Éthique et politique

L'aveuglement

Corruption libérale - le PLQ en perte de légitimité - cynisme politique croissant



Les Québécois ne font plus confiance à leurs politiciens. De sondage en sondage, ils sont de plus en plus nombreux à ne plus croire en leur intégrité, à tel point que le respect envers la classe politique s'approche du degré zéro. Cette désaffection grandissante envers ceux qui doivent incarner nos valeurs démocratiques n'échappe plus à personne, sauf, faut-il croire, au gouvernement de Jean Charest, qui reste insensible à tous les appels à réagir.
Depuis deux ans, les allégations à l'endroit de politiciens, tous niveaux politiques confondus, ne cessent de s'accumuler. Des allégations dont presque aucune n'a été à ce jour rejetée formellement. Des allégations qui mettent toutes en relation argent et politique. Une relation devenue aux yeux de certains tout à fait normale.
Tantôt, c'est un politicien qui paie son essence avec la carte de crédit d'un ami, qui est par ailleurs un homme d'affaires attendant des contrats d'entreprises gouvernementales. Tantôt, ce sont des propriétaires de garderies qui se sentent tenus de verser une contribution financière au parti gouvernemental pour faveurs obtenues. Une autre fois, ce sont des politiciens qui voguent allègrement sur le bateau d'un influent homme d'affaires en attente de faramineux contrats. Ou un chef de police qui trouve normal qu'un officier de haut rang, parallèlement à ses fonctions, se lance en affaires dans le monde de la construction malgré toutes les enquêtes en cours dans ce secteur.
La liste, on ne le sait que trop, est infinie. Le gouvernement réagit en confiant les dossiers, selon les cas, à la police, à un enquêteur spécial sans pouvoirs précis (pour l'attribution des contrats de construction gouvernementaux) ou encore au Directeur général des élections. Échappe à tous ces enquêteurs, parce qu'ils travaillent en parallèle, la vue d'ensemble de la perversion en train de s'installer dans les administrations publiques.
Ce que certains ne voient pas, la population le voit clairement. Elle voit nos administrations publiques être l'objet d'un dévoiement insidieux qui menace nos valeurs démocratiques. À chaque sondage, elle dit son inquiétude et son désir d'une réaction. Mais le premier ministre Charest refuse la tenue d'une commission d'enquête. Il se refuse à ériger les normes les plus sévères qui soient en matière d'éthique et d'intégrité. Il se refuse à dire fermement que, désormais, ce sera tolérance zéro. Il ne pose un geste que lorsqu'il n'a plus le choix. Béatement, ses ministres et députés l'approuvent.
Montré du doigt sans cesse, le gouvernement Charest a choisi le déni. Il y a de sa part un aveuglement volontaire. Un aveuglement qui lui fait du tort, car il ne fait que creuser la désaffection des Québécois à son endroit. Un aveuglement qui a pour effet de légitimer la cohabitation entre argent et politique.
La société québécoise n'est pas en train de s'effondrer. Mais il y a des repères moraux qui se perdent. Pour mieux comprendre, Jean Charest et ses ministres devraient lire l'écrivain portugais José Saramago, qui dans L'Aveuglement met en scène une ville dont les habitants, frappés soudainement de cécité, n'ont d'autre choix que de se livrer au pillage. Saramago poursuit l'allégorie dans La Lucidité. Dans ce second livre, il met en scène cette fois des citoyens qui réagissent au détournement des valeurs démocratiques de leur ville en déposant dans les urnes électorales des votes blancs. Cela ne ressemble-t-il pas à ce qu'ont fait les Québécois le 8 décembre 2008, où seulement 57,3 % des électeurs inscrits ont voté? Ce taux de participation pourrait bien être moindre la prochaine fois.


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