Caisse: le législateur ne parle pas pour ne rien dire

Dans ce cas, le message était on ne peut plus clair et il disait à la Caisse de dépôt de faire du rendement sa priorité. Dans ce cas-ci, la responsabilité du gouvernement est on ne peut plus claire. Et le rapport de cause à effet est on ne peut plus direct.

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Il y a un principe de droit parlementaire qui dit que « le législateur ne parle pas pour ne rien dire ». C'est un corollaire du principe qui veut que « nul n'est censé ignorer la loi ». En résumé, ça signifie que lorsque le Parlement prend le temps de passer une loi, cela est important, nul ne peut l'ignorer et chacun doit se comporter en conséquence.

Dans la débâcle de la Caisse de dépôt et placement, le gouvernement Charest essaie de minimiser l'importance de la loi qu'il a fait adopter en 2004 pour préciser le mandat de la Caisse.

Le rendement avant tout

La loi 78 déclarait que, désormais, l'objectif de la Caisse était de rechercher « le rendement optimal du capital des déposants [...] tout en contribuant au développement économique du Québec ». Autrefois, la loi ne précisait tout simplement pas le mandat de l'institution.

Quand on parlait du mandat de la Caisse, on se référait généralement au discours du premier ministre Jean Lesage, au moment de l'adoption de la loi créant la Caisse. Dans ce discours, Jean Lesage parlait d'une double mission, soit d'obtenir le meilleur rendement, tout en favorisant le développement économique du Québec.

Cette référence aux débats parlementaires de l'époque est importante. Les tribunaux le font d'ailleurs régulièrement pour trouver ce qui était l'intention du législateur. Ses intentions sont importantes, précisément parce qu'il ne parle pas pour ne rien dire.

Or, actuellement, le gouvernement Charest voudrait occulter le fait qu'en adoptant une loi qui précisait le mandat de la Caisse, il envoyait un message très clair et précis à la Caisse, à son président, à son conseil d'administration et à ses employés. Le message, c'était de rechercher le rendement optimal avant tout autre objectif.

Pour s'en convaincre, il suffit de retourner aux débats de l'Assemblée nationale à l'époque de l'adoption de la loi 78.

L'intention du législateur

Le ton général des débats — très courts, parce que la loi a été adoptée sous le bâillon en décembre 2004 — est que même si la Caisse maintient son double mandat de faire fructifier les sommes qui lui sont confiées et de contribuer au développement économique du Québec, la première mission doit désormais prendre le pas sur la seconde.

Le gouvernement avait même rejeté un amendement du PQ qui prévoyait de mettre ces deux missions sur le même pied, précisément pour que l'objectif d'optimisation du capital des déposants soit prépondérant.

Le ministre des Finances de l'époque, Yves Séguin, avait affirmé en commission parlementaire que « la Caisse souhaite avoir une clarification de sa mission à l'effet qu'elle soit et qu'elle devienne d'abord et avant tout un gestionnaire, et que sa première préoccupation soit de recevoir les argents, les dépôts, de bien les gérer, de bien les administrer pour optimiser le rendement ».

Quand on lit l'ensemble des débats, on voit que l'intention du législateur est on ne peut plus claire. Il veut que le rendement optimal devienne la préoccupation première de la Caisse.

Il est donc bien difficile de prétendre, comme le fait le gouvernement Charest depuis mercredi, qu'il n'est qu'une sorte d'observateur dans le dossier de la Caisse et qu'il ne porte aucune responsabilité quant au mandat de celle-ci.

Le législateur ne parle pas pour ne rien dire. Quand il adopte une loi — comme ça a été le cas en 2004 —, il envoie toujours un message qu'on ne peut ignorer. Dans ce cas, le message était on ne peut plus clair et il disait à la Caisse de dépôt de faire du rendement sa priorité.

Dans ce cas-ci, la responsabilité du gouvernement est on ne peut plus claire. Et le rapport de cause à effet est on ne peut plus direct.


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