Il y a de ces morts qui parlent plus que d'autres

Quel sort connaîtrait, aujourd'hui, Jésus de Nazareth ?

Mourir pour des idées qui ouvrent sur le bien commun des peuples mérite respect

Actualité - analyses et commentaires

Il est tout de même incroyable qu’après 2000 ans de christianisme et 1400 ans d’islamisme la haine soit toujours là, inspirant les comportements les plus barbares de la part de ceux-là même qui se réclament de Jésus et d’Allah. Les scènes de la mise à mort de Kadhafi ne sont pas sans rappeler celles de la mise à mort de Jésus. Dans les deux cas, la haine, soigneusement cultivée par les autorités et relayée servilement par les porte-paroles de ces derniers ont rendu possible une telle mise à mort. Si pour Jésus nous ne disposons pas de prises de vue en direct, pour Kadhafi la scène est la [sous nos yeux->].
Ces évènements nous rappellent que les assassinats et mises à mort n’ont pas tous la même signification au même titre que les responsabilités que chacun assume n’ont le même impact dans la société et dans le monde. Nombreux sont ceux et celles qui depuis les années 1960, en Afrique et en Amérique latine, ont connu des fins tragiques, voulues et planifiées par d’autres, préoccupés avant tout par des intérêts politiques, économiques et même religieux. La liste de ces martyrs serait sans doute trop longue pour les fins de cet article. Tout de même voici quelques exemples.
Patrice Lumumba, le premier chef de gouvernement congolais mort le 17 janvier 1961, a été assassiné dans le Katanga après avoir été renversé avec la complicité des services américains et belges. Ses discours enflammés contre l’impérialisme et pour l’unité africaine avaient enthousiasmé le continent. A tel point que son tombeur, le maréchal Mobutu, avait dû le réhabiliter quelques années plus tard. Le souvenir de Lumumba reste cher aux yeux de nombreux congolais, même ceux qui ne l’ont pas connu de son vivant.
Il y a 44 ans, ce mois-ci, le guérillero argentin Ernesto Che Guevara a été froidement assassiné le 9 octobre 1968, dans la salle d’une école, à la Higuera, où il avait été transporté après sa capture par des soldats de l’armée bolivienne. C’est le soldat Mario Teran qui l’a abattu d’une rafale de mitraillette. Il est celui qui est mort les yeux ouverts. Son idéal peut se résumer ainsi: ‘Dans la construction d'une société réellement socialiste, Che Guevara insistera non seulement sur les changements structurels et économiques à apporter, mais aussi humains: «Le socialisme n'a pas été conçu (...) pour avoir de formidables usines seulement, il se fait pour l'Homme intégral». Pour lui, le socialisme doit instaurer un type d'Homme nouveau, débarrassé de l'égoïsme et de l'individualisme bourgeois.».
En 1973, c’est au tour de Salvador Allende, victime d’un coup d’état militaire, un des plus sanglants qu’ait connu l’Amérique latine. Lui aussi s’était fait l’apôtre d’une société plus juste et d’un État plus indépendant par rapport aux forces et intérêts de l’Empire. La reprise en main du contrôle des richesses naturelles du pays, dont le cuivre, ainsi qu’une meilleure gestion des opérations des multinationales dans le pays lui valurent d’être placé en première place pour l’exécution finale. Ce fut le coup d’état militaire du 11 septembre 1973, longuement préparé par les services secrets étasuniens et les oligarchies nationales, qui marqua sa dernière heure. Ses derniers mots adressés à son peuple par les ondes d’une radio disaient ceci : « Travailleurs de ma patrie : Ayez foi au Chili et à son destin. D’autres hommes permettront de surmonter ce moment gris et amer, où la trahison prétend s’imposer. Continuez, sachant que, plus tôt que tard, s’ouvriront les grandes avenues par où passera l’homme libre, pour construire une société meilleure. »Bilan de la dictature : 2279 morts et disparus, 27.255 torturés, 150.000 prisonniers politiques.
