Revenu Québec s’est adressé à la Cour suprême pour empêcher la remise du contenu des ordinateurs de l’ancien argentier libéral Marc Bibeau, saisi lors d’une perquisition dans les locaux de son entreprise familiale en 2016.
En mai dernier, une juge de la Cour supérieure avait annulé les mandats de perquisition et ordonné qu’on remette tous les documents saisis aux firmes de l’ex-argentier libéral. Ce sont les avocats de M. Bibeau qui avaient contesté la perquisition.
La juge Claude Dallaire avait estimé que l’Agence du revenu avait été « négligente » en ne prenant pas suffisamment de précautions lors de la perquisition pour protéger le secret professionnel.
Même si Revenu Québec savait qu’un notaire et une avocate travaillaient dans les locaux de la firme sur le boulevard Arthur-Sauvé à Saint-Eustache, aucun représentant des ordres professionnels ne se trouvait sur place.
La demande d’appel de Revenu Québec a été rejetée en août, le juge parlant même d’une « dénonciation viciée » qui a été faite pour obtenir les mandats de perquisition.
La semaine dernière, l’Agence du revenu s’est résignée à utiliser son recours ultime en faisant une demande d’autorisation d’appel au plus haut tribunal du pays.
Dans la mire de l’UPAC
Le nom de Marc Bibeau est souvent revenu dans les médias au cours des dernières années. Il est au cœur de l’enquête Mâchurer de l’Unité permanente anticorruption (UPAC) sur le financement du Parti libéral du Québec.
La perquisition menée en août 2016 visait principalement les firmes Shockbeton et Saramac, toutes deux liées à M. Bibeau.
Les faits reprochés par Revenu Québec étaient sensiblement les mêmes que ceux d’une autre enquête de l’UPAC. On soupçonne les firmes d’avoir détourné des matériaux destinés au train de l’Est pour faire une terrasse à la luxueuse résidence de la sœur de M. Bibeau, Suzanne.
Opération secrète
Lors de la saisie, les policiers et agents de Revenu Québec ont fait des copies miroirs des ordinateurs portables de M. Bibeau. Des copies de l’ordinateur d’un notaire travaillant pour Shockbeton ainsi que de l’avocate Marie-Anne Tawill ont également été faites.
Celle-ci avait alors des mandats avec les entreprises de la famille Bibeau en plus de siéger au conseil d’administration d’Hydro-Québec.
L’UPAC avait profité de la perquisition de l’Agence du revenu pour mener une opération secrète.
Un dispositif permettant d’ouvrir les portes à distance et une carte d’accès auraient notamment été activés par les policiers. La carte au nom de Josette Coutu aurait toutefois été rapidement désactivée par des employés de l’entreprise.
Le volet fiscal de l’enquête sur les matériaux détournés chez la sœur de M. Bibeau risque d’être sérieusement compromis si l’ensemble des documents saisis doivent être retournés.
Ils sont présentement sous scellés en attendant de savoir si la Cour suprême entendra ou non l’appel de Revenu Québec.
On ignore toutefois leur impact sur les autres enquêtes de l’UPAC menées en collaboration avec Revenu Québec.
Ce n’est pas la première fois qu’une saisie visant les entreprises de Marc Bibeau se retrouve en Cour suprême. Lors d’une précédente perquisition effectuée en 2013, les avocats de la famille Bibeau avaient aussi invoqué le secret professionnel pour s’opposer à ce que les policiers consultent les documents saisis. Il a fallu trois ans de procédures avant que la Cour suprême décide de ne pas entendre l’appel placé par les avocats de Bibeau.
QUI EST MARC BIBEAU ?
- Décrit par plusieurs comme le grand argentier du Parti libéral du Québec lors du premier mandat de Jean Charest
- Visé par l’enquête Mâchurer de l’UPAC
- Il a organisé au moins sept somptueuses réceptions pour mettre en contact des ministres du gouvernement libéral et des gens d’affaires qui contribuaient à la caisse du parti
- Les locaux des entreprises de sa famille ont été perquisitionnés par l’UPAC une première fois en 2013
- Président et chef de la direction des Centres d’achats Beauward
- La Vérificatrice générale a fait l’étude des baux signés par Marc Bibeau avec la Société québécoise des infrastructures pour des locaux gouvernementaux