Trace de la nation québécoise

Avons-nous mal mesuré le déphasage combiné du Bloc et du Parti Québécois?

Chronique d'Élie Presseault

Il est de ces jours où le destin d’une nation suit certains chemins sinueux. D’aucuns s’écrient alors : « Fondons un nouveau parti », « prenons le pas d’une démarche indépendantiste des plus résolues » et « au contraire, ne changeons point de tactiques ». Avant même d’envisager quelque avenue que ce soit, anticipons les convergences possibles. Avons-nous les véhicules qui servent une cause commune? Aurons-nous à envisager l’éventualité d’une coalition inter-partite? Est-il nécessaire d’avoir des députés résolument indépendantistes pour servir le cadre d’un droit de parole à renforcer?
L’implosion appréhendée du PQ a fait s’accélérer une crise pourtant déjà envisagée. Depuis 1984, nous naviguons de crise en crise au gré des tentatives de renouvellement du pacte confédératif sous l’assentiment d’un parti dit souverainiste. Plus que jamais, nous prenons la mesure de la prémisse « Indépendance ou assimilation ». Le premier ressaisissement viendra inéluctablement du peuple québécois. Maintes fois, il a prouvé qu’il pouvait tirer parti d’une adversité pour relever le défi de la nécessité du changement, d’où qu’il vienne.
Notre cher premier ministre ne veut point tirer sa révérence? Fort bien. Notre chef de parti souverainiste ne serait pas plus partant à hausser la mise ? Heu… Participer à une manifestation contre les gaz de schiste, ça engage à quoi? Quelles sont les voies d’action d’une gouvernance dite souverainiste à l’égard d’une politique des énergies alternatives? N’était ce pas vrai qu’un gouvernement Marois soutiendrait les efforts d’une éventuelle industrie du gaz de schiste, même mieux encadrés? Ces quelques points en suspension témoignent d’un silence éloquent quant à la représentation de notre nation. Nous devons cependant dire que Patrick Bourgeois avait accordé sa bénédiction à la gestion du dossier du gaz de schiste par Pauline le 5 février dernier.
Depuis le 2 mai – parlerons-nous d’un archétype du 18 juin ou du 4 septembre dans ce cas-ci? –, les sirènes du renouvellement d’un certain discours se font insistantes. Avons-nous mal mesuré le déphasage combiné du Bloc et du Parti Québécois? En aucun temps, ces deux partis ne pourront désormais tenir pour acquis leur statut de mandataires de la nation québécoise. Provisoirement, nous les avions mandatés pour cheminer vers une autonomisation de la voie québécoise.
Contradictoirement, depuis l’Union Nationale, les partis n’ont point dérogé hors du terreau fertile de l’autonomisme sans en payer le prix électoral. Nous pouvons mieux comprendre, à l’aune de cette notion de mathématique électorale et de calcul de risques, le pari que tente actuellement François Legault. Là où Mario Dumont a échoué, François Legault anticipe une éventuelle prise du pouvoir facilitée par un contexte partisan hautement volatile. Si j’étais François Legault et/ou Pauline Marois, je craindrais l’usage excessif de la démagogie qui repose sur un credo clientéliste. Il ne faut point sous-estimer la force de certaines alliances et la capacité de quelques adversaires de rebondir. Évoquerons-nous alors quelque tête de slinky?
La vague engendrée par le tsunami NPD a révélé la persistance d’un peuple dans son cheminement. Quelques voix discordantes se font entendre de façon périodique à la faveur d’un Bloc Québécois qui prendrait une expansion dans certaines circonscriptions francophones du Canada. C’est mésestimer l’orgueil et le degré d’autonomisation de la démarche québécoise. Les libéraux provinciaux et fédéraux sauront-ils renaître sous une autre étiquette? Rien ne serait plus hasardeux à prédire en ce moment.
De ces jours-ci, le mouvement indépendantiste envisage un nouveau cap. La gouvernance souverainiste ne satisfait point les dissidences encourues. Nous sommes toujours en quête d’un éventuel messie de façon inconsciente, résultant d’une conquête mise en jachère de longue date. La démocratisation des aspirations québécoises nécessite un redressement dans les démarches entreprises. La gouvernance souverainiste gagne à être explorée. Toutefois, comment recueillir l’assentiment des démocrates et des pressés? Donner sa bénédiction à quelques candidatures d’indépendantistes indépendants gagnerait peut-être à être parcourue, moyennant certaines alliances de circonstance.
Être irréductiblement partisan, c’est mener la nation à sa propre perte. S’affranchir du cadre partisan n’exclut point la nécessité de certaines réalités partisanes qui subsistent vaillamment. La notion d’économie des énergies en place nécessite un certain cadre qui paraisse familier au commun des mortels. De l’avènement du Bloc Québécois à sa quasi-disparition au soir du 2 mai, nous assistons au travail de la nation québécoise qui s’assume. La création de Québec solidaire répond de certaines réalités qui se sont révélées avec autant d’acuité que de la nécessité du renouvellement des repères du peuple québécois. Faire preuve d’un patriotisme n’exclut point de parcourir un sentier déjà exploré. Toutefois, ce même peuple demeure relativement jeune dans son histoire. Nous comptons plusieurs siècles depuis la Conquête. Toutefois, nos repères ne sont pour autant arrêtés. Pouvons-nous être catégoriques lorsqu’il est question de franchir quelque Rubicon des aspirations encourues?


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