Le nouveau ministre de la Santé, Yves Bolduc - Le débat sur la place du secteur privé en santé pourrait occuper une bonne partie de 2009 alors que le gouvernement se met en mode écoute. C'est du moins ce que décodent les grandes centrales syndicales de la décision du gouvernement de Jean Charest de suspendre les derniers gestes politiques faits par Philippe Couillard avant que ce dernier ne se joigne à Persistance Capital Partners (PCP).
Le gouvernement de Jean Charest vient de reporter l'entrée en vigueur du règlement controversé permettant l'expansion des cliniques privées.
C'est l'ancien ministre de la Santé Philippe Couillard qui a permis l'adoption le 18 juin 2008 de deux décrets, l'un réduisant le coût du permis d'exploitation d'une clinique privée appelée centre médical spécialisé, et l'autre établissant la liste d'une cinquantaine de «traitements médicaux» qui pourront y être dispensés. Le geste de M. Couillard avait soulevé de très nombreuses critiques puisque le jour même, il remettait sa démission. Deux mois plus tard, il annonçait qu'il poursuivait sa carrière chez PCP, qui chapeaute les cliniques privées Medisys.
Ce règlement devait entrer en vigueur lundi dernier, mais à la mi-décembre, le gouvernement nouvellement réélu a corrigé le tir et a reporté l'application de ces dispositions réglementaires au 30 septembre prochain. La publication du décret dans la Gazette officielle du 30 décembre le confirme.
Au cabinet du ministre de la Santé, Yves Bolduc, on expliquait hier la situation par des raisons purement techniques. Le règlement ne pouvait pas être mis en application puisque des précisions législatives n'ont pas pu être adoptées à cause de la tenue des élections générales. Un projet de loi est en rédaction et devrait être soumis à l'Assemblée nationale dans les prochains mois.
«Ça n'a rien à voir avec un désistement de notre part», a assuré l'attachée de presse du ministre Bolduc, Marie-Ève Bédard. «On continue dans notre volonté d'encadrer le travail des cliniques privées. [...] Il restait certaines zones d'ombre, notamment pour les modalités d'obtention des permis», a-t-elle ajouté.
La Confédération des syndicats nationaux (CSN) et la Fédération des travailleurs du Québec (FTQ) font une autre lecture de la décision du gouvernement. Les deux centrales l'ont accueillie avec d'autant plus de plaisir qu'elles ont déposé au début de décembre un recours devant la Cour supérieure afin de faire invalider le règlement sur les cliniques médicales spécialisées.
«Le gouvernement se met à l'écoute. J'ai parlé au ministre Bolduc et il a clairement indiqué qu'il ne cherche pas à élargir la pratique médicale privée», a soutenu la présidente de la CSN, Claudette Carbonneau. Cette dernière voit dans «cette suspension» de neuf mois «un espace permettant au gouvernement de consolider le système public de santé, en accord avec son discours».
À la FTQ, le président, Michel Arsenault, abonde dans ce sens, se disant content de l'attitude du gouvernement Charest. «Il va y avoir des discussions d'ici septembre. On a toujours dit qu'il y avait place à l'amélioration du système public de santé, mais pour ça, il faut qu'il reste en place», a-t-il affirmé.
Tant pour M. Arsenault que pour Mme Carbonneau, la voie pavée par l'ancien ministre Couillard en faveur du secteur privé vient d'être ralentie. Du coup, l'ouverture à un système de santé à deux vitesses, qui permet la mise en place d'un marché de l'assurance privée, sera débattu, se réjouissent-ils.
Bolduc court-circuite Couillard
L'adoption du règlement sur l'expansion des cliniques privées est reportée d'au moins neuf mois
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