POINT DE VUE

Il y a urgence à retrouver notre autosuffisance alimentaire

Agroalimentaire - gestion de l'offre

En marge des travaux de la Commission sur l’avenir de l’agriculture et de l’agroalimentaire, il faudra le courage et la volonté de changer les modèles établis. Et ce défi s’adresse aux agriculteurs, aux transformateurs, détaillants, gouvernements et aux consommateurs.
Aujourd’hui, ce que l’on met dans son assiette provient plus souvent d’ailleurs. Ailleurs, c’est à plusieurs milliers de kilomètres de chez soi, à l’extérieur de nos frontières. Alors que tout récemment, les épiceries offraient des produits en provenance de nos campagnes, maintenant devenues supermarchés, elles débordent de denrées alimentaires qui viennent d’aussi loin que la Chine. Trouver des aliments produits au Canada, relève parfois de l’exploit. Libre échange oblige.
Pourquoi devrions-nous manger du bœuf du Brésil, du porc des États–Unis, des fraises de Chine, des tomates et concombres du Mexique quand nous en produisons dans tout le pays? Parce que tous ces aliments importés coûtent moins cher aux consommateurs ou parce qu’il est plus payant pour nos entreprises agroalimentaires d’exporter toute notre production agricole dans des pays qui offrent des marchés beaucoup plus grands que le nôtre? Après tout, nous ne sommes que 33 millions d’habitants. Sauf que si on continue dans cette logique, d’ici peu, il ne restera presque plus de fermes familiales au Québec — il se perd environ 10 fermes par semaine — et que quelques grosses entreprises agricoles spécialisées qui seront à la merci des marchés extérieurs!
Lors d'une épidémie, les frontières se referment rapidement comme ce fut le cas pour la maladie de la vache folle en Angleterre et au Canada, avec la fièvre aphteuse qui a touché plusieurs élevages en Europe ou si une pandémie de grippe aviaire menace. Il y a aussi la peur du bio-terrorisme qui a fait augmenter les normes de sécurité et les coûts reliés à l’exportation. Il y a de plus les fluctuations de notre dollar qui fragilisent notre compétitivité et la rentabilité de nos entreprises. Toutes ces conditions font que l’exportation agroalimentaire est un secteur de l’économie très fragile.
Visons l’autosuffisance alimentaire avant d’exporter
Si on veut préserver l’agriculture, il est impératif de diversifier nos productions et de faire en sorte que nos produits se retrouvent de nouveau dans nos supermarchés. À défaut de mettre des barrières tarifaires, si le Canada exigeait que les produits agricoles importés respectent les mêmes normes de production que les nôtres, la concurrence serait plus équitable et notre santé serait mieux protégée.
Ainsi les États-Unis sont très exigeants quant aux produits importés. La peur du terrorisme oblige! Cela ne nous empêche pas d’exporter chez eux : nous nous sommes pliés à leurs règles. Nous, on achète de toutes les provenances et aux meilleurs coûts. On ne se soucie pas ou peu de la qualité. Pourtant les méthodes de production sont bien différentes d’un pays à un autre. On a qu’à penser aux pesticides (ex. DDT en Chine ), aux médicaments, aux produits de conservation qui sont encore utilisés dans certains pays et bannis chez nous. Alors qu’on exige de nos agriculteurs des productions respectueuses de l’environnement, on ne se soucie pas de ce qui se fait ailleurs. Pourtant l’environnement est devenu une priorité à l’échelle planétaire. La mondialisation des marchés doit se faire dans un plus grand respect de la nature, c’est plus que jamais une question de survie .
On doit travailler à notre auto-suffisance alimentaire de concert avec le reste du Canada. Avant d’exporter nord-sud, nos gouvernements devraient favoriser, avec des programmes et politiques, les échanges est-ouest. C’est essentiel pour notre autonomie politique. Il faudra, pour revitaliser cette industrie, supporter les fermes familiales afin de préserver tout le savoir-faire issu de plusieurs générations. Aider les agriculteurs à reprendre le contrôle de leur production. Ramener dans les régions, les industries de transformation. Mieux informer les consommateurs sur ce qu’ils mangent. Promouvoir l’achat local, québécois et canadien.
Il y a beaucoup à faire et une urgence à le faire.
La force d’un pays réside dans sa capacité à se nourrir. Sinon nous deviendrons un pays du tiers-monde, dépendant des autres pour sa subsistance.
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Monique Gaudet, Bsc. Agr.
Rivière-du-Loup


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