Réponse à JRMS

Qui donc est ce «Nous»?

Combattre pour le Québec sans se soucier de la charge identitaire qu’il portait, c’était sacrifier la proie pour l’ombre, c’était faire le jeu de l’ennemi.

Citoyenneté québécoise - Conjoncture de crise en vue

[Monsieur Sauvé->aut328],
Vous écriviez il y a peu : « […]NOUS RECONNAÎTRE D’ABORD POUR CE QUE NOUS SOMMES. C’est à cette condition seule que nous serons reconnus. ».

Je serais bien près de vous suivre, si vous pouviez seulement définir ce «Nous» qui doit se reconnaître avant toute chose. Pour ma part, je considère qu’il faut faire du Québec l’État national des Canadiens-Français. Car l’État qui a été constitué, racheté sou par sou comme vous le rappelez si bien, ce pays du Saint-Laurent si patiemment, si opiniâtrement gagné, c’est le nôtre, celui des Canadiens-Français. Ce qu’il faut reconnaître, c’est cela et rien d’autre.
N’allez pas croire cependant que je ne saisis pas votre propos, je pense l’avoir à peu près compris : l’État du Québec est géopolitiquement viable et donc sa reconnaissance et son avènement sont inévitables, ce n’est qu’une question de temps.
Mais ce que je veux dénoncer ici c’est que, si rien n’est fait, la Nation qui possèdera cet État ne sera pas celle des Canadiens-Français. La filiation historique de cet État, sa mémoire, sa culture ne sont déjà plus celles des Canadiens-Français, le français lui-même pourrait à terme ne plus être sa principale langue d’usage. C’est une aberration qui me révolte au plus au point, car cette contrée qui est la nôtre, je le répète, ce sont les Canadiens-Français qui l’ont forgée de toutes pièces. Vous le savez sans doute mieux que quiconque, ce sont nos ancêtres qui l’ont faite à la sueur de leur front. Nos ancêtres ont arrosé cette terre de leur sang et de leurs prières, et en dépit de toutes les avanies, ils ont gardé espoir, ils ont maintenu le cap : ils ont défriché, ils ont labouré, ils ont percé des chemins, ils ont édifié des temples, des villages et des villes, des manufactures et des barrages, toujours avec la conviction que ce pays plus beau et plus prospère serait celui de leurs enfants.
Cette réelle grandeur des Canadiens-Français n’inspire pourtant plus. Après 40 ans de souverainisme, elle est devenue objet d’aversion. Tellement, que la plupart de nos nationalistes font tout pour l’oublier, pour oblitérer de leur mémoire ce passé soi-disant honteux. Certains vont plus loin, ils nient jusqu’à la réalité historique de la nation canadienne-française. Selon eux, elle ne serait qu’une invention mise en place par les fédéralistes pour mieux nous fidéliser! Un délire d’aliénation et de reniement. Le Québec est aujourd’hui un pays où le nom même de Canadien-Français est trop souvent synonyme d’injure.
Vous vous demandez pourquoi le Québec ne se reconnaît pas encore? Je vous dirais simplement que c’est à cause de cette honte, de cette aliénation, de ce reniement. On ne peut pas bâtir un État là-dessus. Trop de gens ont encore soif, ont encore besoin de fierté, d’une mémoire et d’une filiation exemptes de mauvaise conscience et de ressentiment. Ces gens-là sont pour moi des Canadiens-Français qui se disent certes Québécois, mais qui très confusément ressentent toute l’imposture de ce vocable qui ne les désigne plus vraiment. C’est cette imposture qui les paralyse. Qui donc pourrait leur en vouloir? Comment s’exalter en effet d’avoir à choisir entre deux dénationalisations, deux apostasies identitaires, celle déjà ancienne du Canada multiculturel ou celle plus récente du Québec pluraliste. Pour eux, pour nous, c’est tomber de la poêle dans la braise, c’est tomber de Charybde en Scylla. En fait, ce n’est pas un choix qu’on impose aux Canadiens-Français depuis 40 ans, c’est bien plutôt un suicide. Et bon nombre y ont succombé : de Hubert Aquin à Nelly Arcand, combien sont ceux qui ont souffert de la dévitalisation québécoise au point d’en mourir?