Le 23 mars 1980, c’est Mgr Oscar Romero qui doit être sentencié par les forces occultes des pouvoirs dominants. Son engagement, comme pasteur et témoin d’évangile, l’a conduit à rejoindre les pauvres, les délaissés, les persécutés du Salvador. Dans son dernier sermon, fort de la liberté que donne l’Esprit, il s’adresse aux militaires présents à la célébration de l’eucharistie et à tous les salvadoriens qui l’écoutent par la radio. «Je fais appel à vous, membres de la garde nationale, soldats, policiers, vous qui faites partie de notre peuple. Ces paysans que vous tuez, ce sont vos propres frères. Tout ordre injustifié d’un homme qui vous demande de tuer est subordonné à la loi de Dieu qui dit « Tu ne tueras pas ». Aucun soldat n’est tenu d’obéir à un ordre immoral, contraire à la loi de Dieu. Il est temps d’obéir à votre conscience. …Au nom de Dieu, au nom du peuple qui souffre et qui crie vers le ciel, je vous implore, je vous supplie, je vous ordonne : cessez la répression. » Le lendemain il était exécuté froidement au moment même où il célébrait l’eucharistie dans la chapelle d’un hôpital.
Ces jours-ci nous assistons à l’assassinat d’un homme dont nous avons pris bien garde de mettre en évidence ses véritables engagements en faveur d’une Afrique plus libre et indépendante. Nous avons très peu parlé, également, des sommes énormes mises à la disposition des pays de l’Afrique pour les soutenir dans leurs efforts de développements. Bien peu savent les conditions de vie exceptionnelle accordées aux Libyens et Libyennes, les assurant de plus haut niveau de vie de tous les pays d’Afrique et du M.O. Ce n’est pas pour rien, qu’en juillet dernier, plus d’un million de Libyens, hommes, femmes, enfants, jeunes et vieux, ont envahi la place verte de Tripoli pour dénoncer l’intervention de l’OTAN et affirmer leur soutien au colonel Kadhafi. Tout original qu’il ait pu être, ses engagements, ceux qui avaient prises sur lui, sont ceux-là mêmes qui l’ont conduit à résister jusqu’à la mort pour son peuple. C’est cet homme que je respecte et admire. C’est cette vision d’une humanité renouvelée et plus respectueuse des droits des peuples et des personnes que je salue. Sa mort ne vient pas appuyer les erreurs qu’il a pu commettre, mais les idéaux qu’il a voulu partager. Quoi de mieux pour la circonstance de visionner [ce vidéo montrant Kadhafi->>http://www.dailymotion.com/video/xigh5t_nelson-mandela-et-colonel-kadhafi_new] montrant Kadhafi en compagnie de Nelson Mandela.
]
Puisse cet exposé, nous rappeler qu’il y a de ces êtres qui continuent de livrer des combats pour que l’humanité, dans sa totalité, retrouve l’air frais de la liberté, de la justice, du respect. Tous auraient pu s’assurer un avenir bien doré en renonçant à leurs engagements moraux et en acceptant, en échange, des sommes d’argent venant de la corruption. Ils ne l’ont pas fait et c’est tout à leur honneur.
Il en va de même pour Jésus de Nazareth, exécuté parce qu’il prêchait l’avènement d’une humanité nouvelle, fondée sur la vérité, la justice, la solidarité et la compassion.
Oscar Fortin
Québec, le 22 octobre 2011
http://humanisme.blogspot.com

