TGV pour qui?

TGV : Montréal - Windsor/ Montréal - New York


La connaissance des grands principes permet de trouver en toutes circonstances les solutions qui conviennent.

Sun Tsu
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22646]Séduisant, positiviste, constructiviste, destiné à plaire aux Québécois, l’exposé de Richard Florida, « grand gourou » de l’urbanisme de la Rotman School of Management de la Toronto University, s’adressant à l’Association des Économistes Québécois, en juin dernier, [rapporté en page frontispice dans le Devoir de samedi-dimanche 17 et 18 octobre 2009, a remporté semble-t-il, un franc succès.
Richard Florida n’a pas dit quels intérêts seront servis par la construction de ce TGV. Comme on peut s’y attendre, le TGV, même sur le territoire du Québec, tombera sous le contrôle d’Ottawa et de Bay Street à Toronto, qui exploiteront à leur profit les avantages qui en résulteront, L’audience n’a posé aucune question à ce sujet.
Le pouvoir est complètement dans ses communications. En prenant contrôle de la construction des canaux et chemins de fer dans le Saint Laurent pendant le 19e siècle, les Orangistes venus d’Irlande et d’Écosse à la recherche de pouvoirs et de fortunes en Amérique Britannique du Nord, n’ont eu qu’à poursuivre les mêmes continuités que les Français avant eux. Ils ont réussi à créer dans l’axe du Saint Laurent jusqu’aux grands Lacs un espace géopolitique inféodé à leurs pouvoirs et leurs intérêts, mieux connu sous l’euphémisme de « fédéralisme canadien ».
Par sa position et les caractéristiques de sa géographie, le Québec sert depuis toujours de tête de pont et de pourvoyeur à l’expansion stratégique des entreprises, institutions et intérêts vers les grands Lacs et l’Ouest et inversement.
Au terme de 400 ans de travail et d’investissements, les colons de Nouvelle France et leurs descendants actuels ont néanmoins fait du Québec leur foyer national et l’assise de leur État. En conséquence, il appartient au Québec de décider de l’aménagement de son propre territoire, y compris ses moyens de communications.
Si, pour une raison ou une autre, le Québec doit obtempérer aux pressions exercées par Ottawa et Toronto pour construire ce TGV, il est possible d’en prendre et d’en conserver l’initiative afin d’en retirer les avantages et réduire les désavantages, toujours dans l’intérêt du Québec.
À cette fin, certains facteurs de base intéressent non seulement le gouvernement et l’administration du Québec mais tous ses citoyens.
En premier, ce TGV, destiné au fret et aux passagers, doit suivre les voies de communications existantes et qui ont fait la preuve de leur rentabilité à long terme. Le plus simple consiste à construire ce chemin de fer le long des autoroutes empruntées par le trafic qui transige à travers le territoire québécois, comprenant camions, autobus et autos. Les camions et autobus devront obligatoirement embarquer sur les trains, évitant d’emprunter les autoroutes du Québec pour traverser le territoire et aussi pour les distances assez longues.
Ces embarquements et débarquements auront lieu aux frontières et à proximité des carrefours naturels de communications, toujours afin d’obtenir le maximum de résultats avec une économie de moyens.
C’est ce que fait depuis quelque temps la Suisse, dont le territoire a servi pendant des millénaires au trafic entre la France, l’Italie, l’Allemagne et l’Autriche, tant pour le commerce en transit que pour les armées d’invasion. En obligeant le trafic en transit à embarquer sur ses trains, la Suisse protège ses routes, son environnement et ses intérêts.
De plus, par le moyen d’une neutralité crédible grâce à de redoutables défenses territoriales, la Suisse à mis fin à l’utilisation de son territoire par les armées étrangères qui s’en servaient pour aller surprendre l’ennemi de l’autre côté.
Des considérations analogues peuvent s’appliquer au Québec.
Comme pour les autoroutes du Québec, dont l’initiative a été saisie en partant par le gouvernement du Québec sous Maurice Duplessis peu avant sa mort et conservée par la suite, le Québec doit saisir en partant l’initiative du TGV et la conserver, sans permettre à personne ni à Ottawa ni à Bay Street d’en prendre le contrôle.
Avec raison, Maurice Duplessis s’est désintéressé de la Voie maritime du Saint Laurent ouverte en 1959. Dans un espace au climat continental avec hivers prolongés comme le Québec et le Canada, les limites sévères imposées au transport maritime qui doit emprunter les canaux à partir de Montréal vers l’Ontario méridional et l’Ouest étaient évidentes dès les débuts de la colonisation par les Français.
Certes, les chemins de fer, les routes et les autoroutes ne sont pas des moyens de transport aussi économiques que le transport maritime, mais au Québec, en Ontario et dans les Prairies, on n’a pas le choix. C’est la radicalité de la géographie qui s’impose et la géographie n’est pas un déterminisme philosophique.
Aux Québec et aux Québécois de se décider et d’agir avant de se retrouver de nouveau inféodés à des intérêts opposés qui n’entendent pas lésiner sur les moyens pour saisir le Québec et s’en servir à leurs fins.
René Marcel Sauvé, géographe et auteur de
Géopolitique et avenir du Québec, et,
Le Québec, carrefour des empires.