Avant 1968, face au pancanadianisme des Libéraux, doctrine qui remonte aussi loin qu’aux Patriotes, il n’y a jamais eu pour faire obstacle à l’assimilation que le nationalisme canadien-français. C’est ce fort sentiment national qui détermina la création des collèges et des couvents, qui amena la formation des caisses populaires, qui entraîna le relèvement de la Province of Quebec en 1867 après 27 ans d’union forcée, qui en somme, explique l’extraordinaire résilience dont firent preuve nos aïeux. Et c’est ce même sentiment, ou plutôt la Nation qui l’inspire, que vient reconnaître en 1967 le président de la France. Et c’est cette même nation canadienne-française qui, toujours en 1967 se reconnaît comme telle et qui proclame ses droits à l’autodétermination aux États généraux du Canada français. Il ne lui suffisait alors que de faire du Québec son État national, que de faire du Québec, le Canada-Français : une chose si évidente que personne n’aurait pu l’empêcher ou durablement la contester.
Mais cela n’est pas advenu. Le PQ détourna les nationalistes canadiens-français de cette voie, pour les amener à croire que, pour prétendre à un État véritable, il leur fallait devenir Québécois, c'est-à-dire participer à l’émergence d’une nation, d’un peuple nouveau formé par tous les habitants du Québec. Un même processus en somme que celui proposé par les promoteurs d’un Canada multiculturel, mais cette fois limité au seul territoire de la province.
Mais peut-être que vous êtes de ceux qui jugeront ce genre de propos comme relevant d’une tentative de diversion, une querelle sémantique fâcheuse et futile? Canadiens-Français, Québécois ou Francophones d’Amérique, qu’importe après tout : c’est du pareil au même. Je l’ai cru, mais je n’y crois plus. Si un nom n’a pas d’importance, alors pourquoi en changer? Parce que suite à un tel changement, il serait plus simple d’être reconnu? Ben voyons! Les deux seules grandes études de nos droits à l’indépendance, celle de Wilfrid Morin publiée en 1938, et celle de Jacques Brassard publiée en 1976, ne considèrent que la nation canadienne-française. Brassard introduit certes le concept théorique du «peuple québécois» mais que dans une certaine optique, celle de faciliter l’éventuelle tenue d’un référendum…
Non, la vraie nature du nationalisme québécois m’est devenue évidente : s’il fallait abandonner notre nom, c’est bien plutôt parce que nous doutions de notre légitimité d’être, d’être canadien-français. C’est à cause de ce doute, logé au plus profond du Canadien-Français depuis la Conquête, que la fiction d’une nation nouvelle et progressiste possède tant d’attrait pour nous. Ce fut d’abord le Canada, (celui des Patriotes, celui d’Henri Bourassa, celui de Trudeau), puis ce fut le Québec. Songez-y, le Québec moderne ne peut exister que par la présence des autres, notamment les Canadians du Québec. Et c’est là leur donner une importance considérable, c’est reconduire de manière plus parfaite encore notre subordination à leur égard. Un simple exemple : jeudi dernier à l’Université de Montréal, j’écoutais Madame Marois répondre à la question d’une jeune anglophone inquiète de ses droits. La chef du PQ fut très claire : les Anglo-Québécois forment une minorité historique, ils sont fondateurs et ont participé au développement du Québec au même titre que «l’élément français». Cette minorité a des droits imprescriptibles, si bien que quand bien même n’y aurait qu’un seul enfant de la minorité à Gaspé ou à Sept-Îles, on se ferait toujours un devoir de lui assurer une éducation en anglais. Rien de moins… Et la salle applaudit à tout rompre!
Madame Marois ne pouvait m’offrir une plus belle illustration de ce qu’est l’État québécois, un État majoritairement francophone mais tributaire du monde anglo-saxon. The Province of Quebec fut fondée par la Couronne britannique en 1763 pour circonscrire la nation canadienne-française, c’est à dire délimiter l’espace où les Canadiens-Français pourraient jouir de certains droits particuliers, des droits auxquels ils tenaient mordicus et dont on ne put faire l’économie de leur accorder compte tenu de la géopolitique d’alors. Le Québec fut conçu comme un cadre administratif de l’Empire, un État potentiel, croupion, où les Canadiens-Français eurent donc une liberté et des droits particuliers, mais où la minorité anglaise puis canadian restait structurellement dominante puisque c’est elle qui représentait la normalité anglo-saxonne.