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Formation en Science Politique et en théologie. Expérience de travail en relations et coopération internationales ainsi que dans les milieux populaires. Actuellement retraité et sans cesse interpellé par tout ce qui peut rendre nos sociétés plus humaines.





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8 commentaires

  • Marie-Hélène Morot-Sir Répondre

    26 octobre 2011

    Votre excellent texte monsieur Fortin pourra sans doute démontrer à ceux qui avalent tout cru les thèses de nos médias trop bien orientés, qu’il y a de vraies bonnes raisons à toutes les horreurs perpétrées sous le seul nom de la démocratie, et de la libération des peuples.
    L’élimination de personnes trop clairvoyantes, trop humanistes, s’est bien malheureusement toujours pratiquée dans le passé, comme vous nous le rappelez si bien, mais cela semble terriblement s’accélérer sous nos yeux incrédules !.. Attendons-nous au pire et cela d’autant plus que tant de gens acceptent et avec quelle facilité la thèse “officielle” !
    " Il y a de ces êtres qui continuent de livrer des combats pour que l’humanité, dans sa totalité, retrouve l’air frais de la liberté, de la justice, du respect..."
    Voilà pourquoi cette mort nous laisse un goût si amer .. Merci Monsieur Fortin.

  • Archives de Vigile Répondre

    24 octobre 2011

    Dans un testament écrit le 17 octobre, quelques jours avant d'être assassiné, il aurait écrit, entre autres, ce texte:
    « Que soient convaincus les hommes libres de la Jamahiriya que nous aurions pu monnayer, avec notre cause, une vie personnelle meilleure, stable et en sécurité. Nous avions eu tant de propositions, mais nous avons choisi d’être au front par devoir et honneur. Et même si nous ne gagnons pas aujourd’hui, nous allons offrir une leçon aux générations futures pour qu’elles puissent gagner, car le choix de la Nation est la bravoure et la vendre est une trahison que l’Histoire retiendra ainsi et pas autrement. »
    http://www.mondialisation.ca/index.php?context=va&aid=27242

  • Archives de Vigile Répondre

    23 octobre 2011

    M. Perrier, merci pour ce commentaire qui rappelle qu'il y a toujours quelque part une conscience rugit et crie contre ces mille visages de l'hypocrisie que nos sociétés de consommations sont parvenues à produire en quantité industrielle. Je suis bien d'accord avec vous que les réflexions de M. Didier ne donne pas du tout dans le banal mais nous invite à découvrir les ressources spirituelles qui se retrouvent en chacun de nous.
    Je remercie également Vigile qui pourrait bien se permettre de passer outre à ces considérations quelque peu religieuses et mystiques. Je comprends qu'il ne soit pas un site dédié tout particulièrement à ces considérations. Je ne me plains pas de l'espace qu'il me donne tout comme à certains autres qui pacagent un peu dans ce monde de la spiritualité
    Je vous souhait une bonne fin de journée.

  • Patrice-Hans Perrier Répondre

    23 octobre 2011

    Monsieur Fortin,
    c'est rassurant de lire vos textes et ceux de Didier, qui me semble un jeune homme plein de fougue et de compassion pour son prochain.
    nous avons émasculé nos racines chrétiennes au Québec et nous nous déguisons sous les oripeaux du consumérisme le plus veule et lâche.
    c'est «chacun pour soi», «au plus fort la poche» et «pas dans ma cour».
    et les exclus se comptent par dizaines de milliers au Québec et tombent comme des mouches sur le champs de bataille d'une société qui pratique la violence larvée d'exclure les moins performants et de faire taire les gens qui ont une parole vraie.
    nous n'avons pas seulement fuit les églises, c'est le message du Christ que nous avons jeté du revers de la main.
    message d'humilité (HUMUS), de vérité (sa parole), de virginité (le LYS symbole du Québec) et de compassion (son sacrifice afin d'abolir les sacrifices de l'ancienne alliance).
    nos gauchistes BCBG qui se gargarisent à l'aune des manifs branchées sur la rue Saint-Jacques n'ont pas de mémoire ou pas de culture générale, c'est selon.
    ils ne réalisent pas que Michel Chartrand était un chrétien mystique profondément engagé pour la libération de son prochain et IDEM pour le Che Guevara !
    les grands libérateurs - et Monsieur Fortin l'a souligné - ont souvent été des hommes et des femmes de foi.
    je rappelle aux lecteurs de VIGILE la maxime de mon premier article, ici, «LA MARCHE À L'AMOUR» de Gaston Miron.
    j'ai connu intimement Gaston, et je ne fais pas l'étalage de mes connaissances ou accointances ... Gaston sacrait, pestait contre l'hypocrisie, il était un peu marginal, pas très fortuné, en butte au conformisme ambiant et pourtant ... il émanait de cet homme une aura amoureuse, un halo de lumière qui s'est transmis aux jeunes générations d'auteur-compositeurs et à la relève politique.
    Falardeau parlait cru, lui aussi, fustigeant les veules et les hypocrites... mais, tous ceux qui l'on connu vous le diront: il s'agissait d'un autre apôtre de la bonté, de la douceur et même de la tendresse.
    le Che a mené le combat sur le terrain et aura pris les armes contre les forces de l'Empire. Mais, ça ne l'empêchait pas d'être un tendre, certainement pas un mercenaire sanguinaire et autocrate.
    Gandhi, un hindou, aura mené le combat sur le terrain de la non-violence - quoi que ... - avec aussi une mystique de la RÉVOLUTION SPIRITUELLE.
    la chrétienté n'est pas affaire de protocoles, d'ors et de mises en scène frelatées ... c'est l'héritage du Christ qui nous a promis - les croyants et les non-croyants - une vie meilleure ICI et MAINTENANT.
    c'est tout le sens du combat de l'authentique FOI mise au service de la LIBÉRATION VÉRITABLE de l'humanité et de l'accomplissement des Saintes écritures.
    quand nous ne prendrons plus «les vessies pour des lanternes».

