Une très mauvaise idée

Le Québec et la crise



Le chef de l'opposition, Pauline Marois, exige que le gouvernement Charest s'engage dans un gel «tous azimuts» des tarifs des organismes gouvernementaux et particulièrement ceux de l'électricité, pour ne pas accabler les Québécois pendant la récession.
«Pourquoi le premier ministre ne soulagerait pas les citoyens qui sont aux prises avec des difficultés en période de crise économique?», demandait-elle. L'idée peut sembler généreuse et attrayante, mais elle est en fait très simpliste. C'est une très mauvaise façon de combattre une récession. Plus particulièrement dans le cas du gel qui retiendra l'attention, celui du gel des tarifs d'électricité, une promesse électorale péquiste. L'idée est vraiment mauvaise, pour quatre raisons.

Premièrement, si on veut soulager des gens qui ont des difficultés, comme le dit Mme Marois, il faut s'occuper des gens qui ont des problèmes. Même si la récession ébranle tout le monde, la majorité des Québécois garderont leur emploi et leur salaire, et n'ont pas besoin d'être «soulagés». Dans le combat contre la récession, le devoir de l'État n'est pas de dilapider des ressources pour faire plaisir à des millions de clients d'Hydro-Québec, mais de concentrer les efforts pour venir en aide aux victimes et protéger ceux qui sont menacés, comme les chômeurs ou les travailleurs vulnérables.
Deuxièmement, parce qu'il y a eu de nombreux débats sur les tarifs d'électricité, nous savons que le gel est une mesure régressive, qui profite davantage aux gros consommateurs d'électricité, en général plus riches. À éviter.
Troisièmement, un tarif d'électricité n'est pas un impôt, mais plutôt un prix pour un service. Mais, au plan macroéconomique, un gel aura un effet similaire à une baisse générale d'impôts, en mettant plus d'argent dans les poches des consommateurs.
On sort d'un débat à ce sujet au niveau fédéral. Tous les économistes ont dénoncé les baisses générales d'impôt du gouvernement Harper, parce que c'est inefficace. Pour contrer les effets d'une récession, l'État doit injecter des fonds dans l'économie pour stimuler la demande et relancer l'activité. Bien souvent, les dollars des baisses d'impôt seront épargnés au lieu d'être consommés, et n'auront ainsi aucun impact sur la reprise.
Les seules baisses acceptables sont celles qui sont ciblées pour des contribuables dans le besoin, qui ont besoin d'aide et qui dépenseront l'argent. Le même raisonnement vaut pour les tarifs.
Quatrièmement, un autre grand principe qui doit présider aux outils de lutte à la récession: les mesures doivent être temporaires pour ne pas grever indéfiniment les finances publiques. Un gel des tarifs n'est pas temporaire, il est récurrent. Pour qu'un gel soit acceptable, il faut prévoir un rattrapage dès le départ, c'est-à-dire annoncer maintenant des hausses plus salées pour plus tard.
Il y a un cinquième point. Mme Marois a commis une erreur conceptuelle en mettant tous les tarifs dans le même sac. Dans le cas de hausses de prix naturelles, soumises à des processus de contrôle, comme l'électricité, les choses devraient suivre leur cours normal. Dans le cas de tarifs qui servent à équilibrer une caisse, comme l'assurance médicaments ou la SAAQ, le gouvernement pourrait retarder des hausses, par choix, si l'on prévoit un mécanisme de rattrapage.
Mais il y a des hausses de tarifs à bannir. Et ce sont celles qui serviraient à réduire le déficit. Le Québec, comme le disait le rapport Montmarquette, a du rattrapage à faire. Mais ce n'est vraiment pas le moment. Cela aurait le même effet qu'une hausse des impôts, cela irait dans le sens contraire à une stimulation de l'économie et cela empirerait les choses. Nous sommes dans une période où le gouvernement doit avoir une seule priorité, soutenir l'activité économique et lutter contre la récession.


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