Même après la Confédération, la Province of Quebec qui est relevée reste constituée de telle façon que la majorité canadienne-française doit en quelque sorte s’excuser d’exister sur la scène publique, doit sans cesse justifier l’exercice de ses droits dès qu’il dépasse notablement la sphère du privé. Les Canadiens-Français contournèrent en grande partie la difficulté en chargeant l’Église catholique d’un rôle de suppléance probablement inégalé (et en limitant ce faisant les actions de cet État croupion), mais néanmoins, en politique, ils durent par la force des choses s’imposer un respect scrupuleux de la minorité anglophone, ce qui entraîna à la longue une sorte de conditionnement. On se souvient des longues hésitations de Maurice Duplessis à adopter un drapeau qui ne rappelait en rien «l’élément anglais».
Aussi choquant que cela puisse vous paraître, c’est ce conditionnement là que le nationalisme québécois a institutionnalisé : en s’appuyant désormais sur le seul État du Québec qui s’était toujours voulu par essence le plus favorable possible envers la minorité, on consacrait la relégation de notre nationalité réelle, historique et culturelle, en arrière-plan. Ce faisant, on admettait la soumission de la majorité face à une minorité toujours prioritairement considérée, qui, par son accord ou son désaccord, donne le ton, qui impose la mesure dans la Cité, qui, au final, détermine l’acceptable de ce qui ne l’est pas. C’est là, la cause notre incapacité à penser une doctrine d’État, à penser la politique en fonction des intérêts de la majorité. C’est de là en grande partie que provient la suspension des règles démocratiques lorsqu’il est question de multiculturalisme ou d’immigration; c’est de là que vient l’intransigeance (qui vire parfois à l’obséquiosité) d’un Lévesque, d’un Bouchard, ou d’une Marois quant au maintien des droits, des privilèges, bref du statut injustifié dont jouissent les Canadians au Québec.
On saisit mieux je crois, pourquoi bloquistes et péquistes préfèrent ne pas trop s’opposer à la présence britannique, que ce soit lors de nos grandes commémorations ou lors de visites princières. Leur souverainisme ne remet pas en cause l’appartenance du Québec au monde anglo-saxon, il l’y intègre davantage. Et de toute évidence, c’est à ce prix-là que nos néo-nationalistes, nos progressistes libéraux ont cru obtenir plus facilement leur fameuse souveraineté-association. Mais en fait, l’indépendance elle-même ne changerait rien à l’affaire. Pas plus qu’un régime républicain. Il faut voir le Québec comme une prison politique qui bride, qui écorne la majorité francophone de manière à ce que la minorité ne soit pas menacée, ne soit pas gênée d’une quelconque manière dans son existence. En devenant Québécois, les Canadiens-Français ont intériorisé cette prison. Ils se condamnaient ainsi à faire tapisserie, ils délégitimaient toute manifestation collective qui n’inclurait pas l’Autre, car c’est cet Autre qui compte réellement.
Et c’est cela que la Loi 99 entérine : un État certes majoritairement francophone (mais jusqu’à quand?) qui ne se reconnaît des devoirs qu’envers la communauté anglophone historique et les Nations autochtones!!! Les Canadiens-Français y sont superbement ignorés, leur histoire n’est même plus évoquée, l’État du Québec ne leur doit tout simplement plus rien. Est-ce vraiment cela qu’on recherchait dans les années 1960? Je ne pense pas, car donner un pays aux Canadiens-Français signifiait autre chose : c’était précisément casser ce moule qui déforme et handicape notre réalité nationale, cet État qui nous abaisse, qui nous voûte, nous culpabilise et nous diminue inexorablement. On a beaucoup reproché aux Anciens de ne pas avoir suffisamment utilisé cet État du Québec. En y réfléchissant, se pourrait-il que certains d’entre eux aient compris que cette Province, bien que préférable à l’Union, il fallait en user avec la plus grande circonspection? Qu’elle pouvait très bien devenir le pire cadeau de grec qui soit?
