Après le nombre de révélations-chocs des dernières années entourant le financement des écoles juives et la formation qui y est octroyée, comment peut-il encore subsister un protocole d'entente entre le Cégep Marie-Victorin et le Torah and Vocational Institute (TAV)? Comment le ministère de l'Éducation peut-il financer un enseignement qui, au nom de valeurs religieuses orthodoxes, commande la ségrégation, les garçons d'un côté et les filles de l'autre?
Impossible de ne pas s'interroger ainsi, et ce, malgré le fait que la ministre de l'Éducation, Michelle Courchesne, ait annoncé vendredi dernier que cette entente n'allait pas être reconduite. Madame a tranché: un cégep public ne peut «aller aussi loin dans l'acceptation de contraintes liées aux religions». Bien dit! Le gouvernement ne peut tolérer la remise en question de normes sociales sous prétexte de revendications religieuses.
La séparation des groupes d'étudiants en fonction du sexe; les enseignants soumis au même principe de ségrégation; une formation générale déficiente: tout cela a estomaqué la ministre. On s'interroge encore: comment ce cégep a-t-il pu reconduire sans relâche un accord truffé d'exigences aussi démesurées, heurtant de plein fouet le principe d'intégration cher au système d'éducation? Il n'était sans doute pas perdant, côté argent...
Indisposé par cette finale abrupte, le TAV réplique, comme il le fait en ces pages aujourd'hui: pour les juifs orthodoxes reclus, cet accord représentait le seul espoir d'accès à l'éducation. Le TAV invoque maladroitement le fait que ces étudiants seront désormais repoussés vers leurs ghettos! Faible argument: ces protocoles consacrent précisément la logique du refus de la mixité dans l'espace public et le maintien volontaire de structures en marge de la société.
Malgré le caractère inacceptable de ces accords, on peut concéder à la communauté une certaine déception, voire même une colère. Voilà plus de 20 ans que le gouvernement ferme les yeux, accepte sans mot dire, paie sans rechigner, et ce train-train deviendrait soudain intolérable? De leur point de vue, c'est incompréhensible.
Les hauts responsables du ministère de l'Éducation auraient pu informer Mme Courchesne de cet accord incongru bien avant. La ministre, au printemps, n'avait-elle pas justement enclenché un processus de non-tolérance pour les écoles privées juives délinquantes?
Quelle triste ironie! En mettant fin à ce régime d'exception, Québec renvoie le TAV à la possibilité d'instruire ses étudiants dans une école privée non subventionnée, précisément là où ont été observées et dénoncées récemment d'immenses lacunes. La ministre de l'Éducation exerce sur ce dossier une vigilance qui l'honore. Mais rien ne doit plus échapper à sa concentration.
*****
machouinard@ledevoir.com
Laissez un commentaire Votre adresse courriel ne sera pas publiée.
Veuillez vous connecter afin de laisser un commentaire.
Aucun commentaire trouvé