Séance de mépris mutuel

Corruption libérale - le PLQ en perte de légitimité - cynisme politique croissant



(Québec) Le mépris mutuel que se portent Jean Charest et Pauline Marois a atteint un tel niveau qu'on voit mal comment le premier ministre pourrait quitter la politique sans affronter la chef du PQ aux prochaines élections. Quitter dans ces circonstances équivaudrait, pour M. Charest, à admettre sa défaite aux mains de sa rivale.
Normalement, les politiciens mettent de côté les attaques personnelles lorsqu'ils se retrouvent à l'extérieur du forum survolté de la période de questions. C'est le cas du travail en commissions parlementaires, où ils sont en face à face pendant des heures et où ils échangent dans un climat plus serein.
C'est tout le contraire qu'on a vu lundi, lors de l'étude des crédits du Conseil exécutif, le ministère du premier ministre.
Pauline Marois a donné le ton. Elle a lancé les hostilités en convoquant les médias avant la réunion et en proposant «10 solutions pour enrayer le cynisme ambiant». Suspension de trois ministres, démission d'un quatrième, abandon du salaire de 75 000 $ versé par le PLQ au leader libéral, elle n'a pas mis de gants blancs.
La riposte était prévisible. Tout au long des quatre heures qu'a duré la séance, Jean Charest a répondu par le sarcasme. Il a rappelé la pension annuelle de 85 000 $ votée sous le gouvernement Landry à Claude Blanchet, le conjoint de Mme Marois. Il a même évoqué la vieille controverse autour des «toilettes silencieuses» que celle-ci a fait installer à son bureau lorsqu'elle était ministre.
Pauline Marois a du cran pour s'attaquer aussi durement à Jean Charest. Le premier ministre peut devenir vicieux quand il décide de déstabiliser un adversaire, comme il l'a fait en traitant Mario Dumont de girouette pendant des mois.
Après la victoire libérale de décembre 2008, la chef du PQ a vécu sa traversée du désert. Malgré la récession, les déficits, les déboires de la Caisse de dépôt et la controverse sur les FIER, l'opposition semblait incapable de traverser la carapace du gouvernement. Le départ de François Legault, en juin 2009, ressemblait à un constat d'échec.
Et voilà que tout a changé avec les scandales de la construction à Montréal. Depuis le début de l'année, les péquistes sont tout sourire et Pauline Marois affiche une assurance qu'on ne lui connaissait pas. Elle possède mieux ses dossiers et répond du tac au tac à Jean Charest sans se laisser intimider. Comme on dit au hockey : «la puck roule de son bord...»
La bataille entre les deux chefs n'est plus politique, elle est personnelle. C'est devenu l'équivalent d'une chicane de clôtures où les voisins se détestent tellement qu'ils engagent des frais devant les tribunaux au lieu de chercher une entente à l'amiable. Quand Pauline Marois dénonce la «rallonge» de salaire de Jean Charest, ce dernier s'attaque à son mari. Comme les deux ont l'expérience du pouvoir, ils sont tous deux hypothéqués par leur passé.
Pour les médias, c'est un spectacle passionnant : jusqu'où iront-ils? À quand la prochaine baffe? À certains égards, on pourrait comparer ça aux campagnes de publicité négative dont se délectent les Américains en période électorale.
Cette personnalisation du débat politique sert-elle l'intérêt public? Par sûr! Le climat actuel compromet l'adoption de projets de loi importants sur le financement des partis politiques et la mise en place d'un code d'éthique pour les élus.
Plus encore, il ternit la réputation des deux grands partis. Si le Mario Dumont d'avant 2007 était encore là, c'est son parti qui profiterait de la situation. Mais Dumont a troqué son poste à l'ADQ pour le microphone de Gérard Deltell à TQS. Aurait-il manqué son rendez-vous avec l'histoire?


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