Vous pouvez être rassurés. Le gouvernement du Québec ne profitera pas de la baisse de 1% de la TPS, promise par le gouvernement Harper, pour augmenter sa propre TVQ d'autant. Le premier ministre Jean Charest a juré que ce n'était pas son intention, tandis que les deux partis de l'opposition dénoncent l'idée avec tellement de véhémence qu'on suppose qu'ils ne le feraient pas, eux non plus.
Et pourtant, quand on se met à y penser, une activité qui ne semble pas être très à la mode à l'Assemblée nationale, on découvre que ce serait une excellente idée. Une façon simple, souple et élégante de réduire le déséquilibre fiscal.
Au Québec, à peu près tout le monde, à l'exception de Stéphane Dion, s'entend sur l'existence d'un déséquilibre fiscal, que l'on peut définir d'une façon neutre, comme la nécessité de définir un nouveau partage des ressources entre Ottawa et les provinces pour permettre à celles-ci de s'acquitter de leurs obligations.
Une façon simple de le corriger, c'est que le gouvernement fédéral taxe moins, et engrange ainsi moins de surplus, et que les provinces occupent le champ fiscal ainsi délaissé. C'est encore mieux si elles le font de leur propre initiative, en fonction de leurs besoins, sans avoir à négocier.
Si le gouvernement Harper baisse sa TPS de 6 à 5%, comme il l'a promis, le Québec, en augmentant sa TVQ d'autant, récolterait 1,1 milliard, ce qui constitue un déplacement important de ressources d'Ottawa vers Québec. Un geste qui s'inscrit dans la logique de la commission Séguin. Et cette idée indigne le PQ qui se plaint que l'argent est à Ottawa et qui a inventé le concept de déséquilibre fiscal, et enrage l'ADQ qui se dit autonomiste. Essayez d'y comprendre quelque chose.
Leur indignation est d'autant plus étonnante que rien ne permet de croire que le gouvernement Charest y songe, bien au contraire. Il y a un an, quand la TPS est passée de 7 à 6%, le ministre des Finances d'alors, Michel Audet, a rejeté catégoriquement l'idée d'une récupération. Pas question pour lui de «confisquer» la TPS. Le gouvernement Charest, de façon très claire, ne veut pas ouvrir cette porte-là, à moins que ce soit dans le cadre d'un règlement formel sur le déséquilibre fiscal.
Et c'est très exactement ce qu'a répété la nouvelle ministre des Finances, Monique Jérôme-Forget, lors de débats à la Commission permanente des Finances: «Le déséquilibre fiscal, c'est pas sorcier, c'est une tarte. Si le fédéral souhaite que le transfert se fasse en comptant, je vais prendre l'argent. Si le fédéral dit: on va vous donner des points d'impôts', je vais être très heureuse. Et si le fédéral dit: moi je règle le déséquilibre fiscal en baissant la TPS', je n'exclus pas l'idée de considérer la TVQ.»
C'est une position mollassonne. Québec acceptera de récupérer une baisse de la TPS en augmentant sa TVQ uniquement si Ottawa lui donne ce point de taxes. Si c'est une offre formelle d'Ottawa, c'est O.K. Mais pas question de prendre l'initiative. Pourquoi donc Québec veut-il ainsi avoir la permission du fédéral? Par manque de courage politique. Le gouvernement Charest ne veut pas porter l'odieux d'augmenter la TVQ et croit sans doute que s'il y a une entente avec le gouvernement central, ce serait perçu dans la population comme un transfert plutôt que comme une hausse de taxes, même si ça revient exactement au même.
Mais ce qui est encore plus étonnant, c'est la tournure loufoque qu'a prise le débat à l'Assemblée nationale. D'abord, parce que rien dans les propos de Mme Jérôme-Forget ne permettait au critique financier du PQ, François Legault, ou à celui de l'ADQ, Gilles Taillon, d'affirmer que la ministre libérale songeait à augmenter la TVQ. Ensuite, parce que ces deux parlementaires indignés, par un délicieux hasard de la vie, sont justement deux hommes qui se sont faits les défenseurs de cette récupération de la TPS. François Legault en a fait une campagne personnelle jusqu'à ce qu'il soit rabroué par son chef André Boisclair. Et Gilles Taillon la recommandait quand il dirigeait le Conseil du patronat. Et maintenant, son chef, Mario Dumont, affirme à tort que le gouvernement prendrait d'une main ce qu'il a donné de l'autre aux classes moyennes, quand en fait il s'agit de prendre dans les coffres d'Ottawa pour remplir ceux de Québec.
D'autant plus que la baisse de la TPS souhaitée par M. Harper est une mauvaise politique fiscale parce que tous les économistes estiment au contraire qu'un déplacement du fardeau fiscal de l'impôt sur le revenu vers les taxes à la consommation est souhaitable. Mais ça, c'est trop compliqué pour une Assemblée nationale transformée en CPE.
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