Rapport Bouchard -Taylor

Je ne veux pas que ma culture soit transformée par des interactions avec les cultures immigrantes

Tribune libre 2008


Hier, le 23 mai 2008, Gérard Bouchard et Charles Taylor, co-présidents de
la Commission de consultation sur les pratiques d'accommodement reliées aux
différences culturelles, ont déposé leur rapport final. Ce passage du
rapport retient plus particulièrement mon attention :
«Les membres du groupe ethnoculturel majoritaire (en l’occurrence, les
Québécois d’origine canadienne-française), tout comme les membres des
minorités, acceptent que leur culture (les traditions, les référents
identitaires) soit transformée à plus ou moins long terme par les
interactions que suppose le régime*. C’est cette condition qui rend
possible l’évolution de l’identité québécoise.» * Les co-présidents
signataires du rapport se rapportent ici au régime «interculturel».

Personnellement, je ne veux pas que ma culture soit transformée par des
interactions avec les cultures immigrantes. Je veux que ma culture demeure
typiquement et exclusivement québécoise. Plus encore, je désire du plus
profond de mon coeur que l'évolution de ma culture découle de sa propre
source ancestrale.
J'encourage la découverte d'autres cultures, d'ici et d'ailleurs dans le
monde. Je crois dans l'amitié entre les cultures. Mais je ne crois pas que
l'évolution de mon identité québécoise dépende de l'interculturalisme ou
d'interactions avec les différents groupes ethniques. Selon moi, l'identité
d'une nation évolue quand sa définition gagne en clarté et qu'elle se
précise dans sa réalité historique. Le passage de «Canadiens-français» à
«Québécois» dans les années 70 illustre fort bien ce qu'est une évolution
respectueuse de la réalité historique apportant clarté et précision.
Autrement dit, l'évolution de l'identité québécoise ne peut pas autrement
évoluer que dans son propre cadre, et non pas ceux des cultures
immigrantes, si riches soient-elles et malgré tout le respect qu'elles
inspirent.
À mes yeux, l'interculturalisme est pire que le multiculturalisme. Le
multiculturalisme se définit ainsi : «coexistence de plusieurs cultures
dans un même pays». Autrement dit, chacun peut vivre dans sa propre
culture, y compris sa propre langue. Bref, l'intégration au peuple hôte
n'est plus utile. Avec le multiculturalisme, il s'agit uniquement de
coexister.»
Avec l'interculturalisme, on espère davantage que la coexistence des
cultures mais leur intégration en une nouvelle culture d'accueil. Les
co-présidents demandent à tous les résidents du Québec, «les membres du
groupe ethnoculturel majoritaire» et «les membres des minorités» d'accepter
«que leur culture (les traditions, les référents identitaires) soit
transformée à plus ou moins long terme par les interactions que suppose le
régime.» (interculturel). Ce qui revient à souhaiter que toutes les
cultures en présence sur le territoire québécois s'influencent les unes les
autres et évoluent ainsi au fil de leurs interactions vers une nouvelle
culture. En fait, les co-présidents nous disent que le seul moyen
d'intégrer les immigrants à la société québécoise, c'est d'accepter de
transformer notre culture. Ils laissent entendre la même chose aux
immigrants : le seul moyens que vous avez de vous intégrer est d'accepter
de transformer votre culture.
Je ne vois pas en quoi l'interculturalisme «assure ainsi une sécurité aux
Québécois d’origine canadienne-française comme aux minorités
ethnoculturelles, tout en protégeant les droits de tous, suivant la
tradition libérale,» tel que mentionné à la page 121 du rapport.
L'interaction n'apporte pas la sécurité lorsqu'elle vise la transformation
des cultures en cause car toute transformation implique des pertes à force
de négociations et de révisions, de réaménagements et d'adaptation.
Personnellement, la sécurité que je recherche se trouve dans la
préservation de l'identité et de la culture québécoise et non pas dans une
transformation interculturelle qui risque de la diluer voir de la
dénaturer.
Enfin, je me demande si une identité nationale, ça se partage. Je ne parle
ici de l'identité nationale sous son aspect citoyenne mais sous son aspect
historique et spirituelle. Qu'on le veuille ou non, l'identité nationale de
l'immigrant prendra toujours racines en dehors de nos frontières, dans une
autre nation avec une autre histoire et souvent une autre langue. À mon
avis, l'identité nationale québécoise demeure l'apanage des Québécois de
souche. Ce que nous pouvons partager avec les immigrants, c'est la
citoyenneté, l'aspect légal de l'identité québécoise.
Les co-présidents de la commission écrivent : «Enfin, en instituant le
français comme langue publique commune, il fournit un cadre de
communication et d’échanges.» Dans la définition de l'identité québécoise,
la langue est beaucoup plus qu'un simple outil de communication et
d'échanges. Et elle dépasse largement l'espace public commun. En fait, la
langue est le fondement même de la pensée et de la spiritualité de
l'identité québécoise. C'est le vivre en français qui permet à l'identité
québécoise de se formuler. Il ne suffit pas de parler en français dans
l'espace public commun du Québec pour être Québécois. Seul le vivre en
français permet à un immigrant de s'intégrer à la société québécoise. Mais
cette intégration se limite généralement à la citoyenneté. Or, être
Québécois, c'est beaucoup plus que de simplement être citoyen du Québec.

http://manuscritdepot.com/internet-litteraire/actualite.129.htm

Serge-André Guay, président éditeur

Fondation littéraire Fleur de Lys


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Serge-André Guay34 articles

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Marié et père de quatre enfants, Serge-André Guay est
né à Lévis (Québec, Canada) en 1957. De formation autodidacte et
travailleur autonome depuis 25 ans, il a tout d'abord été animateur,
commentateur, chroniqueur, journaliste, recherchiste et rédacteur en chef
au service de différents médias québécois et ontariens.

Puis, son expérience des médias et un stage de formation en Europe font de
lui un éducateur aux médias dont les interventions sont recherchées par le
milieu scolaire. Ensuite, à titre de consultant, l'utilité de ses plans
d'action en communication et en marketing est vite appréciée.

Depuis 1990, il développe une expertise hautement spécialisée en recherche
marketing, soit l'étude des motivations d'achat des consommateurs, axée sur
l'évaluation prédictive du potentiel commercial des produits et des
services, nouveaux et améliorés.

Pour ce faire, il retient la méthode et l'approche indirecte proposées par
le chercheur américain Louis Cheskin, à qui il accorde le titre de premier
scientifique du marketing.

Depuis, il a étudié les réactions sensorielles involontaires et les
réactions inconscientes de plus de 25,000 consommateurs dans le cadre de
plus d'une centaine d'études des motivations d'achat pour différents
manufacturiers et distributeurs canadiens.

Il a signé de nombreux articles et donné plusieurs conférences
percutantes. Il a aussi publié une série de vingt-quatre études traitant du
caractère scientifique du marketing sous le titre "Science & Marketing ",
Prédire le potentiel commercial des biens et des services". À ses yeux, le
marketing doit renouveler son efficacité sur des bases scientifiques
rigoureuses.

Il n'hésite pas à questionner les idées reçues. Animé par une profonde
réflexion sur la conscience et la condition humaine, il est un «
penseur-entrepreneur », à la fois fonceur et analytique.

En 2000, il écrit un essai de gouvernance personnel sous le titre J'aime
penser – Comment prendre plaisir à penser dans un monde où tout un
chacun se donne raison.

En juin 2003, il met sur pied la Fondation littéraire Fleur de Lys,
premier éditeur libraire francophone sans but lucratif en ligne sur
Internet





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