON réussira, mais la critique, pour paraphraser monsieur Lamy, ca peut servir parfois à quelque chose. Et ON a encore ben de la misère avec ca.
    Onistes, vous avez un parti à organiser, un projet à structurer avant et après le pouvoir. Vous réussirez.
    Vous aurez ensuite un pays à vos pieds.
    Yannick Cormier
    Modeste membre d'Option nationale.

  • Archives de Vigile Répondre

    15 mars 2013

    "comment en est-on arrivé à une telle dégradation de l’organisation ?"
    Bien, si beaucoup de monde lâchait en novembre 2012, comme vous, ça pourrait peut-être expliquer pourquoi, non?