Y a-t-il un gouvernement à Québec?

Chronique de Patrice Boileau

Lamentable. Le Parti libéral qui forme le gouvernement à Québec offre présentement un spectacle de désolation plus navrant que jamais. Alors que des dossiers importants commandent des mesures courageuses, l’administration Charest sombre dans le jovialisme.
Le dépôt du budget le 13 mars dernier, par la ministre des Finances, Monique Jérôme Forget, montre que le Québec n’est absolument pas prêt à affronter la tourmente économique qui se dessine aux États-Unis. Au lieu de rapatrier les deux points de pourcentage retranchés par Ottawa à sa taxe de vente sur les produits et services (TPS), le gouvernement Charest a préféré sombrer dans une rhétorique conservatrice pour dissimuler son manque de courage. Deux milliards de dollars de revenus supplémentaires ont ainsi échappé aux coffres de Québec. Les consommateurs québécois n’y auraient pourtant vu aucune différence, eux qui sont habitués de payer 15% de taxe à la consommation. Comment peut-on ainsi parler de hausse de leur fardeau fiscal, comme l’a prétendu le premier ministre Jean Charest ? Quelle occasion manquée de renflouer les finances publiques du Québec!
Que dire également de cette baisse d’impôt de 700 millions allouée à même l’arrangement financier de 3.9 milliards consenti par le gouvernement fédéral en 2007! Des années de luttes dénonçant le déséquilibre fiscal imposé par l’État canadien envers le Québec ont ainsi été ruinées. L’électoralisme déplorable de PLQ a terni l’image de la nation québécoise qui, impuissante, a vu dernièrement ses transferts fiscaux au gouvernement conservateur de Stephen Harper retourner dans les poches des contribuables. Ainsi dilapidés, ces milliards accordés en baisse d’impôt ont dorénavant rendu Ottawa vulnérable face à une récession qui débute. Pour la première fois depuis 1999, le gouvernement canadien pourrait ainsi renouer dès l’année prochaine avec les déficits budgétaires, si la croissance économique devait continuer de ralentir. Une incompétence qui rappelle celle qui est observée à Québec!
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Le dossier de la protection de la langue française n’est guère plus reluisant. La ministre de la Culture et des Communications, Christine St-Pierre, affiche un laxisme qui reflète parfaitement celui qui habite son très fédéraliste patron. Le gouvernement Charest se moque de données alarmantes dévoilées récemment par l’Office de la langue française, elle-même affaiblie par une directrice enthousiaste devant la folklorisation des siens. Rien ne sera fait pour ragaillardir la loi 101 par le Parti libéral qui doit évidemment ménager sa clientèle électorale non-francophone.
Qui s’étonnera ainsi de constater la même inertie chez Michelle Courchesne, sa collègue à la tête du ministère de l’Éducation, des Sports et des loisirs ? La pauvre s’est contentée d’exprimer son inquiétude face à l’utilisation de fonds publics par la Quebec English School Boards Association, qui participe aux côtés de parents anglophones à l’invalidation de la loi 104. L’élimination de cette législation par les tribunaux permettrait à nouveau à nombre d’enfants d’aboutir dans le réseau public des écoles anglophones du Québec, après avoir fréquenté pendant un an des établissements d’éducation privés semblables non-subventionnés. Il ne faudra donc pas s’attendre à ce qu’elle intervienne énergiquement pour modifier une entente de coopération datant de 1978 entre la France et le Québec : voir de plus en plus de Français profiter de tarifs réduits pour étudier dans les universités anglophones du Québec ne l’émeut guère en effet. Voilà qui mousse de belle façon le rayonnement de la francophonie à travers le monde.
Le gouvernement de Jean Charest n’a que faire du caractère français du Québec. Idem pour sa culture et son histoire. Les célébrations qui doivent souligner le 400e anniversaire de la fondation de la ville de Québec passent inaperçues sur la surface du globe. Il s’agit pourtant d’un événement majeur puisqu’il souligne l’existence d’un peuple de langue française qui résiste toujours dans l’Amérique du Nord anglophone. Pas le moindre discours de fierté nationale n'a été prononcé par l’État québécois. Le silence qui y est observé révèle une tension politique qu’il ne faut pas aggraver. Car une trop grande promotion de l’événement entraînerait la promotion de l’identité québécoise et non canadienne. Voilà qui pourrait accroître les appuis envers le projet indépendantiste, au grand dam du gouvernement fédéral.
Petites mesures, petites paroles et petit courage collent bien à un gouvernement de minus, heureux de diriger une minorité. Ceux qui leur font face à l’Assemblée nationale n’ont guère plus d’envergure : aveuglés par la soif du pouvoir, ils n’offrent que des demi-mesures qui ne donnent pas le goût aux Québécois de se lever.
Patrice Boileau


