Notre histoire, notre avenir

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« Notre grande aventure » - Lionel Groulx

Sans trop s’en rendre compte, on a beaucoup parlé d’histoire cet été. On a accusé nos ancêtres d’esclavagisme et de colonialisme et d’avoir maltraité les Noirs et les Amérindiens. On trouverait là la source de notre supposée insensibilité envers la diversité.


Le moins qu’on puisse dire, c’est que ce récit culpabilisant, endossé par les médias, est étranger à la réalité historique. Et plus il s’impose, moins nous parvenons à comprendre notre histoire, tellement elle est déformée.


Conséquence : les Québécois ont beau avoir pour devise « je me souviens », ils s’enferment dans un présent asphyxiant et déculturé.


Nouvelle-France


Notre histoire en fut d’abord une d’héroïsme et de panache.


Parmi tous les Européens lancés à la conquête du Nouveau Monde, les Français ne furent pas les plus nombreux à s’y établir, mais ils furent d’une vitalité exceptionnelle et selon les critères de l’époque, les plus humanistes dans leurs rapports aux Amérindiens, à la différence des Anglais.


Ils découvrirent un vaste territoire et laissèrent sur lui la première empreinte européenne, tout en construisant, dans la vallée du Saint-Laurent, une société qui assurerait le fondement politique de l’Amérique française. Jacques Cartier, Samuel de Champlain, Jean Talon, Frontenac, Louis Joliet, Cavelier de La Salle : ces noms inscrits dans notre paysage évoquent l’épopée de la Nouvelle-France. Qui les connaît encore aujourd’hui ?


On a tendance à oublier aujourd’hui à la fois l’esprit d’aventure des coureurs des bois et le courage des habitants qui bâtirent ici un pays. Il fallait transformer un territoire inhospitalier en pays vivable. Que de sacrifices !


La Conquête anglaise nous a profondément marqués. Elle nous a placés dans un état de subordination que nous avons progressivement intériorisé. Nous en sommes venus à croire que nous ne pouvions nous passer de maîtres. Hier c’était Londres, maintenant Ottawa.


Les Québécois n’ont peut-être pas connu l’esclavage, mais ils sont clairement dans la catégorie des peuples dominés. Ceux qu’on appelait les Canadiens français étaient traités comme un résidu historique, on a programmé leur assimilation, à laquelle ils résistèrent. D’ailleurs, cette histoire se poursuit : le français régresse encore et le peuple québécois est traité dans la fédération comme un groupe ethnique résiduel.


Ce n’est pas pour rien que la Révolution tranquille fut vécue comme une libération. Notre peuple avait survécu en s’accrochant à l’existence, en s’adossant à sa religion, et en décidant de conserver son identité à tout prix. Les années 1960 engagèrent un élan de libération. Maîtres chez nous ! Plus jamais, nous serions des étrangers dans notre propre pays.


Célébration


Nous avons progressé, indéniablement. Mais nous avons échoué l’essentiel : nous ne sommes toujours pas indépendants. Seuls des esprits légers jugeront la chose sans importance. Mais notre histoire se poursuit, et pourrait bien rebondir un jour.


À quand de grands spectacles pour célébrer notre grande aventure ? À quand sa redécouverte par nos artistes ? Pourquoi les Québécois ne renoueraient-ils pas avec la charge poétique de leur histoire ? Qui reprendra le flambeau des Vigneault et Miron ?


Pourquoi les Québécois ne s’intéresseraient-ils pas à eux-mêmes de temps en temps ?