Budget 2015-2016 : qu’en est-il de l’équité entre les générations ?

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L’équité? Les Libéraux ne connaissent pas

C’est sous l’angle de l’équité entre les générations que nous avons abordé le budget présenté ce jeudi par le ministre des Finances, Carlos Leitão.
Comme promis, le gouvernement livre un budget équilibré, ce que nous saluons. Cependant, il faut jeter un œil avisé sur les éléments clés qui ont permis au gouvernement d’atteindre son objectif : un contrôle extrêmement rigoureux de l’augmentation des dépenses de l’État et une conjoncture économique favorable.
Le deuxième budget Leitão vise une croissance des dépenses de 2,0 % en moyenne par année pour les cinq prochaines années, ce qui est nettement moins élevé que la croissance observée historiquement. Alors que la croissance du PIB nominal prévue devrait être de plus de 3% par année en moyenne, le contrôle rigoureux des dépenses auquel nous convie le gouvernement se traduira en fait par une diminution de la taille de l’État.
Le gouvernement vise, pour 2015-2016, une croissance des dépenses en santé de seulement 1,4 %, et de 0,2 % en éducation. Le ministère de la Famille subira une baisse substantielle de 3 % de son budget.
Dans un contexte où le vieillissement de la population entraînera une diminution de la population active et une pression accrue sur le système de santé, il y a lieu de croire que ce contrôle aura des répercussions négatives sur les services à la population et sur le filet social.
Le gouvernement contrôlera ces dépenses par des réformes structurelles (comme le projet de loi 10 en santé), ainsi que par le contrôle très rigoureux de la croissance des salaires et des effectifs dans la fonction publique. Ce sont donc les employés de l’État qui en feront largement les frais, sans qu’on puisse mesurer l’effet sur l’économie de la limitation des salaires et des emplois d’un si important bassin de travailleurs de la classe moyenne.
La conjoncture économique offre un coup de pouce substantiel au gouvernement dans l’atteinte de l’équilibre budgétaire. La croissance économique s’accélère, soutenue par la faiblesse du dollar et la baisse des prix du pétrole. Un milliard de dollars sont d’ailleurs tombés du ciel depuis décembre 2014 : 592 millions de dollars de réduction du service de la dette, 195 millions de dollars en augmentation de la péréquation et 205 millions de dollars d’augmentation des revenus due à une croissance économique plus importante que prévue.
Si ce contexte est favorable à la restriction des dépenses que nous propose le gouvernement, nous sommes d’avis qu’il l’est aussi pour la recherche de nouveaux revenus — comme une augmentation de la TVQ — et pour une prévision à long terme de l’évolution des finances publiques, en tenant compte d’un cycle économique complet.
Plus tôt cette semaine, le ministre Leitão a déclaré qu’à son avis, les valeurs — plutôt que les structures et les programmes — devraient être le legs des générations précédentes à préserver. Au contraire, nous sommes d’avis que les infrastructures et les services publics représentent une partie importante de ce legs.
L’équité entre les générations ne se réduit pas à la saine gestion des finances publiques. Elle se traduit aussi par l’équité dans l’accès aux services publics et au soutien de l’État, et dans l’égalité des chances entre les générations, comme au sein de chacune de celles-ci.
Si la tendance est à l’accélération de la croissance économique, il faut saisir cette occasion pour mettre le filet social et les services publics qui sont au cœur du modèle québécois à l’abri du ralentissement à venir, lequel sera accentué par le vieillissement de la population.
Dans une perspective d’équité intergénérationnelle, le gouvernement fait donc ses devoirs à moitié. S’il livre un budget équilibré, il n’offre pas pour autant une perspective rassurante sur l’ensemble du cycle économique.
De plus, le contrôle des dépenses imposé en Santé — et, surtout, en Éducation — fragilisera, probablement de manière durable, les services publics, alors que le contexte démographique les rend plus importants que jamais.
Les auteurs, Alexis Gagné et Isabelle Fontaine, font tous deux partie de l’équipe fondatrice de l’Institut des générations.


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