«Rapide sur la gâchette»

CDPQ - Où va Michael Sabia?



(Québec) Je suis sorti impressionné de la conférence qu'a donnée Jacques Parizeau, jeudi, devant l'Association des économistes québécois.
Parizeau, c'est un monument. Et «Monsieur» en impose par son intelligence et sa connaissance inouïe de la finance et de l'économie.
Mais 24 heures plus tard, j'étais moins enthousiaste. Je veux bien que l'on critique Jean Charest pour la nomination improvisée de Michael Sabia à la tête de la Caisse de dépôt. On a court-circuité le processus d'une façon inacceptable et imbécile. Le gouvernement aurait voulu condamner Sabia à l'opprobre populaire qu'il n'aurait pas agi autrement. Le pauvre homme est tellement honteux qu'il a renoncé à sa pension cette semaine.
Là où je ne comprends plus M. Parizeau, c'est lorsqu'il ménage Henri-Paul Rousseau. Il fait d'abord l'éloge de ses premières années à la Caisse de dépôt, pour conclure simplement que l'institution semble avoir «perdu les pédales» lorsqu'elle s'est lancée dans des investissements magistraux à l'étranger. Il s'étonne que les membres du conseil d'administration n'aient pas été informés de l'ampleur de l'achat des papiers commerciaux, sans plus.
Mais bon Dieu! C'est Henri-Paul Rousseau qui dirigeait la shop! C'est son monde qui a acheté les PCAA et c'est à lui qu'incombait la responsabilité d'informer les membres du C. A.!
Je veux bien que l'on critique les politiciens payés à 150 000 $ par année. Mais il me semble que les dirigeants de nos grandes institutions, payés trois fois plus cher et grassement pensionnés, devraient être les premiers sur le gril lorsqu'ils font des erreurs. Je trouve que M. Parizeau est plus «rapide sur la gâchette» à l'endroit des élus qu'à l'endroit des grands commis de l'État.
De la même manière, je trouve qu'il a la condamnation facile à l'endroit des gens comme Sabia ou Paul Tellier, parce qu'ils ont fait carrière à Ottawa. J'ai travaillé 11 ans à Ottawa. Est-ce que ça fait de moi un moins bon Québécois? Est-ce que le jeune Parizeau aurait refusé l'invitation d'Ottawa dans le temps, si on lui avait offert la direction de la Banque du Canada? J'en doute.
On ne peut pas avoir sa «toast beurrée des deux côtés». On ne peut pas réclamer une plus grande participation des francophones au pouvoir à Ottawa, et condamner simultanément ceux comme Tellier, originaire de Joliette, qui ont fait carrière sur la scène fédérale.
Et puis, vous me permettrez de reprocher à M. Parizeau de ne lire que les médias montréalais. Lorsqu'il s'étonne que la Caisse de dépôt n'ait pas lu «l'avertissement» de la Banque du Canada à l'endroit des papiers commerciaux en 2005, il cite le sous-gouverneur de la Banque, Pierre Duguay. Or, M. Duguay a fait savoir par la suite qu'il s'était trompé, et que son avertissement avait été fait en 2003. Et cette semaine, la Banque a publié un second correctif : il ne s'agissait pas d'un avertissement, mais de «préoccupations» à l'endroit des PCAA, a fait savoir l'institution, qui conclut que «l'écroulement de ce marché et ses conséquences à l'échelle du globe n'avaient pas été prévus».
Pour que la Banque publie un tel communiqué, qui commence en disant «que nous devons faire preuve à la fois d'humilité et de détermination pour aller de l'avant», c'est que le gouverneur de l'institution, Mark Carney, a jugé que son sous-gouverneur s'était «pété les bretelles» un peu fort en affirmant avoir averti tout le monde.
Au fond, Jacques Parizeau a joué une fois de plus à la belle-mère, mais à l'endroit des libéraux et des gens d'Ottawa, au lieu de le faire à l'endroit du PQ comme c'était autrefois son habitude. J'ai toujours autant de respect pour sa contribution remarquable aux avancées du Québec en matière d'économie. Il est un grand économiste, mais il est encore un politicien. Or, c'est l'économiste chez lui que je préfère.


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