C’est bien beau tout ça, me direz-vous peut-être, mais l’alternative, cet État canadien-français, ne relève-t-il pas plutôt d’un cauchemar, d’un phantasme éminemment raciste? Soyons sérieux, le Canada-Français ne serait rien d’autre qu’un État où le référent identitaire officiel serait celui des Canadiens-Français. Exactement comme en Écosse où ce référent est naturellement écossais, comme en Catalogne où il est catalan, même si là-bas tous ne sont pas Catalans de naissance. Il y aurait au Canada-Français, comme partout ailleurs, des citoyens d’origine étrangère, des immigrants aussi, mais qui sauraient à quoi s’en tenir quant à la culture de leur terre d’adoption. Comme le Pakistanais le sait lorsqu’il vit en Angleterre, comme l’Algérien le sait lorsque qu’il est en France et ce, précisons-le, sans que l’un ou l’autre n’ait à sacrifier son identité propre. Vous voyez la différence : dans un Canada-Français, c’est l’identitaire canadien-français qui occuperait la place publique, les autres cultures relevant plutôt du domaine privé. Nous inverserions la donne qui est celle du Canada, mais aussi celle du Québec. Fini la mauvaise conscience. Fini l’équivoque.
Et les «Anglo-Québécois», les Canadians du Québec dans tout ça? C’est là un des nœuds du problème. Il leur faudrait comprendre qu’ils ne sont pas fondateurs du Canada-Français, qu’en fait, ils ne forment qu’une diaspora semblable à celle que constitue les Canadiens-Français hors Québec. Il leur faudrait admettre qu’ici ce n’est pas leur pays, mais bel et bien celui des Canadiens-Français, un État né sous le Régime français, et non pas né de la Conquête anglaise. Compte tenu de l’histoire, ils pourraient certes y vivre avec des aménagements particuliers (ce qui serait nécessairement le cas pour les Nations autochtones), mais en se soumettant à cette réalité toute simple : au Canada-Français, la culture publique, la culture d’État est celle qui est déterminée par les Canadiens-Français.
À mon sens, c’est à cette seule condition que les effets pervers de la Conquête de 1760 pourraient être effacés. Pas d’un coup, mais avec le temps. En revanche, si nous persistons à devenir toujours plus Québécois, plus accommodant, plus ouvert à l’Autre, plus délavé, plus évanescent, nous ne pourrons plus résister bien longtemps, nous singerons cet Autre, le véritable maître -nous le singeons déjà- nous nous fondrons en lui, nous nous évanouirons tels des spectres [(merci à Dominic Desroches pour l’image)->23225]. J’y vois comme signes précurseurs la «bilinguisation» des services gouvernementaux, celle des HEC et de la Chambre de commerce de Montréal, celles des caisses populaires, en somme cet attrait exagéré pour l’anglais ou pour l’étranger : des souverainistes n’ont-ils pas déjà suggéré l’établissement de cégeps bilingues, ne voit-on pas se multiplier les écoles dites internationales? Même de petits faits me semblent révélateurs, comme la disparition récente du vénérable Club Saint-Denis, le club des bourgeois canadiens-français fondé en 1874 et qui a vu sa clientèle lui préférer The Saint James Club devenu bilingue…
Pour tout dire, si ceux d’entre nous qui conservent encore un peu d’amour pour leur identité canadienne-française, car c’est ici affaire de cœur bien plus que de tête, si ceux-là n’arrivent pas à s’ouvrir les yeux sur la vraie nature du nationalisme québécois, s’ils n’arrivent pas à se rassembler pour réfléchir à une contre-offensive si modeste soit-elle, les jeux seront faits. Ce pays de France en terre d’Amérique aura finalement vécu. L’Anglais si patient et si retors aura finalement gagné. The Province of Quebec, ce piège tendu il y a plus de 250 ans, se sera finalement refermée sur nous.
Quoiqu’il en soit, vous comprendrez pourquoi les avantages de notre géographie ou la viabilité géopolitique indéniable du Québec ne représentent pas pour moi l’essentiel. L’existence, la reconnaissance de l’État du Québec, a fortiori son indépendance, restent bien secondaires. Combattre pour le Québec sans se soucier de la charge identitaire qu’il portait, c’était sacrifier la proie pour l’ombre, c’était faire le jeu de l’ennemi. Qu’il en ait si peu qui l’ai compris me sidère. L’important eut été bien plutôt de s’assurer de ce qui aurait dû constituer l’âme de cet État : le souvenir des hommes et des femmes qui ont fait ce pays, ces êtres de chair et de sang, des êtres de courage, de foi et de culture, ces Canadiens-Français sans qui nous ne serions rien, des êtres d’exception dont j’aimerais tellement être digne et dont à défaut, je voudrais mieux défendre la mémoire dans ce Québec qui les méprise tant.
C’est pourquoi je vous repose la question Monsieur Sauvé, vous qui êtes issu d’une des plus honorables familles canadiennes-françaises : qui donc est ce «Nous» qui doit se reconnaître?
Respectueusement,
Robert Chevalier de Beauchesne