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4 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    31 mars 2008

    Nous devons nous serrer les coudes, nous regrouper. Tous les souverainistes sans exception ensemble unis pour une fois...Nous rassembler, lutter ensemble, cesser de nous diviser. Cesser de nous accuser mutuellement de tous les torts. Nous savons que nous partageons toutes, tous un seul et m
    ême objectif peu importe la manière dont nous le formulons. Il n'y a pas parmi nous de meilleurs ou de moins bons souverainistes. Nous sommes toutes et tous du même bord. Cessons donc de nous tirailler et tâchons donc de contribuer chacun à notre façon, notre rythme et selon nos compétences à la réalisation du Québec libre. Apprenons à être patients oui patients envers ceux et celles qui ne font pas exactement comme nous le souhaiterions. Au lieu de les démolir sur la place publique comme des chacals, exprimons leur notre point de vue de façon constructive dans le but de progresser vers notre objectif commun. Cessons de nous croire meilleurs ou plus brillants que les autres à l'intérieur de la maison québécoise. Nous sommes une grande famille convaincus du bien-fondé de notre démarche vers l'affranchissement alors unissons nous pour une fois. Il ne peut y avoir d'autre façon de réussir le miracle de notre libération car la volonté du peuple est la seule qui compte et qui l'emporte. Si nos adversaires semblent vaincre en ce moment c'est principalement dû au fait que nous donnons l'image d'une famille divisée.Nous pouvons changer cela si nous le voulons.

  • Élie Presseault Répondre

    31 mars 2008

    Je me trompe peut-être, mais rien n'est encourageant pour les souverainistes en ce moment. Charest monte, lentement mais sûrement. Je suis sûr qu'il sera réélu pour un troisième mandat si Pauline Marois ne renverse pas la vapeur. Quant à Dumont, il serait ridicule de le négliger. Ce politicien a toujours été un opportuniste et frappait fort quand ça comptait... Pauline Marois peut fort bien jouer de prudence sur le plan constitutionnel, mais elle est en train de perdre les plus grand-e-s indépendantistes du parti. Tant et aussi longtemps qu'on louvoie sur le plan de pays... même si on courtiste les autonomistes, faut donner de la viande autour de l'os aux indépendantistes qui ont toujours été le gros des appuis du PQ.
    Si Charest y va pour une élection à l'automne 2008 ou hiver 2009, ce sera difficile pour le PQ et l'ADQ, à moins qu'ils forcent le tempo. Par exemple, si le Bloc Québécois mord la poussière aux prochaines élections, cela pourrait inciter certains nationalistes à voter pour la caution souverainiste. Mais compter sur un calcul électoral n'a jamais donné du tonus et de l'enthousiasme à former un pays réel et rêvé.

  • Archives de Vigile Répondre

    26 mars 2008

    Je suis personnellement d'avis que le problème que nous avons n'est pas la force de Jean Charest mais la faiblesse de l'opposition, majoritaire en nombre mais minoritaire dans sa tête, ce qui l'empêche de se coaliser efficacement comme le dit mon prédécesseur ici.
    Mais qu'est-ce qu'attend le PQ de merde pour brasser la cabane ? D'après moi la cheffe est trop prise par ses cours d'anglais. Elle n'a plus de disponibilité et elle ne voit pas bien ce qui se passe autour... Dire qu'on reprochait à Boisclair sa présence fantômatique sur la place publique. More of the same ?

  • Archives de Vigile Répondre

    26 mars 2008

    Vous avez probablement raison mais M. Charest est mieux entouré depuis quelques mois de conseillers efficaces. Avec tous ses derniers mouvements qui le font monter dans les sondages, il devrait être en mesure de gagner encore la prochaine élection pour un troisième mandat et, peut-être, majoritairement.
    Si le PQ et l'ADQ continuent de se discréditer l'un l'autre à la place de tenter des coalitions sur une plate-forme constitutionnelle ou une fusion au centre, ils sont partis pour planter à la prochaine élection avec les petits partis encore dans la cave sans député d'élus. C'est une vision, pas un désir.
    M. Charest va continuer de marteler : L'ouverture du nord de la province, l'ouverture sur le France et l'ouverture sur le ROC pour les échanges de professions et de travailleurs. Ses adversaires auraient tort de le sous-estimer parce qu'il ménage la chèvre et le choux fort habilement...dernièrement, principalement avec sa dame de fer Mme Jérôme-Forget.