  • Archives de Vigile Répondre

    23 octobre 2011

    Didier, il est vrai que les gens, dans leur ensemble, demeurent sceptiques et parfois gênés lorsqu'il est fait référence à Jésus de Nazareth. Ce serait tout différent si c'était Ghandi ou encore Martin Luther King. C'est que l'histoire, l'église et souvent nous-mêmes avons tellement déformé la réalité de cet homme que la caricature qui nous en reste n'arrive plus à en faire quelqu'un de très près de nos luttes et de nos espoirs. Je remercie Vigile qui, malgré cette réticence de plusieurs, publie tout de même certains de mes textes qui traitent de cette problématique ou qui s'y refaire dans une perspective tout à fait différente de celle des églises qui en font plutôt un personnage désincarné, loin de ce que nous sommes et de ce que nous vivons. Mon approche est celle qui fait de l'humanité l'Église et qui voit dans les oeuvres de justice, de vérité, de solidarité, de compassion, ses 'sacrements".

  • Patrice-Hans Perrier Répondre

    22 octobre 2011

    Monsieur Fortin,
    Je vous décerne l'OSCAR du courage et de la lucidité.
    Article simple, sans artifices, pas alambiqué et sans détour.
    Oui, les meilleurs ont été liquidés froidement par les forces de l'Empire.
    Et, les foules en redemandent ...
    Jouissant du martyr de leurs libérateurs. C'est le paradoxe le plus cruel de l'histoire de l'humanité.

  • Joseph Berbery Répondre

    22 octobre 2011

    Un tout petit correctif à une confusion qui revient souvent. Pour les musulmans, Allah est le terme arabe pour désigner Dieu, God, Deus, Theos, etc., c'est-à-dire l'Être Suprême, Unique et Un.
    Tout ça pour dire que, s'il y a UNE religion strictement monothéiste et absolument universaliste (catholique au sens étymologique), c'est -ironiquement- l'Islam.
    Cette petite observation n'enlève rien à la qualité de votre article.

  • Archives de Vigile Répondre

    22 octobre 2011

    Avez-vous remarqué combien c'est rendu difficile d'intéresser les gens à un article lorsqu'on nomme Jésus de Nazareth comme vous le faites dans cet article. Je dis cela parce que j'ai remarqué qu'il n'y avait pas eu beaucoup de visiteurs pour cet article.
    Je sais qu'il y a encore un froid entre la population du Québec et l'Église catholique et avec raison. Et le pape actuel n'aide en rien à rétablir la confiance, lui qui semble plus proche des grands dirigeants des puissants pays capitalistes exploiteurs que de ceux qui souffrent de la pauvreté etc...
    C'est malheureux que l'Église ait contribué à faire un mauvais nom au Christ, Lui qui était juste et bon et qui voulait le bien et le bonheur de l'être humain.