PS
Je pose bien évidemment cette question à tous. Et je la pose en particulier à ceux qui déplorent le manque criant de sens dans notre belle société québécoise.
RCdB
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7 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    10 novembre 2009


    Monsieur Bousquet,
    Vous me répondez par une hypothèse. Je vais vous répondre
    par une autre.
    Que se passera-t-il "si" Ottawa est discrédité par les
    autres provinces en commençant par l'Ontario ?
    Simple hypothèse sans fondement, me direz-vous. La
    réponse n'est pas à trancher au couteau.
    Je connais le Canada anglais. J'y ai étudié et j'y ai
    vécu, comme officier dans l'armée et comme enseignant.
    Je le connais comme géogaphe, ayant eu à préparer et
    enseigner de nombreuses monographies régionales.
    Je connais plusieurs autres régions du monde, toujours
    comme géographe spécialisé dans l'étude des États. Les
    réalités des pouvoirs existants sont telles que tous les
    peuples de la terre qui sont devenus des États doivent
    continuellement s'adapter et agir selon les principes
    universels qui gouvernent toute stratégie d'État,
    sommairement expliqués dans Géopolitique et avenir du
    Québec, chapitre 9.
    Les gens qui ne connaissent pas ces principes sont portés
    à chercher des solutions idéales, fixes et définitives,
    alors que de telles solutions mènent vers la catastrophe
    que tout le monde veut éviter.
    Je connais l'anglais et les Anglais, ayant étudié en
    Angleterre. Contrairement à ce que vous pourriez croire,
    s'il m'arrive de piquer une colère sur leur comportement
    envers nous et envers les autres, je n'en éprouve aucun
    ressentiment, D'ailleurs, j'ai épousé une anglaise, une
    vraie de vraie, avec qui je vis depuis 54 ans.
    La politique est complètement dans l'action et l'action
    s'articule autour de treize principes de base, non des
    théories ni idéologies mais des principes qui servent de
    régulateurs et de guides vers un agir concret. sans lequel
    aucun progrès n'est possible.
    Je vous ai raconté comment, dans cet espace continental
    qu'on appelle Canada nous avons non seulement
    survécu envers et contre l'adversité du milieu géographique
    ambiant et l'hostilité outrée des White Anglo Saxon
    Protestants: nous avons progressé d'une manière continue
    au point de devenir une peuple, une nation et un État
    nouveau dans l'échiquier d'un monde de plus en plus
    complexe.
    Je ne vois pas beaucoup d'avenir pour Ottawa et c'est sans
    haine ni ressentiment que je l'affirme. J'ai comparé
    Ottawa à Kalmar en Scandinavie et ma comparaison tient
    toujours. Bien sûr, il y a des différences. Ce qui demeure
    analogue, c'est que les Scandinaves, en commençant par les
    Suédois, n'ont pu tolérer l'inféodation au pouvoir
    centralisateur et unitaire des princes danois. Avec le temps,
    ils ont constitué des États distincts et il a fallu que tout
    le monde s'adapte en conéquence.
    Je peux vous exposer une comparaison valide avec les Balkans,
    dont la géographie linéaire et composée d'espaces organisables
    a favorisé la naissance de plusieurs États distincts et
    différenciés, que ni les Habsbourg, ni les Yougoslaves, ne
    sont parvenus à inféoder définitivement. Cette histoire a
    plus de 3000 ans. La nôtre n'en a que 400.
    L'État post-impérial, centralisateur, unitaire et arbitraire
    d'Ottawa est linéaire et le Québec est la tête de pont de
    cette linéarité. Sans le chemin de fer, l'État des United
    Empire Loyalists et des Orangemen et la bourse de Bay Street
    n'existerait pas. Le Québec, qui chevauche le Saint Laurent
    sur plus de 2000 kilomètres, est appelé à devenir un État
    avec la majuscule. C'est la radicalité de la réalité. Ce
    n'est pas du déterminisme.
    L'Angleterre impériale s'est adaptée à des conditions
    changeantes. Nous devons faire de même. Cette adaptation
    vers le statut d'État avec pleins pouvoirs n'est pas du
    séparatisme ni du déterminisme ni autre idéologie en
    "isme". D'autres peuples l'ont vécue.

