C'est reparti! La décision du gouvernement Charest d'enseigner l'anglais de manière intensive tout le long du second semestre de la sixième année du primaire suscite de vives réactions. [Le politologue Christian Dufour->35700] disait la semaine dernière y voir un accélérateur du processus de bilinguisation du Québec. Et [le sociologue Gérard Bouchard->35666] de répliquer hier dans nos pages qu'il serait «criminel» de tourner le dos à l'anglais.
Pris au premier degré, le qualificatif «criminel» est certes outrancier. Toutefois, Gérard Bouchard le premier insiste sur la prudence qui s'impose et la nécessité de trouver les justes équilibres pour à la fois s'ouvrir à la mondialisation et assurer la pérennité de notre identité.
Le problème ici est qu'il est impossible pour le moment de faire une juste analyse du projet Charest. Tout ce qu'on a est une intention inscrite dans un discours inaugural parmi plusieurs autres idées par un premier ministre en mal de popularité. Avant de s'alarmer, il faudrait connaître les objectifs du cursus du programme d'anglais langue seconde. Que vise-t-on? Faire des Québécois des bilingues à la fin de leur secondaire ou leur permettre d'acquérir une connaissance fonctionnelle de l'anglais?
Pour s'inspirer, Jean Charest devrait relire ce rapport oublié de la Commission des états généraux sur la situation et l'avenir de la langue française au Québec, le rapport Larose. Il y trouverait une démarche pédagogique bien structurée consistant au début du primaire en une «stratégie d'éveil aux langues étrangères, suivie au dernier cycle du primaire, au milieu et à la fin du secondaire d'un enseignement concentré de l'anglais avec création d'un environnement culturel et un nombre d'heures d'enseignement doublé». L'objectif: assurer une connaissance fonctionnelle de l'anglais.
La commission était venue à un consensus autour de cette formule en posant comme préalable l'assurance que «la langue française soit toujours la langue identitaire première, officielle et commune de la nation québécoise». Autrement, il lui semblait impossible de pouvoir débattre sereinement au Québec de l'enseignement de l'anglais langue seconde.
Le premier ministre Charest aurait été plus convaincant à cet égard si sa proposition sur l'enseignement de l'anglais s'était accompagnée d'un engagement à réintroduire les mesures de renforcement de la loi 101 contenues dans le projet de loi 103 sur les écoles passerelles, mais retirées au dernier moment et, apparemment, oubliées. On conviendrait plus facilement avec lui aujourd'hui qu'il n'y a «aucune opposition entre la pleine maîtrise du français et la connaissance d'une deuxième et d'une troisième langue» s'il y avait eu telle volonté de trouver de justes équilibres conciliant ces deux objectifs. Mais c'est là un réflexe que son gouvernement n'a pas.
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