Le modus operandi des spoliateurs (14)

L’Empire Desmarais dans tous ses états… financiers !

Tempête violente à l’horizon

Chronique de Richard Le Hir


Power Corporation et ses filiales cotées en bourse viennent de rendre publics leurs états financiers pour l’exercice 2011 (508 pages !).
À en croire les livres de Power, tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes, et elle n’a pas été touchée, comme d’autres de ses importants congénères, par les vicissitudes de la conjoncture. Comprenne qui pourra.
Ce n’est pourtant pas qu’il n’y ait pas matière à s’inquiéter, comme Power le précise elle-même à la p. A23 du document sous le sous-titre « Facteurs de risque »,

Le cours de marché des titres de Power Corporation peut être volatil et connaître des fluctuations importantes en raison de nombreux facteurs dont plusieurs sont indépendants de la volonté de Power Corporation. Les conditions économiques peuvent avoir un effet défavorable sur Power Corporation, notamment les fluctuations des taux de change, du taux d’inflation et des taux d’intérêt ainsi que les politiques monétaires, les investissements des entreprises et la santé des marchés des capitaux au Canada, aux États-Unis, en Europe et en Asie.
Au cours des dernières années, les marchés des capitaux ont connu d’importantes fluctuations des cours et des volumes, qui ont particulièrement touché les cours des titres de participation détenus par la Société et ses filiales et qui n’ont pas toujours été liées à la performance opérationnelle, à la valeur des actifs sous-jacents ou aux perspectives des sociétés en question.
De plus, ces facteurs, de même que d’autres facteurs connexes, peuvent donner lieu à une baisse de la valeur des actifs qui est considérée comme importante ou durable, ce qui pourrait se traduire par des pertes de valeur. Lors de périodes de volatilité accrue et de remous sur les marchés, les activités des filiales de Power Corporation pourraient être touchées de façon défavorable et le cours de négociation des titres de Power Corporation pourrait en subir les conséquences.

Et effectivement, le cours de négociation des titres des entreprises de services financiers de Power (Corporation Financière Power, Great-West Lifeco, Société financière IGM) a chuté considérablement depuis le début de la crise financière fin 2007 (env. 40 %).
Vous auriez tort de croire que cela n’a aucune incidence sur vous. La Caisse de dépôt et de placement du Québec détient des titres de Power Corporation, et fort probablement aussi de ses filiales cotées en bourse. Il en va donc de votre sécurité financière. Malheureusement, la Caisse ne publie pas de liste des actions qu’elle détient et de leur nombre et nous ne pouvons pas connaître son degré exact d’exposition aux entreprises du groupe Power.
Or compte tenu du degré de risque que la crise financière en cours depuis maintenant près de 5 ans fait peser sur la valeur du portefeuille de la Caisse et sur sa capacité d’assurer la sécurité financière des Québécois, c’est le genre d’information qu’il serait important d’avoir, d’autant plus que Power reconnaît dans ses états financiers que les entreprises de son groupe se font des prêts entre elles. Même si, comme les états financiers l’indiquent, ces prêts se font aux conditions du marché, il faut comprendre qu’en cas de défaut, toute la pyramide s’écroulerait très rapidement.
En effet, les entreprises de services financiers du groupe reçoivent des dépôts sous formes de primes d’assurance ou de placements, et l’utilisation de cet argent à d’autres fins que celles pour lesquelles elles ont été déposées soulève de graves questions
L’examen des états financiers du groupe Power permet de mesurer toute la complexité de sa structure financière, une complexité que traduit d’ailleurs le nombre élevé des modifications qui ont été ou vont encore être apportées à sa façon de rapporter son information financière suite à l’adoption récente de nouvelles normes, et des notes aux états financiers, ces précisions qu’apportent les vérificateurs pour justifier leurs méthodes et limiter leur responsabilité.
Malgré tout, on parvient rapidement à comprendre que le groupe Power a réussi à se constituer et à acquérir une taille imposante essentiellement avec « l’argent des autres », et entre autres, le vôtre par l’entremise de la Caisse de dépôt.
En effet, les trois entreprises de services financiers ont chacune leur actionnariat propre et Power se trouve dans chaque cas à être l’actionnaire de contrôle. Le risque financier se trouve donc à être partagé entre Power et les autres actionnaires.
Qui plus est, ces trois entreprises se prêtent de l’argent entre elles ou en prêtent à la compagnie mère, comme en font état les rapports financiers. Et lorsqu’on examine attentivement ces derniers, on constate au chapitre des « Engagements et obligations contractuels » (p. A 25) que Power a plus de 12 milliards d’engagements, dont plus de 6 milliards de dette à long terme (plus de 5 ans) et près de 4 milliards d’obligations à court terme (moins de 5 ans) à l’égard d’entités de titrisation. C’est beaucoup.
Pour être en mesure de faire face à ses obligations à court terme, il va donc falloir que la conjoncture soit très favorable (croissance économique solide, faibles taux d’intérêt, stabilité des marchés financiers, stabilité politique à l’échelle globale).
Or, ce n’est pas du tout ce qui s’annonce. En effet, s’il faut en croire les prévisions du Laboratoire européen d’anticipation politique (LEAP) dans son dernier bulletin GEAB N°63 sorti à peu près en même temps que les états financiers de Power, les mois qui viennent vont être passablement agités :
« Ce sont donc, selon LEAP/E2020, cinq orages dévastateurs qui vont marquer l'été 2012 et accélérer ainsi le processus de basculement géopolitique mondial :