    JRMS

  • Gilles Bousquet Répondre

    9 novembre 2009

    JRMS écrit : «C’est devant ce NOUS qu’Ottawa et Bay Street devront obtempérer et quitter le Québec.»
    Oui mais s'ils ne quittent pas, on fait quoi exactement ?
    Faudrait commencer par convaincre plus de francophones que la souveraineté vaut mieux que le fédéralisme. On ne peut pas aller plus loin sans ça. Les Québécois viennent juste d'élire un Conservateur fédéraliste dans un beau comté du Bas St-Laurent. Pas trop encourageant pour la souveraineté.

  • Tremblay Sylvain Répondre

    9 novembre 2009

    Je me souviens d'un philosophe qui parlait du "un" dans mes cours de philosophie, je pense que c'est Nietzsche. Mon souvenir est à l'effet que l'un, la personne, c'est très important. Ça l'a un fondement dans la société, comme la personnalité juridique, le pouvoir de gérer sa vie comme on l'entend, être libre de choisir ce qu'on veut, ce qui est bon pour nous.
    Le "nous", c'est un peu la même chose, je pense. Ce peut être le nous d'un groupe, d'une association, d'un organisme, d'une compagnie, d'une municipalité, d'un état. Ce qui fait l'unité dans un tel ensemble, c'est le pouvoir d'agir au nom de. Le chef d'entreprise agit au nom de; le président d'un organisme agit au nom de; le maire d'une ville agit au nom de, etc., jusqu'au chef d'un état qui agit au nom de, aussi. Quand le détenteur de ce pouvoir veut quelque chose, c'est péremptif (une obligation, une nécessité). S'il n'a pas le moyen actuel de le faire, il va s'organiser pour l'avoir dans le futur, il va prendre les moyens pour.
    D'où le "un" ou le "nous" relié à la volonté. On dit souvent, si tu veux, tu peux. Si le gouvernement veut, il va le faire; s'il ne le fait pas, c'est parce qu'il ne veut pas.
    D'autre part, quand quelqu'un nous empêche de faire ce qu'on veut, on s'en éloigne, et on s'organise pour s'associer plutôt avec des personnes qui vont nous permettre d'accomplir nos objectifs. Pour une personne morale ou un état, c'est la même chose. Il faut que la volonté du "un" ou du "nous" soit respectée, sinon l'association est rompue et on va voir ailleurs pour faire avancer notre affaire.
    Dans ce contexte, le "nous" du Québec, c'est le pouvoir d'état. C'est une unité en soi. Le gouvernement a le pouvoir d'agir en tant que chef d'état.
    C'est différent de l'ensemble des composantes de la société québecoise, que certains aient des privilèges, un statut particulier ou des dissidences politiques particulières en regard des autres. Le pouvoir d'état inclue tout le monde. C'est tout le monde qui fait que l'état soit l'état, et qu'il a des pouvoirs.
    La question soulevée par monsieur Chevalier est très importante, mais elle s'inscrit plutôt dans nos affaires intérieures, pas extérieures. Le pouvoir d'état est un pouvoir extérieur, avant tout, il dit aux autres qui on est et ce qu'on veut. C'est l'existence de l'état parmi d'autres états. On dit qu'on existe, alors qu'on fasse attention à nous. C'est ça le pouvoir d'état. C'est l'existence de l'état, son affirmation.
    Pour les affaires intérieures, comme la langue, les particularités de certains groupes de citoyens par rapport à d'autres, c'est une autre affaire. On ne va pas étaler ça sur la place publique mondiale. Nos concitoyens ne sont pas nos ennemis; on peut avoir des divergences sur certains points, comme la langue d'usage, les privilèges ou les droits des uns sans que les autres d'un même groupe les aient aussi, la pertinence de prolonger, d'étendre ou restreindre ces droits ou privilèges, ce sont des questions intérieures. Ça ne concerne pas le pouvoir d'état en regard des autres états.
    Sans vouloir expliquer ou interpréter l'idée de monsieur Sauvé, car j'en serais bien incapable, c'est la réflexion que j'ai suite à ce très bel article de m. Chevalier et du commentaire que m. Sauvé en a donné. On peut ne pas tout comprendre dans la vie, mais on peut quand même essayer d'y réfléchir et donner son opinion, même si on pense qu'on peut être dans le champ, ou que les autres pensent qu'on y est. Mais enfin ... . D'un autre côté, ça peut être utile aussi, si on apporte un bon point, et c'est une raison suffisante.

