Aurons-nous le courage de faire aboutir certaines démarches? Pour le moment, le brasse-camarade autour de l’effervescence du mouvement souverainiste-indépendantiste achève de refroidir certaines ardeurs. Nous avons conscience, en prenant compte de l’insignifiance du statut du paysage médiatique actuel, que les dés sont actuellement pipés en ce qui nous concerne collectivement. Qu’il s’agisse de monarchie, de régime constitutionnel ou encore de silence radio sur l’état de la cause collective québécoise, nous nous contentons de « sparages » en guise de bandelettes de l’état de notre nation.
Il sera bien vain de prétendre connaître l’avenir de nos confusions actuelles. Qu’importe, il nous faut prendre conscience qu’actuellement, nous sommes des expatriés de notre condition. Nous appartenons bien sûr à notre contrée de toujours, le Québec. Il serait bien présomptueux de nier qu’en regard de l’état de nos luttes politiques, nous avons été maintenus – en tant qu’indépendantistes – comme des étrangers ne partageant point la même langue.
En tant qu’étudiant, je suis actuellement un expatrié de la politique active. Je ne conçois point que les politiciens et les affairistes aient à définir des paramètres qui nous rendraient encore plus étrangers à notre milieu. Quand je vois Françoise David déclarer ceci à la presse :
« Finalement, si l’on veut que les professionnels-les issus des universités redonnent à la société ce qu’elle leur a apporté par l’accès à l’instruction, modifions les niveaux d’imposition et demandons un effort additionnel aux contribuables les plus riches. Voilà où doit résider la contribution des étudiants-es au financement de leurs études. »
Dans la même lancée, elle réitère son appui en faveur de la gratuité scolaire. Je suis personnellement exaspéré par les prépositions contradictoires à la base de ce discours. Souvenons-nous, les « think-tanks » de droite militent périodiquement et sciemment pour des frais de scolarité qui seraient modulés en fonction du revenu à la sortie des bancs d’école. Dans la même foulée, le PQ préconisait un sommet pour étudier la question. Pourquoi, plutôt que de redonner la voix aux premiers concernés, nous nous contentons d’intimider et pratiquer le profilage des mouvements étudiants eu égard à certaines velléités gouvernementales? Les politiciens sont payés – lorsque la situation s’applique – pour prendre des décisions, encore faudrait-il que ces décisions prennent le pouls du mouvement étudiant et tirent une réelle légitimité qui colle aux besoins du milieu. Pour le moment, c’est « payez d’abord, posez les questions ensuite pis encore, taisez-vous ».
Parenthèse sur mon parcours scolaire
Une première fois, j’ai été diplômé en 2008 en vertu d’un baccalauréat en Communication et Politique à l’Université de Montréal. Le chemin pour y parvenir fut long et périlleux. Ayant franchi sans encombres les niveaux du primaire et du secondaire, j’ai tergiversé au cégep durant cinq ans. À l’origine, je devais compléter un diplôme de niveau pré-universitaire en sciences humaines, volet administration. J’ai persisté un an. Comme ça ne rimait à rien pour moi, j’ai perdu de vue l’objectif lointain de fréquenter les bancs de l’université. J’entrepris alors une session en informatique et je finis par bifurquer en techniques d’éducation spécialisée durant deux ans et demi. Comme ces disciplines collaient peu à mes dispositions d’écrivain engagé développées dans certaines publications en cours de route, je finis par prendre conscience de mes motivations universitaires. Je reprends alors la voie des sciences humaines de manière à concrétiser ce que j’avais laissé en chemin. Je termine alors mon diplôme pré-universitaire et en viens à entreprendre ces études universitaires qui étaient plutôt inespérées. Finalement, quatre ans et demi après mon admission au baccalauréat bi-disciplinaire de Communication et Politique et après une première pause d’une session, je termine cette première scolarité universitaire.
