Paroles musulmanes

La rencontre visait à mieux faire connaître la communauté musulmane au Québec

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Accommodements - Commission Bouchard-Taylor

Journaliste : Kamel Bouzeboudjen - Ils étaient plus de 200 à s'inscrire au Forum national de consultation publique sur les Québécois musulmans, organisé dimanche par l'Institut du nouveau monde à l'UQAM dans le cadre des travaux de la Commission Bouchard-Taylor.
La rencontre visait à mieux faire connaître la communauté musulmane au Québec.
En introduction aux débats programmés durant cette journée, le professeur Patrice Brodeur, de l'Université de Montréal, a dressé un tableau de la présence des musulmans au Québec avec chiffres et répartition géographique à l'appui.
Par la suite, les participants ont participé durant toute la journée à deux ateliers consacrés à l'Islam et la laïcité, et à la femme en Islam.
Les discussions étaient riches par leur diversité. Chacun voulait partager son point de vue, mais aussi son expérience de musulman au Québec avec ce que cela suppose comme frustrations, joie et parfois incompréhensions.
Les participants ont été unanimes à souligner la diversité de la communauté musulmane. Ils sont Maghrébins, Noirs d'Afrique, Asiatiques. Ils ont donc des cultures différentes, des langues diverses et surtout un rapport à l'Islam loin d'être uniforme.
Une participante, qui ne porte pas le voile, a dit ne pas comprendre le tollé autour de « ce bout de tissu ». Plusieurs femmes ont tenu également à préciser que même si elles ne portaient pas le voile, elles étaient pratiquantes.
Crise de représentation
Les musulmans québécois ont affirmé qu'ils ne se sentent pas représentés par les personnes qui s'expriment en leur nom dans les médias.
Ils ont invoqué le fait qu'il n'existe pas de clergé dans la religion musulmane et de ce fait les personnes qui s'expriment au nom de la communauté musulmane ne représentent, en réalité, que leur personne.
« Mon seul leader est Dieu », s'est exclamée une des participantes à l'atelier femmes et Islam.
Dans un des ateliers, les participants ont dit accepter le principe d'un organisme représentatif à condition que ses membres reflètent la diversité de la communauté, qu'ils soient compétents et intelligibles.
Médias coupables
Une grande majorité des participants ont accusé les médias de rechercher le sensationnalisme au lieu de remplir leur mission pédagogique, notamment quand il s'agit d'un dossier aussi sensible que l'immigration.
Une participante, qui représente un groupe de femmes musulmane de l'Université de Montréal, a affirmé avoir envoyé plusieurs invitations aux médias pour les informer sur la position du groupe vis-à-vis du débat sur les accommodements raisonnables, mais les médias n'ont jamais répondu à son invitation.
Un autre participant a affirmé avoir envoyé une dizaine de lettres sur l'affaire des caricatures de Mahomet, mais aucun journal n'a publié ses lettres.
Toujours dans l'affaire des caricatures, un autre participant a souligné que sur les 63 mosquées et lieux de prières de Montréal, une seule a appelé à manifester contre les caricatures. C'est uniquement cette mosquée qui a retenu l'intérêt des médias, alors que la position des autres mosquées a été négligée, selon lui.
Accommodements raisonnables
Dans l'un des ateliers femmes et Islam, un immigrant, qui arrive de France, a exprimé son inquiétude quant à la tournure que prennent les débats sur les accommodements raisonnables au Québec. Il a raconté que les propos qu'il entend lui rappellent ceux qu'il entendait en France au milieu des années 1990. Des propos « étouffants » qui l'ont poussé à s'installer au Québec.
À propos des signes religieux, un des participants à l'atelier Islam et laïcité a estimé que les signes religieux, quels qu'ils soient, enrichissent la société et contribuent à la promotion de la tolérance : « Les symboles sont la mémoire de la société et ils témoignent d'un patrimoine. ». Selon ce participant, les symboles religieux ne doivent pas disparaître.
Plusieurs participants ont précisé que l'Islam est également héritier du judaïsme et du christianisme. Et surtout qu'ils revendiquent cet héritage.
Pour clore cet atelier, un des participants a souhaité être interpellé en tant que citoyen et non qu'en tant que musulman uniquement.
Promouvoir le « bilinguisme »
En marge du forum, le titulaire de la chaire Islam, pluralisme et mondialisation à l'Université de Montréal, Patrice Brodeur, a accordé une entrevue à Radio-Canada.ca.
Il a d'abord tracé le portrait de la communauté musulmane qui est loin d'être monolithique, selon lui.
Il invite les Québécois et les immigrants de culture musulmane à s'engager en tant que citoyens pour construire une société pluraliste et inclusive.
M. Brodeur appelle les deux groupes à développer un « bilinguisme » qui leur permette de se comprendre. Par bilinguisme, il entend la compréhension du « langage laïc » ancré dans la société québécoise et celle du « langage religieux » parlé par les membres de la communauté musulmane.
Par ailleurs, il invite les Québécois à éviter de projeter leur expérience avec l'Église catholique sur les musulmans et leur rapport avec leur religion.
L'imam Omar Koni, qui a participé à ce forum, a également répondu aux questions de Radio-Canada.ca.
Pour lui, il n'y a pas de contradiction entre l'Islam et la laïcité et les deux peuvent cohabiter sans heurts.
L'imam Koni insiste que des efforts doivent être déployés aussi bien de la part des Québécois que des musulmans pour établir le dialogue entre les deux groupes.
Il considère la Commission Bouchard-Taylor contribue, malgré certains dérapages entendus, à amorcer le dialogue.
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