Trudeau et les francos

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Le Canada est un pays anglophone


S’il est vrai que la nature des gens se révèle en temps de crise, les francophones du pays devront apprendre à se méfier de Justin Trudeau. 


De nombreux francos s’attendaient à un recul du premier ministre, cette semaine. Ou, à tout le moins, à une forme d’excuses, après des décisions controversées rendues par Santé Canada.   


Ils n’ont obtenu ni un ni l’autre.  


Au contraire, Justin Trudeau a laissé entendre que les droits linguistiques, la santé et la sécurité des quelque 8 millions de francophones du pays passent après ceux des anglophones. 


Un dangereux précédent 


Au début de la semaine, Santé Canada a annoncé que des produits nettoyants pouvaient maintenant être importés sans étiquette bilingue.  


Pareille directive est en vigueur depuis le mois dernier concernant les antiseptiques et désinfectants. On retrouve donc déjà des produits toxiques sur nos tablettes sans mode d’emploi ou mises en garde en français. Et il y en aura de plus en plus. 


Il semble qu’en temps de pandémie, les francophones sont des citoyens de seconde zone. 


La décision de Santé Canada a soulevé un tollé, particulièrement à l’extérieur du Québec. 


Pour le sénateur acadien René Cormier, « rien ne justifie le non-respect de nos deux langues officielles ». « C’est un enjeu de santé et de sécurité publique », a-t-il réagi sur les réseaux sociaux.  


On craint notamment un effet de pente glissante. Les explications du premier ministre n’ont, à ce chapitre, rien de rassurant.  


« On espère qu’on n’aura pas à faire d’autres exemptions [...] Mais on est dans une situation où la main-d’œuvre et la capacité logistique ne sont pas toujours présentes dans nos compagnies, dans nos importations », a justifié Justin Trudeau mardi. 


Traduction : c’est dommage, mais c’est la vie. Et il faudra que les francophones s’y fassent durant la pandémie. 


En anglais, SVP 


La crise de la COVID-19 n’a pas été tendre envers la langue de Molière. Le français y est malmené un peu partout, d’Ottawa à Toronto en passant par Fredericton.  


Les journalistes, pour obtenir de vraies réponses, sont souvent forcés de s’adresser à leur interlocuteur en anglais.  


À Ottawa, la chef de la santé publique, Theresa Tam, est unilingue. Idem pour la ministre de la Santé, Patty Hajdu. Ces dernières sont souvent flanquées de francophones de service qui ne possèdent ni les mêmes connaissances ni la même autorité. 


La directive de Santé Canada va plus loin. Trop loin même, aux yeux de certains libéraux, qui redoutent un ressac au Québec, au moment où les sondages leur sont favorables.  


L’enjeu a d’ailleurs rattrapé le gouvernement hier à la période des questions. Le Bloc québécois et le Nouveau Parti démocratique n’allaient pas rater pareille occasion de se porter à la défense des francos. 


Les libéraux seraient sages d’en prendre bonne note.




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