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René Marcel Sauvé217 articles

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J. René Marcel Sauvé, géographe spécialisé en géopolitique et en polémologie, a fait ses études de base à l’institut de géographie de l’Université de Montréal. En même temps, il entreprit dans l’armée canadienne une carrière de 28 ans qui le conduisit en Europe, en Afrique occidentale et au Moyen-Orient. Poursuivant études et carrière, il s’inscrivit au département d’histoire de l’Université de Londres et fit des études au Collège Métropolitain de Saint-Albans. Il fréquenta aussi l’Université de Vienne et le Geschwitzer Scholl Institut Für Politische Wissenschaft à Munich. Il est l'auteur de [{Géopolitique et avenir du Québec et Québec, carrefour des empires}->http://www.quebeclibre.net/spip.php?article248].





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2 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    20 octobre 2009


    Vous n'avez ni lu ni compris ce que j'ai écrit.
    JRMS

  • Archives de Vigile Répondre

    20 octobre 2009

    La question devrait être "Un TGV pourquoi?".
    - Extrêmement coûteux à mettre en place (plusieurs milliards);
    - Extrêmement coûteux à entretenir (plusieurs milliards);
    - Non-rentable partout dans le monde sur DEUX lignes (donc, les contribuables payeront plusieurs milliards pour maintenir le nouveau P'tit train du Nord);
    - On ne cessera pas de surconsommer et de gaspiller de l'électricité pour deux sous, au contraire;
    - Sous-utilisé (Car toujours plus cher que la voiture, l'autobus ou l'avion);
    - Gain en temps très faible ou nulle pour moins de 6-700 Km pour aller d'un point A au point B; plus lent que l'avion au-delà;
    - Moins fiable que la voiture, l'autobus ou l'avion (car une ligne paralysée bloque tout le trafic pour tous les trains sur la même ligne);
    - Cible facile pour des grévistes;
    - Soumis aux aléas et tentations électoralistes du politique
    - Nécessitera des expropriations coûteuses et liberticides (plusieurs centaines de millions).
    Mais tout ça, chez les partisans d'un Québec nationaliste et socialiste, on préfère ne pas le voir.
    Les yeux et les oreilles fermés, vivons dans notre vieille utopie des années soixante où les Autres sont toujours les causes de nos problèmes (Ottawa, les sales Anglais, les maudits Américains, les capitalistes, jamais NOUS ou ce qu'on définit comme le "NOUS"!) et où la France des De Gaulle et des Mitterand doit être l'exemple parfait à suivre.
    La SNCF a fait pour la première fois un profit en 2007... mais cela grâce à des millards d'Euros en subventions.