  • Archives de Vigile Répondre

    9 novembre 2009

    Vous frappez juste Monsieur Bousquet. Que faire alors? Je ne vois rien d’autre que le rassemblement des gens chez qui l’identité canadienne-française demeure l’assise de la Nation.
    Pour faire quoi? Il faudrait sans doute en discuter. Pour ma part, c’est la transmission du bagage, du patrimoine historique et culturel que constitue cette identité qui m’importe d’abord. Je verrai donc prioritairement l’établissement de centre de références (virtuel au départ sans doute, mais pourquoi pas un jour bien réel) qui puisse servir de support solide aux cours d’histoire offerts à nos jeunes, et même plus que ça : un tel centre pourrait très bien servir à l’enseignement de la culture catholique dans le cadre du cours ECR, où même la connaissance de notre littérature canadienne-française, celle de nos arts aussi. Notre jeunesse a un besoin vital de retrouver ses racines, de recouvrer son héritage français et catholique.
    Du point de vue politique, c’est autre chose. C’est l’amorce d’un mouvement qu’il faudrait susciter. Un mouvement qui se consacre à replacer au cœur du débat politique les intérêts des Canadiens-Français, en gros la défense et le maintien de leur spécificité. Les jeunes qui gravitent autour de l’Action nationale essaient de le faire je crois, mais en parlant de la majorité francophone du Québec, de la majorité historique. Pour moi tout ça, ce n’est que du temps perdu : le Québec vise l’assimilation de cette majorité, précisément la perte de son caractère français et de son patrimoine catholique.
    Comment faire? C’est là où il faudrait le concours de plusieurs pour en parler sérieusement. Mais si ce genre de considérations n’interpellent vraiment personne, à quoi bon?
    Bien à vous,
    RCdB

  • Archives de Vigile Répondre

    9 novembre 2009


    Le NOUS est la VOLONTÉ qui traduit en Acte la dernière phase de la période formative du Québec.
    Le NOUS est à la fois conscience et volonté d'agir en tant que
    peuple, nation et État.
    Dès 1839, dans un rapport rendu célèbre, Lord Durham a reconnu à plusieurs reprises que les anciens colons de Nouvelle France qui avaient mis en valeur la vallée du Saint Laurent et ses régions adjacentes, formaient bel et bien un peuple et une nation. Il ne pouvait en nier la logistique.
    Le Parlement d'Ottawa a fait de même le 29 novembre 2007.
    Si Durham a fait remarquer que ce "peuple" est sans histoire, c'est pour souligner le fait que, reconnu peuple et nation, il ne pouvait être reconnu comme État.
    Cette lacune a été corrigée et avec la Loi 99 en date du
    11 décembre 2000, le Québec s'est reconnu État. Reste à traduire cette reconnaissance en Acte, avec pleins pouvoirs constitutionnels et juridiques.
    L'Angleterre n'a pas hésité à reconnaîre l'effritement du pouvoir impérial de Londres, dès 1774 avec l'Acte de Québec, suivi du traité de Saint Germain en Laye qui reconnaissait les États Unis d'Amérique en 1783. suivi du Britisn North America Act de 1867 qui reconnaisait le Dominion of Canada, lequel remplaçait le non statut de colonie.
    Le BNA Act a été suivi des Westminster Revised Statutes du 11 décembre 1931, par lesquels l'Angleterre reconnaissait l'effritemnet de son pouvoir sur les colonies. Finalement, il y a eu le Canada Act de 1982, lorsque la Reine en personne est venue signifier qu'elle entendait s'immniscer de moins en moins dans les affaires du Canada et par extension du Québec et des autres provinces, dont plusieurs ont acquis la stature de véritables États, Québec en tête.
    Le NOUS est donc venu au monde avec la naissance de notre peuple, notre nation et maintenant notre État. Il est l'expression de notre conscience collective, de nos statuts reconnus et de nos pouvoirs d'État, lesquels ne demandent qu'à se traduire en Acte.
    C'est devant ce NOUS qu'Ottawa et Bay Street devront obtempérer et quitter le Québec.
    JRMS

