Il y a 25 ans - Le coup de force de Trudeau

« L’Assemblée nationale réaffirme qu’elle n’a jamais adhéré à la Loi constitutionnelle de 1982, qui a eu pour effet de diminuer les pouvoirs et les droits du Québec sans le consentement du gouvernement québécois et de l’Assemblée nationale et que celle-ci est toujours inacceptable au Québec. » (2002)

17 avril 1982 - la Loi sur le Canada (rapatriement)


Il y a 25 ans entrait en vigueur, le 17 avril 1982, une importante modification de la constitution du Canada, la Loi constitutionnelle de 1982, qui a donné naissance à la Charte canadienne des droits et libertés. Cette charte a été imposée par Trudeau au Québec avec l'accord des neuf provinces anglophones. Trudeau a reconnu en 1986 « qu’à cette dernière étape il fallait presque un putsch, un coup de force » pour modifier la constitution canadienne.
La Charte canadienne avait entre autres pour but de contrer la Charte québécoise de la langue française au sujet de la langue d'enseignement. Michael Kirby, alors chargé du dossier constitutionnel, l'a reconnu par la suite, comme l'a écrit l'ancien conseiller de Trudeau, André Burelle : « Michael Kirby ne s'y trompait pas, la charte voulue par M. Trudeau visait bel et bien à neutraliser en priorité la Loi 101. Les droits linguistiques s'y trouvent en effet élevés au rang de droits fondamentaux des individus soustraits à la clause nonobstant, tandis que les autres droits de la personne, même les plus fondamentaux, y sont assujettis à la clause dérogatoire. » André Burelle avoue qu'à l'époque, lui-même «en arrive en gros à la même conclusion que Kirby».
Mais Trudeau n'a pas osé modifier la constitution canadienne sans l'accord de l'Ontario, ni assujettir cette province à l'article 133 imposant au Québec l'usage du français et de l'anglais au parlement provincial et devant les tribunaux. Il l'a avoué lors d'une entrevue au Devoir le 18 juin 1983 : « On me dit: "Mais pourquoi avez-vous imposé la clause sur l'éducation au Québec, et pourquoi n'avez-vous pas imposé l'article 133 à l'Ontario?" Pour une raison bien simple, c'est que je serais allé à Londres sans alliés et j'avais besoin au moins d'une ou de deux provinces. »
Le premier ministre du Québec, René Lévesque, a fait clairement savoir à Trudeau le point de vue du Québec dans une lettre rendue publique le 17 décembre 1982 : « Entente nocturne signée il y a un peu plus d'un an entre les gouvernements anglophones du Canada et le vôtre, […] le Canada Bill n'en demeure pas moins foncièrement illégitime, et par conséquent absolument inacceptable aux yeux du Québec, de son gouvernement et j'en suis convaincu, de l'immense majorité des Québécois. Il sera donc impossible pour tout gouvernement digne de ce nom au Québec d'accepter une telle réduction draconienne et unilatérale des pouvoirs de notre Assemblée nationale. »
Environ deux semaines plus tard, l'ancien directeur du Devoir, Claude Ryan, écrivait dans ce même journal à titre de député libéral à l'Assemblée nationale du Québec : « Il aura fallu qu'il ait à sa tête un premier ministre francophone issu du Québec pour que le gouvernement fédéral ose proposer, voire imposer contre la volonté formellement exprimée du Québec, la solution inacceptable que définit la Loi constitutionnelle de 1982. »
Le 17 avril 2002, à l’occasion du vingtième anniversaire du coup de force de Trudeau, les 106 députés présents à l’Assemblée nationale du Québec ont adopté à l’unanimité la motion suivante, proposée par le premier ministre Bernard Landry : « L’Assemblée nationale réaffirme qu’elle n’a jamais adhéré à la Loi constitutionnelle de 1982, qui a eu pour effet de diminuer les pouvoirs et les droits du Québec sans le consentement du gouvernement québécois et de l’Assemblée nationale et que celle-ci est toujours inacceptable au Québec. »
Souhaitons qu'une motion semblable soit adoptée de nouveau à l'unanimité à l’Assemblée nationale du Québec à l'occasion du vingt-cinquième anniversaire de l’entrée en vigueur de la modification unilatérale de la constitution du Canada par Trudeau en 1982.
François-Xavier Simard

Auteur du livre Le vrai visage de Pierre Elliott Trudeau (Les Intouchables, 2006)

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Auteur du livre {[Le vrai visage de Pierre Elliott Trudeau->http://qc.novopress.info/2860/le-vrai-visage-de-pierre-elliott-trudeau/]} (Les intouchables, 2006)

Originaire du Saguenay, François-Xavier Simard est docteur en médecine. Il est aussi titulaire d’un diplôme en sciences naturelles de l’Université de Paris et de certificats en anthropologie, en paléontologie et en génétique. Il a enseigné à la Faculté de médecine de l’Université Laval, puis il a travaillé à la Régie de l’assurance maladie et au ministère de la Santé du Québec. Il est aujourd’hui retraité.





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