Certaines vocations se révèlent longtemps après plusieurs chemins empruntés. Trois prises de conscience majeures sont intervenues au cours de mon parcours. La première phase de cette prise de conscience s’est révélée au moment de mes premiers écrits et à la conjonction d’un premier cours suivi sur la sociologie de la société québécoise alors que j’étudiais en éducation spécialisée. La deuxième phase est survenue au moment de mon entrée à l’UQAM. J'y suivis deux cours lors d'une première session en tant qu’étudiant libre alors que je terminais ma dernière session au cégep. Il était notamment question d’un cours portant sur les partis politiques. En outre, une fois rendu à l’Université de Montréal, j’étais partagé quant à mon envie de poursuivre le cours universitaire. Entretemps, je rompis avec ma première compagne et je fus éventuellement amené à expérimenter les prépositions contradictoires de l’ Option Sourde au cours de l’été 2005, quête qui fut entreprise dans mes pérégrinations au sein du milieu de la défense des droits de la condition sourde et tout au long de plusieurs méditations sur la vie politique québécoise. Je prenais alors conscience d’une réelle impasse dans les conditions en cours, sans nécessairement trouver les mots pour décrire avec moult détails cette même impasse. La troisième prise de conscience fut cette décision longuement mûrie qui m’amena sur le chemin du retour des études universitaires à l’hiver 2009. Déjà, Option Sourde m’avait permis d’envisager certaines dispositions à l’action politique mais également, je fus amené sur le sentier de la littérature. Si impasse il y avait déjà en 2005, l’intermède boisclairien au PQ achevait de me convaincre du bien-fondé d’une retraite stratégique.
Sur le plan des publications jusqu’à ce jour, je ne revendique qu’une pluralité de chroniques disséminées dans certaines publications et revues mineures. Je n’ai point encore franchi le cadre d’une publication dans une maison d’édition, pas plus que je ne puis dire que j’ai entrepris un chantier d’écriture si ce n’est celui de Vigile.net. Longtemps tiraillé entre l’envie d’écrire un essai, une biographie ou un roman, je reviens inévitablement à la plausibilité de cette première forme d’écriture pour entreprendre cette vocation d’écrivain politique. À l’automne, j’entreprendrai deux cours portant sur l’essai comme forme d’écriture. Je ne puis dire que j’aie une vocation de politicien au sens conventionnel du terme, pas plus que je soie totalement au sein de ma contrée dans le pays de la littérature. Chose certaine, la condition étudiante et le syndicalisme en général sont deux lieux de méditation actuels qui finissent par me rapprocher de la politique.
Nul politicien sourd ne s’est illustré au Québec. Je tiens à spécifier que Caroline Saint-Hilaire est sourde d’une oreille, mairesse de Longueuil et qu’elle maîtrise certains rudiments de la Langue des signes québécoise. Il est important de faire une distinction entre l’état physique de la surdité, l’appartenance au monde sourd et/ou entendant, et l’appropriation pleine et entière de la culture sourde. Pour le moment, seul Gary Malkowski, Sourd ontarien, fut détenteur d’un titre de député au sein du gouvernement NPD provincial Bob Rae de 1990 à 1995. Ce fut le premier d’une courte liste de politiciens sourds qui se sont illustrés aux quatre coins du monde.
Au regard d’une perspective globale et historique, la politique de représentation représente un défi colossal pour le commun des mortels. Imaginez alors cette perspective pour une personne sourde qui maîtrise en priorité la Langue des signes de la localité. Signer n’est point écrire et cette distinction apparaît d’autant plus dans un contexte littéraire alors que les langues auditives cernent si peu la subtilité et la richesse qu’une langue signée transmet à quiconque en comprend la portée. Dans cette perspective, nous en revenons inévitablement aux termes d’une conjonction des luttes politiques. Comme étudiant sourd, je maintiens que l’état des choses est à l’aube d’une révolution nécessaire.
Révolutions politiques à venir
Dérives politiciennes
Conditions d'un étudiant sourd québécois
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