Revenir à l'essentiel

On n'arrivera à des résultats significatifs qu'en faisant en sorte que le français soit la langue d'usage au Québec, pas seulement la langue officielle.

Citoyenneté québécoise - Conjoncture de crise en vue

Dure semaine pour la chef du Parti québécois, Pauline Marois, que celle qui se termine. Son projet de loi sur l'identité québécoise est attaqué de toute part. En persistant à le défendre envers et contre tous, elle risque de nuire à la cause de l'intégration des immigrants qu'elle prétend appuyer.
Par ce projet de loi, Pauline Marois cherchait entre autres choses à s'imposer comme le leader qui défend avec le plus de vigueur l'identité québécoise. Sur ce plan, elle a certainement réussi. Le chef adéquiste Mario Dumont n'est plus seul sur ce terrain. Mais le débat s'enlise dangereusement. Les oppositions viennent de toute part, y compris au sein du PQ.
Tel qu'il est rédigé, ce projet de loi ne pourra pas être débattu à l'Assemblée nationale. Pour l'être, l'appui d'un autre parti est indispensable. Mais cet appui ne viendra ni du Parti libéral ni de l'Action démocratique. L'idée de créer une citoyenneté québécoise, aussi séduisante qu'elle ait pu paraître à première vue, l'est devenue beaucoup moins à leurs yeux dès qu'il est apparu que les moyens proposés comportaient un caractère discriminatoire. Cette approche les rebute. Ils ne reviendront pas là-dessus.
Dans le contexte constitutionnel actuel, refuser le droit à l'éligibilité à un nouvel arrivant, que ce soit de l'étranger ou d'une province canadienne, parce qu'il n'a pas une «connaissance appropriée» du français le prive d'un droit. De ce fait, on crée deux catégories de citoyens alors que, depuis le début des années 70 et 80, les chartes québécoise et canadienne des droits proclament l'égalité de tous devant la loi. Des juristes qui appuient la démarche péquiste prétendent qu'il est raisonnable et justifiable de restreindre ce droit afin de consolider la place du français. Peut-être ont-ils raison, ce qui reste à être démontré. Mais toute restriction des droits, quels qu'ils soient, heurte néanmoins l'esprit de tous ceux qui valorisent l'égalité de droit.
Mal engagé, le débat glisse vers la polarisation. Une fois de plus, les adversaires du PQ profitent de l'occasion qu'il leur donne de le démoniser. Les accusations de racisme lancées par le B'nai Brith sont sans fondement. Cet organisme prête des intentions avant toute chose révélatrices de l'incapacité de ses dirigeants à comprendre la société québécoise.
La restriction des droits proposée par Mme Marois a pour effet d'occulter tout le reste du projet de loi. On y trouve pourtant des mesures plus qu'intéressantes, par exemple cette idée d'un contrat d'intégration par lequel l'État s'engagerait à donner tous les moyens aux nouveaux arrivants pour qu'ils apprennent le français. Notons aussi l'obligation de se franciser qui serait enfin faite aux entreprises comptant entre 25 et 50 employés. Le vrai problème de l'intégration des immigrants est là. On n'arrivera à des résultats significatifs qu'en faisant en sorte que le français soit la langue d'usage au Québec, pas seulement la langue officielle. À cet égard, tous les gouvernements antérieurs, péquistes et libéraux, n'ont jamais eu la détermination de faire les efforts suffisants. C'est sur des politiques de ce type que le débat doit porter. La création d'une citoyenneté québécoise devrait venir comme le couronnement d'efforts concluants. Il ne serait alors plus nécessaire de restreindre des droits afin de donner une valeur à cette citoyenneté. Mme Marois devrait revenir à l'essentiel si elle ne veut pas s'enliser davantage. Il ne faudrait pas que la cause qu'elle défend en souffre.
bdescoteaux@ledevoir.com


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