  • Marcel Haché Répondre

    9 novembre 2009

    À une journaliste qui lui demandait « comment » déterminer le nombre de personnes qui justifierait qu’un service, en français ou en anglais, soit rendu, Pierre Elliot Trudeau avait répondu que c’était au gouvernement de le déterminer. C’était au temps du « là où le nombre le justifie »
    Par la suite, concernant la minorité anglophone du Québec, qui n’est pas exclusivement concentrée dans la région montréalaise, il avait expliqué que, quant à lui, le gouvernement du Québec n’avait pas à être plus « généreux (à son égard) que ce que la générosité commandait ». Malgré la Chartre des Droits…P.E.T lui-même…
    Je n’avais pas été surpris de pareille déclaration. Même venant de P.E.T. Il y avait encore une interface entre les fédéralistes et les souverainistes : c’était justement le peuple canadien-français.
    Ce peuple là existe encore, mais il semblerait qu’il doive disparaître pour que vive le peuple québécois. CELA EST UN NON-SENS.
    Le nationalisme, cela est porté au cœur, pas seulement à la boutonnière.
    J’avais été surpris de lire sur Vigile, par un souverainiste, qui avait fait valoir qu’il avait « appuyé » les nationalistes, pour justifier ses positions. Aucun nationaliste ne réclame jamais d’être « appuyé ». Il s’attend simplement qu’on le soit.
    « Chaque peuple sa maison », c’est pourtant une formule bien différente que tous les peuples dans la même maison, serait-elle québécoise…
    Le Nous, donc, ce ne peut-être que celui capable de s’accorder à la fois avec le Nous-des-ancêtres et le Nous-les-descendants. La capacité d’intégrer de nouveaux arrivants ne peut découler que de la reconnaissance, préalable, du Nous-les-descendants.
    Mais surtout, chaque génération laisse la suivante déterminer les contours de sa fidélité*. Les vaincus des Plaines eux-mêmes ne désavoueraient pas le nationalisme québécois actuel, mais ils se surprendraient de sa si grande inclusion de l’anglais, et ils déploreraient certainement son manque de combativité. Tout cela est bien différent, je vous le concède, que simplement choisir une doctrine plutôt qu’une autre.
    *Je sais que Lionel Groulx ne se rallait pas au « québécois », mais je crois qu’il ne le désavouerait pas maintenant.

  • Gilles Bousquet Répondre

    9 novembre 2009

    Vous affirmations et conclusions font réfléchir mais, on fait quoi avec ça ? Disons qu'on oublie la désignation de québécois en revenant au canadien-français.
    Le prochain mouvement ? On tient un référendum pan-canadien sur la souveraineté de la Province de Québec où on ne ferait voter que les francophones québécois ou ceux de tout le Canada ? Les bilingues ? Les anglophones du Québec aussi ? Ou si on continue d'être Canadiens-français dans le Canada ?
    Ça serait quoi votre choix de question au prochain référendum et est-ce que le Québec changerait de nom, en cas de victoire du OUI pour : Canada français ?
    Je vois plus ce que vous rejetez que ce que vous proposez ici.