Honorer les bâtisseurs

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L'amnésie collective






Je rentre de trois semaines de vacances en Angleterre, en Écosse et en Irlande.




Chaque fois que je suis en Europe, la même chose me frappe douloureusement : tout en préparant l’avenir de leur mieux, les autorités se soucient d’honorer le passé infiniment plus que nous.




Ces derniers jours, dans toutes les grandes villes que j’ai visitées — Londres, Liverpool, Édimbourg, Dublin —, je ne compte plus le nombre de plaques qui évoquent un événement qui serait survenu là, ou une personne importante qui aurait vécu à cet endroit.




Mémoire




On honore des hommes et des femmes politiques, des entrepreneurs, des scientifiques, des artistes, des gens qui ont fait la charité, etc.




Il y en a dans tous les domaines, de toutes les sensibilités, de toutes les époques.




Ce ne sont pas nécessairement des personnes célèbres qu’on honore.




On rappelle parfois qu’ici, un policier est tombé en faisant son devoir, qu’un scientifique qui vivait là est responsable d’une découverte importante, ou que telle chanson ou tel roman est l’œuvre d’un artiste qui habitait là.




Nous devrions faire pareil, mais nous ne le faisons pas, du moins pas suffisamment.




Nous avons certes eu la bonne idée de donner à plusieurs bibliothèques publiques des noms d’écrivains.




Mais il a fallu une collecte de fonds privés pour honorer comme il se doit, à New Carlisle, en Gaspésie, là où il est né, la mémoire de René Lévesque.




On trouve aussi en Europe infiniment plus de statues que chez nous.




Je ne prétends pas qu’il faille aller jusque-là.




Là-bas, les parcs et les ronds-points sont plus nombreux que chez nous et offrent plus de possibilités.




Les statues coûtent cher et le résultat peut être absolument désastreux, comme en témoigne l’abominable statue de René Lévesque devant l’Assemblée­­­ nationale à Québec.




De toute façon, en Europe, nombre de statues honorent des gens dont les réalisations furent modestes, mais qui avaient de riches amis prêts à financer l’opération.




La vieille Europe a certes plus d’histoire que nous, mais nous aussi comptons beaucoup de gens dont on pourrait honorer la contribution au Québec et au Canada.




Nous semblons pourtant nous limiter surtout à donner des noms d’ex-politiciens à des rues ou à des immeubles.




J’imagine aussi que les autorités européennes n’échappent pas à des controverses posthumes comme celle qui a entouré le cinéaste Claude Jutra.




Mais ce n’est pas une raison pour que nous en fassions si peu.




Je me souviens ?




Le contenu historique et mémoriel des célébrations du 375e anniversaire de Montréal, qui aurait été une superbe occasion pour commencer à corriger la situation, est très pauvre.




Un peuple qui sait d’où il vient et ce que certains de ses fils et certaines de ses filles ont accompli sera assurément plus fier et moins confus.




C’est d’autant plus cruellement ironique quand on considère la chose à la lumière de notre devise nationale.



 




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