Partira ? Partira pas ? Tous les yeux seront tournés vers Jean-Marc Fournier aujourd’hui.
C’est la reprise des travaux et le leader parlementaire du gouvernement a laissé entendre hier qu’il s’interroge sur son avenir politique à cause des suites de la déclaration d’Yves Francœur.
Il y avait quelque chose de déconcertant, voire d’attendrissant, à observer ce politicien, d’ordinaire si prompt à en découdre, soudainement lâcher ceci : « À un moment donné, tu te demandes à quoi ça sert, la politique. »
Comme si un chat de ruelle, vivant des rixes de toutes sortes depuis des lunes, s’arrêtait d’un trait et lançait : « C’est assez, toutes ces batailles, je me retire. »
Plutôt mauvais comédien habituellement, M. Fournier semblait cette fois sincère, touché au cœur par les allégations gravissimes du président de la Fraternité des policiers.
Se retirer, ne serait-ce que temporairement, n’est certainement pas son réflexe premier. Il l’a même dit hier : cela reviendrait à « donner raison, puis à déstabiliser le gouvernement ».
Mais aura-t-il le choix ?
Francœur et Bellemare
Disons-le : la déclaration d’Yves Francœur a quelque chose de bancal, ne contient que du ouï-dire mal ficelé.
Il y a des parentés entre celle-ci et le petit carton sur lequel Marc Bellemare avait pris des notes personnelles sur l’influence indue des collecteurs de fonds du PLQ. Bellemare avait été contraint par la commission Bastarache d’aller au front avec ce griffonnage.
La déclaration de Francœur est beaucoup plus formelle. L’auteur se drape dans les oripeaux du « lanceur d’alerte ». Mais outre qu’elle est écrite dans un français incorrect, elle est imprécise. Et contient une grave erreur de fait : on a manifestement confondu « Bachand » et « Béchard ». Un détail...
Malgré tout, les allégations qu’elle porte, au-delà des « deux noms », sont lourdes : Francœur affirme carrément ne pas faire confiance aux « institutions » comme l’UPAC et le DPCP « ou [à] certains de leurs dirigeants » !
Tout cela semble excessif.
Échos
Mais cette inquiétude relativement à une possible ingérence politique dans ces processus juridico-policiers rejoint plusieurs histoires depuis au moins cinq ans :
- Octobre 2015 : des enquêteurs de l’UPAC s’impatientent, écrit La Presse, car une demi-douzaine d’enquêtes sont bloquées au DPCP ;
- Le même mois, le DPCP est réorganisé, une des procureures importantes le quitte ;
- Sylvain Tremblay, policier à la retraite qui a dirigé l’enquête Diligence, déclare que l’on cherchait, pendant celle-ci, « à protéger le pouvoir ou des gens qui seraient peut-être près du pouvoir » ;
- En mars 2017, dans un document, des enquêteurs soutiennent que, lors d’écoute électronique, certaines conversations « avec les élus avaient été restreintes sous le principe de l’immunité diplomatique ».
En somme, il serait dommage qu’à cause de ses grands défauts la déclaration de Francœur nous fasse rater un nécessaire débat sur l’indépendance de nos organes juridico-policiers. Et nous prive d’un chat de gouttière haïssable, mais qui sait attendrir.
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