_  rechute des USA dans la récession sur fond de stagnation européenne et de ralentissement des BRICS
_  impasse pour les banques centrales et remontée des taux
_  tempête sur les marchés des devises et des dettes publiques occidentales
_  Iran, la guerre « de trop »
_  nouveau krach des marchés et des institutions financières. »



Ceux d’entre vous qui seraient portés à mettre en doute la fiabilité de ces prévisions doivent savoir que le taux de fiabilité des prévisions du LEAP pour les cinq dernières années est supérieur à 80 %.
Et même si elles ne se réalisent pas toutes (ce que je souhaite ardemment), il y a tout lieu de penser que Power Corporation va être assez violemment malmenée au cours des prochains mois, et plus ce sera le cas, plus votre sécurité financière en souffrira, selon le degré d’exposition de la Caisse de dépôt aux activités de l’Empire Desmarais.
Et le pire, c’est que Power Corporation le sait, et fait ouvertement comme si de rien n’était, tout en se démenant autant qu’elle le peut par en dessous pour réduire son exposition, afin que ce soient d’autres qu’elle qui fassent les frais de la tempête sur le point de s’abattre sur elle.
En effet, si Power n’est pas abonnée à la lettre de LEAP, elle est abonnée à au moins dix autres lettres qui n’ont eu de cesse de l’alerter au cours des dernières années aux menaces qui la guettent. Elle a donc eu le temps de se préparer en conséquence. Certains diront que ce n’est que de la bonne gestion. D’autres, plus critiques, se demanderont qui va faire les frais de cette « bonne gestion ».
Et autant ceux qui ne se posent pas de questions que ceux qui s’en posent peuvent être assurés qu’ils en feront les frais, car les questions que je soulève ici auraient dû être soulevées il y a bien longtemps par les administrateurs de la Caisse de dépôt, le gouvernement, l’opposition, et la presse spécialisée.


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3 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    18 mars 2012

    Peut être que la visite de Sabia au repère Sagard n'est pas étrangère a cette situation .
    Les deux, Desmarais et Sabia n'ont surement pas discuter durant trois jours de la pluie et du beau temps ou du sexe des anges mais de choses qui pourraient être beaucoup plus concrète comme par exemple ce que vous soulevez sur la situation financière que Power revèle par cet avertissement et sur l'aide ou le soutien que la caisse pourrait apporter.
    Charest et Sabia ne me feront pas acheter que la visite de Sabia en était une strictement privé.
    Il y as des limites a prendre les Québécois pour les valises
    Mais dans le cas de Charest il ne faut pas s'en surprendre.
    Disons que trois jours c'est beaucoup trop long pour diccuter de la pluie et du beau temps et il reste beaucoup de temps mort pour discuter affaire en tête a tête au chateau autour d'une bonne table bien arrosé de grand cru , surtout quand on sais comment la caisse est assez impliquer dans ses investissement avec le renard de Sagard
    Ne dit -on pas In vino veritas.

  • Archives de Vigile Répondre

    18 mars 2012

    "À en croire les livres de Power, tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes..."
    Le "meilleur des mondes" dans le monde de cauchemar fictif dans lequel se déroule jusqu'à présent le 21e siècle...
    Un article récent en langue anglaise de James Tracy intitulé "9/11 Truth, Inner Consciousness and the "Public Mind" peut nous éclairer à ce sujet:
    http://www.globalresearch.ca/index.php?context=va&aid=29838

  • Archives de Vigile Répondre

    18 mars 2012

    Monsieur Le Hir,
    Je l'ai dit à d'autres. Il n'y a plus rien de normal et qui va bien (et surtout pas pour Power) depuis les attentats du 11 septembre 2001 qui sont le pire cheval de Troie, le pire mensonge de l'histoire.
    Car ces attentats sentent l'élite riche à plein nez pour ceux qui n'auraient pas encore remarqué (ou qui ne veulent pas le voir de peur de mettre en jeu leurs acquis et leur rang social).
    L'acceptation de ce mensonge nous a coûté beaucoup depuis plus de dix ans. C'est à cause de cette acceptation que l'élite riche peut encore nous dire que tout va bien dans le meilleur de mondes.
    Personnellement, je suis bouleversé depuis ce temps, inquiet de voir quelles sortes d'individus sont en charge de nos sociétés occidentales sous le consentement presque général.
    Ça nous prendrait des Michel Chartrand pour diriger la société, lui qui désirait l'instauration d'un revenu de citoyenneté universel afin que tous sans exception puissent vivre décemment et être heureux au Québec.