Échange d'argent liquide dans un resto de Québec

L'avocat du PLQ nie tout

Marc Bellemare obtient le statut de participant à la commission Bastarache

Commission Bastarache


Québec — Les transferts d'argent liquide au restaurant Michelangelo évoqués par Marc Bellemare n'ont jamais existé, a plaidé l'avocat du Parti libéral André Dugas, hier, en marge de la commission Bastarache. Selon M. Dugas, l'ancien ministre n'a inventé tout cela que pour «salir» les réputations des collecteurs Franco Fava et Charles Rondeau.
----
Pour en lire davantage sur la commission Bastarache
----
L'avocat du PLQ commentait alors l'obtention, par Marc Bellemare, du statut de participant à cette commission, dont l'ancien ministre de la Justice avait pourtant réclamé l'annulation en Cour supérieure le 30 juillet.
«J'aurais aimé ça parler de ça», a indiqué André Dugas au sujet des prétendus échanges de billets de banque à la célèbre table de Sainte-Foy. «Mais le juge, du moment que c'est évoqué, dit que ce n'est pas dans le mandat de la commission!» s'est-il plaint.
Depuis son premier jour de témoignage, Marc Bellemare revient, dès qu'il en a l'occasion, sur cet épisode qui l'avait troublé à l'époque au point de solliciter un entretien avec le premier ministre en janvier 2004. Encore hier, alors qu'il était contre-interrogé par André Dugas, M. Bellemare a répété ses allégations: «J'avais vu une situation où monsieur Fava échangeait une quantité considérable d'argent liquide avec un permanent du parti. C'est la raison pour laquelle la rencontre du 8 janvier [avec le premier ministre] a été planifiée.»
Selon André Dugas, tout cela n'est que pure invention. Il n'a pas abordé le sujet durant son contre-interrogatoire, mais après la suspension des travaux, il s'est prêté à un long point de presse à l'entrée du 1091, Grande Allée Ouest, où la commission a élu domicile. Cette histoire est «très, très, très contestée», a-t-il insisté. Me Dugas se dit heureux que la Cour d'appel ait, dans un autre litige, «forcé» M. Bellemare à «vider son sac» devant les enquêteurs du Directeur général des élections quant à l'aspect financement du PLQ: «Il va dire ce qu'il a dire. Quant au Parti libéral, les bénévoles, ils sont très contents, ils vont collaborer à 100 % et quant à moi, c'est un écran de fumée cette affaire là... selon les informations que j'ai.» M. Dugas a insisté auprès d'un journaliste qui le relançait: «Je vous le dis, en vous regardant dans les yeux: "Ça n'a pas eu lieu". Selon les informations que j'ai. Pensez-vous que des gens vont compter de l'argent comptant dans le lobby d'un restaurant? Si vous voyez l'article, là: il est écrit qu'il avait son manteau sur le dos et sortait donc du vestiaire, ce qui est dans le lobby du restaurant et il y avait des gens à côté qui comptaient des "bills"? Voyons!»
Jusqu'au 15 décembre
C'est en fin d'avant-midi que l'avocat de Marc Bellemare, Rénald Beaudry, oralement, a réclamé pour son client le statut de participant à la commission. Michel Bastarache a insisté pour que, durant l'heure du midi, cette demande soit faite par écrit. M. Beaudry a du même souffle réclamé que les travaux de la commission soient suspendus jusqu'à mardi; délai qui lui permettrait d'étudier le résultat des entrevues préalables (appelées aussi «willsay» par la commission), ce qu'il n'a pas pu faire puisqu'il n'avait pas obtenu le statut de participant.
Vers 14h15, Mes Bellemare et Beaudry ont déposé leur demande, qui fut acceptée sur-le-champ. Le commissaire Bastarache a aussi accordé la suspension réclamée jusqu'à mardi, s'inquiétant toutefois du respect de l'échéance du 15 octobre. Il a déjà admis cette semaine qu'il réfléchissait à une demande de prolongation de ses travaux. La date qui circule désormais pour la remise du rapport est le 15 décembre. Notons du reste que M. Bellemare ne s'est pas prévalu de son droit de réclamer une assistance financière. Cela aurait du reste exigé qu'il dépose ses états financiers.
Dans sa requête, M. Bellemare a rappelé qu'il a «contesté publiquement le bienfondé [sic] de cette commission puisqu'il désirait, depuis le début de cette saga, témoigner devant une commission parlementaire». La première échéance pour réclamer un statut de participant était le 7 juin 2010.
Il fait valoir qu'il apparaissait «évident» à M. Bellemare, après quatre jours de témoignage, «que les forces en places [sic] sont démesurément disproportionnées en regard du but recherché par cette commission soit: la recherche de la vérité». Se décrivant comme le «pivot central» de cette commission, M. Bellemare écrit qu'avec le statut, «il sera le seul à pouvoir contre-interroger adéquatement la majorité des témoins prévisibles».
La nouvelle a été bien accueillie par les avocats de la partie adverse. Au sens de l'avocat du PLQ André Dugas, le fait que Marc Bellemare obtienne le statut de participant rééquilibre la commission, qui avait été «disproportionnée volontairement» par M. Bellemare, qui refusait d'y participer. «Maintenant, il ne pourra pas dire que l'exercice est incomplet ou taré», a ajouté M. Dugas.
L'avocat de Jean Charest, André Ryan, qui est aussi du Parti libéral puisqu'il y est président de la commission juridique (depuis 2007), s'est montré plus discret que son collègue Dugas. Aux yeux de M. Ryan, l'ancien ministre de la Justice s'est rendu à l'«évidence», soit qu'il avait un «intérêt» dans cette commission. En en devenant un participant, il «accrédite les travaux auxquels nous participons», a-t-il soutenu.
Contre-interrogatoire
En matinée, en adoptant un style à la fois plus partisan et plus agressif, M. Dugas avait soulevé l'ire de l'avocat de Marc Bellemare, Rénald Beaudry, et a été rabroué par le commissaire Bastarache à plusieurs reprises.
Il a toutefois fait reconnaître à M. Bellemare qu'il avait continué de fréquenter Franco Fava et Charles Rondeau après sa démission en avril 2004. M. Bellemare a joué au golf et a partagé des dîners (notamment au Michelangelo) avec les deux collecteurs de fonds. Selon M. Dugas, cela démontre qu'il n'avait pas d'animosité envers ces personnes, qu'il accuse aujourd'hui d'avoir fait sur lui des pressions «colossales». «Si quelqu'un vous bouscule au point où vous songez à démissionner, si quelqu'un a un comportement intolérable contre vos valeurs éthiques, est-ce que vous allez manger avec lui dans les années qui suivent? Est-ce que vous allez le fréquenter, jouer au golf?» a demandé M. Dugas en point de presse. Plus tôt dans la salle d'audience, M. Bellemare a dit qu'après avoir quitté la politique, il n'a pas «arrêté de respirer», puis de «parler à des libéraux pour autant». Il a même ajouté: «Je parle encore à des libéraux de temps en temps, je ne leur demande pas leur carte de membre avant de leur parler.»
Mardi, c'est l'avocat de Me Bellemare qui contre-interrogera son client.


Laissez un commentaire



Aucun commentaire trouvé

-->