Le budget 2009-10 présenté hier par Monique Jérôme-Forget se résume à un exercice comptable périlleux causé par la récession, mais aussi par les mauvaises décisions passées du gouvernement Charest. Sans plan de relance digne de ce nom et malgré la promesse rose bonbon d'un retour à l'équilibre budgétaire d'ici cinq ans, tout laisse croire que nous voilà repartis pour des années d'enfer en matière de politiques publiques.
Comme prévu, les conséquences de la récession sur l'état des finances publiques sont non seulement très graves, mais elles le resteront pendant bien plus longtemps que les cinq années prévues par la loi antidéficit dont le gouvernement doit suspendre l'application. Ainsi, malgré l'introduction de nouvelles mesures telles l'augmentation de la TVQ et l'indexation de tous les tarifs à partir de 2011, la ministre des Finances prévient qu'il faudra trouver rien de moins que 8,4 milliards de dollars supplémentaires d'ici cinq ans pour revenir à l'équilibre. Où trouver cet argent? On n'en sait vraiment rien. Aussi bien admettre que la mission est impossible, surtout lorsqu'on constate que ces chiffres découlent de prévisions de croissance économique beaucoup trop optimistes.
C'est dire que la dette du Québec pourrait grimper de 42 % à près de 50 % du PIB en quelques années seulement malgré le maintien des contributions annuelles au Fonds des générations, dont l'existence n'a pourtant plus que valeur de symbole.
Cette perspective très négative est sans doute la plus mauvaise nouvelle de ce budget. Non pas pour 2009 puisque le déficit de quatre milliards permettra d'éviter de devoir sabrer en santé et en éducation, les deux missions qui accaparent la plus grande partie du budget. Mais à moyen terme, ce sera terrible puisque l'explosion du service de la dette ajoutée aux efforts de compression des dépenses généreront des tensions sociales et une détérioration de la qualité des services à la population.
En attendant, le budget 2009-10 prévoit une croissance de 5,7 % des dépenses en santé et de 3,5 % en éducation. C'est beaucoup plus que l'inflation et désormais, la santé accapare plus de 44 % de toutes les dépenses du gouvernement provincial. Malgré cela, on ne peut pas s'attendre à une amélioration des services puisque l'essentiel ira aux dépenses courantes, notamment aux médicaments et aux médecins à qui Québec a consenti d'importantes augmentations. De nouvelles négociations étant prévues l'an prochain avec l'ensemble de la fonction publique et avec les médecins, il sera difficile d'éviter la confrontation.
Ce budget devait être le grand exercice de relance économique d'un gouvernement fraîchement réélu: il n'en est rien. Quelques centaines de millions tout au plus sont ajoutés à ce qui avait déjà été annoncé pour venir en aide aux entreprises et aux régions. Compte tenu de l'urgence de stimuler la consommation des ménages, on aurait au moins pu s'attendre à un autre milliard, non récurrent, de dépenses fiscales, par exemple sous la forme d'une bonification du crédit TVQ que reçoivent les Québécois à revenus modestes. Or, pour fouetter la consommation, Québec s'en remet uniquement à son programme d'infrastructures.
On l'a déjà dit, un gouvernement provincial comme celui du Québec n'a pas la marge de manoeuvre suffisante pour agir de façon déterminante sur la croissance. Région exportatrice qui ne contrôle pas sa politique monétaire et dont les finances publiques sont dans un état de crise chronique, le Québec ne peut intervenir qu'au moyen de la fiscalité et de ses projets d'infrastructure. Si les milliards prévus à ce dernier chapitre sont à inscrire dans la colonne positive au bilan du gouvernement Charest, la décision de réduire les impôts d'un milliard l'an dernier et celle de ne pas occuper l'espace fiscal laissé vacant par la baisse de la TPS fédérale se révèlent aujourd'hui dramatiques, et surtout, porteuses d'une crise encore pire pour l'avenir.
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j-rsansfacon@ledevoir.ca
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