Faire passer Hydro aux mains de la Caisse de dépôt?

Le Québec économique

Texte publié dans Le Devoir du lundi 17 novembre 2008 sous le titre "Penser Hydro-Québec autrement"
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Depuis quelques années, plusieurs intervenants politiques et économiques proposent de privatiser partiellement ou complètement Hydro-Québec. Les promoteurs de la privatisation d'Hydro-Québec proviennent de tous les horizons politiques, du Parti québécois à l'Action démocratique du Québec, de membres de l'Institut économique de Montréal et, semble-t-il bientôt, de Jean-François Lisée.
Les promoteurs de la privatisation d'Hydro-Québec se heurtent à la non réceptivité de la population. Nous devons admettre que cette résistance s'appuie sur une affinité de sentiment envers ce joyau national, issu et construit par le travail de générations de Québécois. En plus d'être un symbole de fierté, les Québécois reconnaissent qu'Hydro-Québec a été et demeure un important levier de notre développement collectif.
Cette ferme volonté de conserver la propriété d'Hydro-Québec entre les mains des Québécois et au bénéfice de nos concitoyens témoigne d'une sagesse populaire de laquelle tous les théoriciens, politiciens et hommes d'affaires doivent tenir compte.
Toutefois, il est légitime de repenser la propriété d'Hydro-Québec afin que notre population optimise ses avoirs dans sa société d'État et dans son gouvernement. Ce dernier est aux prises avec un déficit de plus de 125 milliards de dollars qui vient gruger plus de 7 milliards de dollars annuellement au service de l'unique dette. Dans un même temps, nous avons une Caisse de dépôt et placement du Québec qui investit sur les marchés volatiles des places boursières mondiales, les économies de tous les Québécois afin de nous assurer une retraite bien méritée.
De manière progressive et ordonnée, il serait sans doute opportun que notre Caisse de dépôt et de placement du Québec, qui appartient à tous les Québécois, devienne l'actionnaire principal et unique d'Hydro-Québec. En devenant actionnaire d'Hydro-Québec, les Québécois resteraient propriétaires uniques et exclusifs de ce joyau national, tout en profitant des rendements présents et futurs que nous déciderions de nous verser en fonction de la fixation des prix et des rendements que nous désirons pour la Caisse de dépôt et de placement du Québec. Le prix de l'électricité pourrait être fixé selon des analyses actuarielles objectives, définissant les besoins financiers, à moyen et long terme, de la Caisse de dépôt et de placement du Québec, permettant à tous les Québécois de pouvoir profiter d'une retraite décente.
Extinction de la dette
L'acquisition d'Hydro-Québec par la CDPQ engendrerait le paiement complet de la dette du Québec ainsi qu'un fonds économique d'environ 15 milliards de dollars. Les rendements de ce fonds serviraient uniquement en périodes économiques difficiles.
Ce montage financier devrait avoir pour objectifs la volonté de maintenir le niveau de vie des nôtres, d'assurer le développement économique du Québec et d'augmenter l'offre de service en éducation et en santé. Pour ce faire, le transfert de propriété d'Hydro-Québec à la CDPQ permettrait au gouvernement du Québec d'injecter les 7 milliards de dollars d'économie annuelle, allant actuellement au service de la dette, pour soutenir les objectifs d'augmenter l'offre de service en éducation et en santé, d'assurer le développement économique du Québec et de pallier aux augmentations des coûts de l'électricité auprès des moins nantis de notre Société.
L'acquisition d'Hydro-Québec par notre CDPQ au coût du marché estimé sommairement à 140 milliards de dollars devrait se faire progressivement. Vous conviendrez qu'en ce moment, les actions en gestion de la CDPQ sont assurément aussi mal en point que les REER de chacun de nous. La méthodologie du transfert à la CDPQ devrait se réaliser en fonction de l'intérêt supérieur des Québécois et être définie lors d'une commission parlementaire élargie recueillant les commentaires des citoyens dans chacune des régions du Québec.
Rester Maître chez nous...
Cette proposition permettrait aux Québécois de «Rester Maître chez nous», de ce joyau national tout en nous libérant de cette dette de 125 milliards de dollars qui hypothèque nos personnes âgées, nos étudiants, nos familles, de services qu'ils méritent. Nous pouvons également imaginer l'effet de levier qu'occasionnerait le réinvestissement de l'argent investi à l'extérieur par le CDPQ (dans les aéroports britanniques et dans des complexes immobiliers étrangers, etc.) pour les injecter dans l'économie du Québec.
L'acquisition d'Hydro-Québec aurait des effets potentiellement négatifs. La Commission parlementaire devrait se pencher particulièrement sur ces effets afin de définir les stratégies pour contrer leurs répercussions. Parmi les possibilités, il y aurait une hausse appréhendée du prix de l'électricité et la forte concentration des actifs de la CDPQ dans un placement.
En ce qui concerne la concentration d'une partie des sommes en gestion du CDPQ dans Hydro-Québec, il faut comprendre que le monopole de l'électricité au Québec appartiendrait à chacun de nous via notre CDPQ. Par conséquent, le risque proviendrait de source alternative, tel l'éolien et à bon marché. Il serait souhaitable pour le bien de l'environnement et pour assurer la pérennité de nos investissements qu'Hydro-Québec continue d'avoir les monopoles du transport et de la production de l'énergie électrique au Québec et investisse directement dans les énergies alternatives environnementalement respectables.
Si nous comparons les avantages d'investir dans une entreprise monopolistique comme Hydro-Québec versus les marchés boursiers volatiles, il est assuré que nos fonds seront placés dans un investissement plus sécuritaire. Ainsi, notre position monopolistique nous permettrait de fixer un rendement moyen basé sur une analyse actuarielle objective concernant les besoins financiers de tous les Québécois pour assurer à chacun une retraite inégalée au Canada.
Aider les moins nantis
Pour l'augmentation des prix de l'électricité, elle affecterait particulièrement les moins nantis du Québec et dans une moindre mesure, les classes moyenne et supérieure. Le transfert de propriété à la CDPQ donnerait une marge de manoeuvre de 7 milliards de dollars au gouvernement du Québec. Cette marge de manoeuvre est assurément suffisante pour soutenir nos citoyens touchés par l'augmentation des tarifs.
La Commission parlementaire devrait également se pencher sur les effets de l'augmentation des prix de l'électricité sur les industries et la classe moyenne. Néanmoins, nous pouvons penser que le rendement exigé d'Hydro-Québec par une analyse actuarielle aurait des bénéfices directs sur les cotisations que nous versons à la CDPQ, tels notre Régime des Rentes et autres fonds gérés par la Caisse.
Cette proposition d'acquisition ordonnée d'Hydro-Québec par la CDPQ devrait générer des économies très importantes pour les Québécois, tout en assurant la pérennité de notre Caisse de dépôt et placement du Québec.
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YVES GOUDREAU, vice-président développement des affaires, Premier Tech ltée
L'auteur s'exprime à titre personnel. Il est aussi membre du CRE du Bas-St-Laurent et président du programme Accord du Bas-St-Laurent

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Membre du CRE du Bas-St-Laurent et président du programme Accord du Bas-St-Laurent





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