Réplique

Consensus au Québec

Déséquilibre fiscal


Monsieur Pratte,
[Contrairement à ce que vous écrivez,->2215] le rapport Séguin sur le déséquilibre fiscal n'est pas aujourd'hui dépassé.
Rappelons d'abord que la commission Séguin avait évalué en 2002 que la part des dépenses sociales des provinces (santé, éducation et assistance sociale) financée par des transferts fédéraux était insuffisante. De plus, le rapport de la Commission mentionnait que la formule de péréquation devait être revue pour inclure tous les revenus des 10 provinces.
Vous évaluez sur la base des résultats de 2005-2006 que le manque à gagner pour le Québec au niveau des transferts fédéraux est maintenant de 500 millions de dollars. Or, pour arriver à ce résultat, vous utilisez des sommes non récurrentes qui ne peuvent aucunement être considérées pour les prochaines années. Cela devrait normalement vous amener à recalculer ce manque à gagner à environ un milliard de dollars. De là, il n'y a qu'un pas à franchir pour conclure que la revendication de 1,1 milliard de dollars du gouvernement du Québec pour les transferts sociaux est tout à fait justifiée et cela fait d'ailleurs consensus au Québec.
Cela n'est qu'une première étape, car les dépenses de santé à moyen et à long termes augmenteront considérablement compte tenu des impacts du vieillissement de la population, des nouveaux médicaments et des nouvelles technologies. Il y a encore des discussions à poursuivre.
Au titre de la péréquation, vous affirmez qu'Ottawa et les provinces négocient sur la base de la recommandation du rapport O'Brien, c'est-à-dire l'inclusion de seulement 50% des revenus de l'exploitation des ressources naturelles. Le gouvernement du Québec a témoigné à la commission O'Brien et a indiqué clairement que la position traditionnelle du Québec était maintenue, à savoir l'inclusion de 100% de tous les revenus. Le rapport du Conseil de la fédération déposé le 30 mars dernier évaluait que l'inclusion de 100% de tous les revenus représenterait 2,8 milliards de dollars de plus pour le Québec seulement.
Voici d'ailleurs la déclaration complète du ministre des Finances, Michel Audet, à ce sujet, le 12 avril dernier, à l'Assemblée nationale:
"Ce que nous propose le comité du conseil, c'est véritablement que la formule de péréquation joue son plein rôle, et effectivement ça amènerait, si le gouvernement fédéral en a les ressources de le faire à court terme, des transferts de 2,8 milliards de plus par année, au Québec, pour la péréquation et environ un milliard de plus pour le transfert à l'enseignement postsecondaire. C'est ce que nous avons demandé et c'est ce que nous allons discuter dans les prochains mois. "
Par conséquent, on ne peut sûrement pas conclure aujourd'hui que le problème du déséquilibre fiscal est réglé. Le gouvernement du Québec doit maintenir la barre à 3,9 milliards de dollars, négocier des transferts de champs fiscaux, encadrer le pouvoir fédéral de dépenser et exiger un règlement rapide pour enfin investir dans les priorités québécoises.
PIERRE PAQUETTE ET FRANÇOIS LEGAULT
Les auteurs sont respectivement porte parole du Bloc québécois et du Parti québécois en matière de Finances. Ils répliquent ici à l'éditorial d'André Pratte, intitulé "Oubliez le rapport Séguin! ", publié vendredi dernier.
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Le 6/49 du déséquilibre fiscal
Messieurs,
Vous me reprochez d'avoir inclus, dans mes estimations des transferts fédéraux, des montants non récurrents. Je n'ai fait que reprendre les données qui m'ont été fournies par les ministères fédéral et québécois des Finances. J'ai supposé que ces gens-là savaient compter.
Au-delà des technicalités, ce qui compte, c'est le montant total que verse le gouvernement fédéral aux provinces et l'évolution de cette somme au fil des années. Or, les transferts du fédéral pour les programmes sociaux du Québec ont augmenté de 4,8 à 7,3 milliards entre la publication du rapport Séguin et aujourd'hui. Une hausse de 2,5 milliards, ou 52 %. Un changement d'une telle envergure rend évidemment caducs les calculs de la commission Séguin.
Vous dites qu'il y a consensus au Québec pour obtenir d'Ottawa des milliards supplémentaires. Un tel consensus ne veut strictement rien dire. Si vous demandiez aux Québécois s'ils souhaitent gagner le gros lot au 6/49, il y aurait aussi consensus.
Je comprends mal que vous citiez à nouveau le comité d'experts du Conseil de la fédération en appui à votre revendication relative à la péréquation. Le coprésident du comité, l'économiste Robert Gagné, n'a-t-il pas qualifié cette interprétation du rapport de " manipulation " ?
Vous soulignez que les dépenses de santé augmentent rapidement et que, par conséquent, " les discussions doivent se poursuivre ". Vous savez fort bien qu'en vertu de l'entente signée par Ottawa et les provinces en 2004, le Transfert canadien en santé augmentera de 6 % par année pendant dix ans, soit la croissance prévue des dépenses de santé.
Dans mon éditorial, je montre que si la principale recommandation de la commission Séguin avait été adoptée, soit la fin des transferts fédéraux pour les programmes sociaux en échange de l'occupation par les provinces du champ fiscal de la TPS, le gouvernement du Québec subirait aujourd'hui un manque à gagner de plusieurs centaines de millions. Je suis étonné que vous n'abordiez pas cette question, d'autant que le chef du Parti québécois, André Boisclair, a fait sienne cette idée pas plus tard qu'en septembre. Vous auriez pu nous expliquer comment un gouvernement du Parti québécois comblerait un tel gouffre fiscal.
André Pratte

Éditorialiste en chef


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