Ecoles privées financées par les communes : un "dumping"

Écoles privées - subventions - frais - décrochage


L'Assemblée nationale a adopté une proposition de loi qui aménage le financement des écoles privées par les communes. Le SNUipp y voit un "avantage" pour le privé alors qu'on supprime des postes dans l’enseignement public.

Deux élèves posent encadrés par deux de leurs professeurs vêtus de toges de maîtres dans l'enceinte du Collège international catholique de Chavagnes-en-Paillers , en juin 2004. (AFP)
L'Union des familles laïques (Ufal) s'est élevée lundi 28 septembre contre l'adoption, par l'Assemblée nationale, d'une proposition de loi sur le financement des écoles privées. Le texte restreint l'obligation faite aux communes de financer la scolarité d'élèves résidant sur leur territoire, mais inscrits dans des écoles privées d'autres communes.
L'Ufal estime que ce n'est pas assez. Il ne faut pas "favoriser le dumping des écoles privées", estime l'association. Avec cette loi, "il s'agit en fait de renforcer le privilège exorbitant accordé par l'article 89 de la loi de 2004 aux écoles privées, au détriment des efforts de l’État et des communes pour étendre la présence des écoles publiques sur l’ensemble du territoire", écrit l'Ufal dans un communiqué.
"Cette parité accentue l’inégalité"
Pour sa part, le SNUipp dénonce la "parité de financement entre les écoles publiques et privées" créée par le texte. "Cette parité de financement accentue l’inégalité de traitement entre une école publique qui a vocation à accueillir tous les enfants et une école privée qui conserve la maîtrise de son recrutement et se voit octroyer une plus grande liberté de gestion", souligne le syndicat dans un communiqué. "Au lieu d’accorder des avantages à l’enseignement privé et de supprimer des postes dans l’enseignement public, l’Etat et le législateur devraient prioritairement intervenir dans une mission de péréquation et d’harmonisation entre les écoles publiques."
Des restrictions
La proposition de loi a été approuvée par l'UMP et le Nouveau centre, mais rejetée par le PS, le PRG et le PCF.
La nouvelle loi "garantit la parité de financement" entre écoles privées et publiques mais restreint l'obligation à quatre cas:
- absence de capacité d'accueil dans la commune d'origine,
- obligations professionnelles des parents,
- raisons médicales,
- frère ou soeur déjà scolarisés dans une autre commune.
Les litiges sont soumis au préfet qui devra statuer dans un délai de trois mois.
La majorité y voit un compromis
Le texte adopté lundi par le Parlement a pour origine un amendement, voté en 2004, qui avait rallumé la guerre scolaire. Cet amendement avait été introduit par Michel Charasse, à l'époque sénateur PS.
Pour le gouvernement, la proposition de loi est "le fruit d'un consensus" qui "apporte des solutions concrètes respectueuses de l'équité entre école publique et école privée", a déclaré Luc Chatel (Education nationale).
Pour Yvan Lachaud (NC), "apaisement est le mot qui caractérise ce compromis".
Seule voix discordante à l'UMP, Pierre Cardo a voté contre en regrettant que le maire de la commune concernée n'ait pas son mot à dire.
Une mesure "dangereuse pour notre pacte social"
Pour le PS, Michèle Delaunay a admis que "le texte Charasse était né d'un malentendu". Mais quand "nous avons proposé de le supprimer, vous avez opposé une fin de non-recevoir. Vous faites mine aujourd'hui de le supprimer mais vous en confirmez au contraire le principe, est-ce loyal?".
Le PS a demandé l'abrogation et non l'aménagement de la mesure "qui est excessivement coûteuse à terme et dangereuse pour notre pacte social".
En 2007, le PS avait lui-même déposé un texte pour abroger la "bêtise" de Michel Charasse, adoptée cependant à l'époque avec les voix des sénateurs PS et l'accord du gouvernement. La majorité l'avait rejeté.
"L'amendement Charasse avait été détourné", a dit Yves Durand (PS), jugeant que le nouveau texte n'allait "pas dans le sens de l'apaisement" mais au contraire "organisait l'exode scolaire".
"Pourquoi adopter un traitement égalitaire alors qu'il n'y a pas identité entre les systèmes publics et privés?", a demandé Jacques Dessalangre (PCF) pour lequel le gouvernement "organise un transfert de l'argent public vers le privé", qui risque "d'accentuer la fermeture d'écoles publiques".
Jean Glavany (PS) s'est dit "content" car "on a pris conscience du problème", mais "vous prenez prétexte de cette correction pour faire pencher le balancier" vers le privé.
Sylvia Pinel (PRG) a critiqué un texte qui "sanctuarise les inégalités".


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