Discours à l’occasion de la réception du Grand Livre de Champlain

Québec 2008 - autour du 400e

Son Excellence la très honorable Michaëlle Jean
Discours à l’occasion de la réception du Grand Livre de Champlain
La Rochelle, le jeudi 8 mai 2008
SOUS RÉSERVE DE MODIFICATIONS
Permettez que je vous dise d’abord notre joie, à mon mari Jean-Daniel Lafond et à moi, de nous retrouver parmi vous en cette occasion à la fois festive et solennelle.
Festive, certes, car la bonne humeur des Rochelaises et des Rochelais est aujourd’hui contagieuse et nous avons l’impression d’être ici un peu chez nous, étant en quelque sorte des habitués de votre ville.
L’occasion est solennelle, aussi, car cette visite officielle que j’effectue en France à titre de gouverneur général du Canada a pour but de marquer la profondeur des liens de solidarité qui unissent nos deux pays.
Nous avons commencé à le faire ce matin, en ce jour du 8 mai, en participant à la cérémonie de commémoration du 63e anniversaire de l’Armistice, et j’ai été touchée que le président de la République prenne le temps de nous accompagner au cimetière de guerre canadien Bény-Reviers où sont enterrés des centaines de soldats canadiens morts en sol français en 39-45.
Nous étions ensemble contre la tyrannie et pour la liberté.
Et en cette année 2008, nous célébrons aussi le quatre centième anniversaire de la fondation de la ville de Québec le 3 juillet 1608 et de cette histoire commune qui fait de nous tous, des deux côtés de l’Atlantique, des sœurs et des frères de langue et de culture.
C’est en la personne de Samuel de Champlain que s’incarnent les efforts d’importants complices, à commencer par Pierre Dugua sieur de Mons, qui organise et finance l’aventure vers l’Amérique, en vue d’y fonder un poste français permanent au Canada, François Gravé, représentant du roi Henri IV, sans oublier Anadabijou, grand chef amérindien de la nation montagnaise.
Champlain, fils et petit-fils de capitaines, a connu très tôt l’envoûtement de la mer comme les autres garçons de Brouage. Il n’en était pas alors à son premier voyage vers les Indes occidentales, selon l’expression de l’époque.
Il avait déjà appareillé en 1599 pour l’Amérique espagnole où, pendant plus de deux ans, il avait visité les Antilles et la Nouvelle-Espagne.
Et, en 1603, Samuel de Champlain fait partie de l’expédition de Pierre Dugua pour établir la première colonie française sur l’île Sainte-Croix, en Acadie.
C’est une envie irrépressible de voir plus loin que le regard ne porte qui a ouvert les routes maritimes empruntées par les explorateurs de la trempe de Samuel de Champlain.
Lui-même parle de sa vocation précoce pour la carrière aventureuse de la navigation.
« C’est cet art, dit-il, qui m’a dès mon bas âge attiré à l’aimer, et qui m’a provoqué à m’exposer presque toute ma vie aux ondes impétueuses de l’océan ».
Cet esprit d’aventure, que manifeste superbement le parcours de Samuel de Champlain, est également celui que j’ai voulu saluer dans mon discours d’installation comme 27e gouverneur général du Canada.
Ce même esprit qui a poussé des femmes et des hommes à franchir l’océan et des peuples amérindiens à leur communiquer le génie d’un territoire démesuré inscrit notre histoire sous le signe de la rencontre.
Je me réjouis que les célébrations de ce quatre centième anniversaire soient pour nous l’occasion de réfléchir à l’enrichissement de ces rencontres.
Le Canada est ce qu’il est aujourd’hui parce qu’il n’a jamais cessé de miser sur les possibilités infinies de ces rencontres entre citoyens venus de tous les horizons pour participer à l’idéal d’une société pluraliste où chacune et chacun sont égaux en droits.
Sur ces routes maritimes, l’imagination a trouvé l’une de ses expressions les plus fortes.
Curieux de la topographie et des mœurs, de la flore et de la faune, Samuel de Champlain va à la rencontre de ce qui lui est inconnu pour enrichir le monde de ses découvertes.
N’ayant pu trouver lieu « plus commode, ni de mieux situé », selon son expression, il choisit Québec pour « habitation ».
Ce n’est pas le début de l’aventure française dans les Amériques, mais le point d’ancrage de son rayonnement dont nous avons la fierté.
Samuel de Champlain est pour nous tous l’incarnation et l’enracinement de ce sentiment de fierté.
Son aventure singulière a changé le cours de notre histoire, et tous les signes qui en attestent constituent une part précieuse du patrimoine de nos deux continents.
Et pour nous, des Amériques, l’une des parts les plus précieuses, oserais-je ajouter.
C’est donc avec beaucoup de fierté et d’émotion que j’accepte ce magnifique cadeau de La Rochelle, de Rochefort et de la communauté d’agglomération de Royan Atlantique au peuple canadien.
Ce Grand Livre de Champlain, que vous avez conçu à partir de ses notes, de ses gravures et de ses cartes, raconte à lui seul le pouvoir fabuleux des rencontres et la force tout aussi fabuleuse de cette histoire que nous avons en partage.
Des artistes contemporains ont redonné vie aux récits que l’explorateur consignait dans son journal, qu’il illustrait avec autant de verve.
Nous n’aurions pu imaginer plus belle façon de témoigner des liens de sang et de culture qui nous unissent, et grâce auxquels les voix de la francophonie dans le monde résonnent plus loin et plus fort.
Le Grand Livre de Champlain s’apprête à effectuer à son tour la grande traversée, alors que plusieurs bateaux sont aussi sur le point de partir sur les traces onduleuses de Samuel de Champlain.
Sachez que mon mari, Jean-Daniel Lafond, et moi-même avons tenu à ce que le Grand Livre trouve chez nous un lieu d’exposition à sa mesure.
L’une des premières fortifications du Régime français a été restaurée à cette fin, sur le site même de la résidence du gouverneur général du Canada à la Citadelle de Québec.
D’ouvrage défensif qu’elle était à ses origines, la Redoute du Cap-aux-Diamants servira désormais à accueillir des expositions, dont celle consacrée au Grand Livre de Champlain.
Nous espérons, Messieurs les Maires, votre venue prochaine à Québec pour inaugurer cette exposition.
Sachez que le peuple canadien vous remercie de tout cœur de votre geste d’amitié et de préserver d’une façon aussi magistrale des liens qui nous sont si chers.
À vous rassemblés ici, de même qu’à toutes les citoyennes et qu’à tous les citoyens des villes de La Rochelle, de Rochefort et de la communauté d’agglomération Royan Atlantique, j’aimerais exprimer toute la gratitude de la ville de Québec, du tout Québec et du peuple canadien.
Merci, mille fois merci!


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