1982 et le PLQ - Comme le Labrador

Le déni ferait-il partie de l'ADN du PLQ ?

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Un « fruit jamais mûr »

Le déni, qui était une habitude bien ancrée au Parti libéral du Québec (PLQ), semble maintenant avoir carrément été inséré dans son ADN. On l’aura constaté lors du deuxième débat de la course à la direction de ce parti, dimanche.
Quel déni ? Que les fondements de cette fédération sont viciés. Une fois de plus dimanche, une « vérité libérale » est sortie de la bouche de Pierre Moreau : « Il n’y a pas d’impact pratique à ne pas avoir signé la Constitution », a répété à deux reprises celui qui est pourtant juriste. Pourquoi, alors, l’ancien chef de ce parti Robert Bourassa a-t-il passé le plus clair de son temps, de 1985 à 1992, à vouloir corriger ce contrat fondamental ? Pourquoi le PLQ a-t-il adopté le rapport Pelletier en 2001 ? Il faudrait que M. Moreau nous l’explique.
Détrompons-nous : les « impacts pratiques » de ce texte imposé au Québec sont légion : la Constitution de 1982 a centralisé le Canada, donné un poids sans précédent aux juges sélectionnés et nommés par Ottawa. Ce sont eux qui tranchent en matière de partage des pouvoirs entre les provinces et l’État central. (Comme si une équipe de hockey nommait les arbitres de la partie qu’elle dispute.) Cette Constitution a inscrit dans le texte fondamental une détestation de la notion même d’une nation québécoise. C’est au surplus un document pratiquement non modifiable tant sa formule d’amendement est immuable (ce que dénonce de manière étoffée le chef par intérim du PLQ, Jean-Marc Fournier… dans un excellent mémoire de maîtrise).
L’effet « corrosif » (pour reprendre un mot du politologue Guy Laforest) de 1982 sur l’identité québécoise, sur l’État du Québec, se constate quotidiennement. L’esprit de cette Constitution semble même avoir pénétré la pensée de MM. Moreau et Couillard. La semaine dernière, ce dernier a exprimé une vision très multiculturaliste du Québec, soutenant qu’il fallait « faire attention à la tentation de la majorité francophone, qui est nous, d’imposer sa vision aux autres communautés ». Dimanche, il est allé plus loin encore en rejetant la proposition de Raymond Bachand, soit de formuler quatre « demandes » précises à l’endroit du fédéral (investissements en infrastructures et dans le Nord, entre autres). Fonctionner ainsi, ce serait se « prendre au jeu du PQ », a rétorqué M. Couillard ! Sous la houlette de l’ancien ministre de la Santé, le PLQ serait donc inconditionnellement canadien - davantage peut-être que sous Jean Charest -, car il renoncerait même à faire semblant de réclamer quoi que ce soit au gouvernement central, auquel les Québécois versent la moitié de leurs impôts.
Au PLQ, avec les années, la critique de 1982 s’est muée en une sorte de vieux grief repris sans conviction ni espoir de victoire. Un « fruit jamais mûr » pour un combat ; on dirait l’antique dossier des frontières du Labrador. Le PLQ s’est affaissé par peur de la revendication, qu’il confond avec la « chicane ». Mais aussi, et surtout, par l’appât du pouvoir, qu’il estime à portée de main.
Dans les années 1990, l’habitude du déni l’a conduit à escamoter une réelle réflexion sur l’échec fédéraliste des années Meech-Charlottetown. En 2013, il refuse de se pencher sur sa dernière défaite. Il précipite le choix d’un nouveau chef. Certains sont mal à l’aise, comme l’un des derniers réels fédéralistes québécois (les autres étant « canadians ») du PLQ, l’ancien ministre Benoît Pelletier : « Quand un parti politique tient pour acquis que le pouvoir lui est dû, que le pouvoir va lui tomber dessus comme si c’était naturel, ce parti-là normalement commet de graves erreurs. » L’establishment actuel du plus ancien parti québécois saura-t-il comprendre l’enjeu ? On peut en douter.


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