Le conseil d'un village palestinien ainsi que son chef, ont déposé une poursuite en dommages de deux millions de dollars à la Cour supérieure du Québec, hier, contre deux sociétés montréalaises qui ont construit des maisons pour des colons juifs dans ce village. La poursuite s'accompagne d'une demande d'injonction.
Le chef et le conseil municipal de Bil'in, situé dans les territoires occupés par Israël en Cisjordanie, accusent les compagnies Green Park International et Green Mount International et leur directeur commun, Annette Laroche, d'avoir commis un crime de guerre avec ces constructions.
Il a été impossible de parler à Mme Laroche, qui se trouve hors du pays, ou à d'autres représentants des entreprises. C'est la deuxième fois, cette semaine, que la Cour supérieure du Québec est saisie de conflits entre Israël et ses opposants.
Village de 1700 habitants
Lundi, des citoyens canadiens vivant en Israël ont déposé une poursuite en dommages contre la Lebanese Canadian Bank, qui a un bureau de représentation à la Place Ville-Marie, parce que cette banque aurait permis au Hezbollah d'effectuer des transactions financières pendant sa guerre avec Israël pendant l'été 2006.
Bil'in est un village de 1700 personnes situé au nord-ouest de Ramallah. Il fait partie de la Cisjordanie, un territoire palestinien occupé par l'État d'Israël depuis 1967. Le conseil municipal et son chef, Ahmed Issa Abdallah Yassin, affirment que la Green Park et la Green Mount ont agi dans les faits comme «des agents d'Israël».
Les entreprises nommées «ont illégalement construit des immeubles résidentiels et d'autres édifices et ont vendu des appartements à la population civile de l'État d'Israël, créant ainsi une nouvelle colonie sur les terres du village de Bil'in», allègue la requête. Ce faisant, les entreprises ont aidé l'État d'Israël à commettre un acte illégal, ajoutent les demandeurs.
«En contravention avec les lois internationales, l'État d'Israël a pris possession d'une partie des terres du village et l'a remise à un autre conseil local créé par l'État afin d'y construire des colonies israéliennes. Les défendeurs (la Green Park et la Green Mount) sont complices d'une action illégale.
«Le but de cette action est de transférer la population civile d'Israël dans le village et d'expulser la population (palestinienne) du village de ses terres Les activités illégales des défendeurs ont privé le village et ses résidents de l'usage de leur terre, affectant gravement les sources de revenus provenant des activités agricoles qui pouvaient s'y réaliser auparavant.»
Convention de Genève
La poursuite cite plusieurs lois internationales et canadiennes, notamment la convention de Genève qui stipule qu'une «puissance d'occupation ne peut déporter ou transférer une partie de sa propre population civile dans un territoire qu'elle occupe». Elle cite aussi la Charte des droits et libertés du Québec, selon laquelle «toute personne a droit à la jouissance paisible et à la libre disposition de ses biens».
Le conseil et le maire de Bil'in estiment qu'il est inutile de s'adresser à un tribunal israélien pour obtenir justice, la Cour suprême d'Israël refusant de considérer que les territoires palestiniens sont occupés de façon illégale par Israël.
Ils demandent donc à la Cour supérieure du Québec de déclarer que les constructions de la Green Park et de la Green Mount violent la Convention de Genève, la Loi canadienne sur les crimes contre l'humanité et les crimes de guerre, la Charte québécoise des droits et libertés et le Code civil du Québec.
Ils réclament une injonction permanente interdisant aux deux sociétés de poursuivre leurs activités dans le village ainsi qu'un ordre de démolition des bâtiments déjà construits, plus des dommages de 2 millions de dollars.
Un village de Palestine poursuit deux entrepreneurs québécois
Québec - Palestine - Israël
André Noël30 articles
André Noël a étudié en géographie à l'Université de Montréal et en journalisme à Strasbourg. Après avoir été rédacteur à la Presse canadienne, il est entré à La Presse en 1984. Il a toujours travaillé dans la section des informations générales, où il a men...
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André Noël a étudié en géographie à l'Université de Montréal et en journalisme à Strasbourg. Après avoir été rédacteur à la Presse canadienne, il est entré à La Presse en 1984. Il a toujours travaillé dans la section des informations générales, où il a mené des enquêtes très variées.
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