SORTIE SUR LE MONT ORFORD

Mulcair sommé de s'expliquer devant le caucus

Mont Orford


Québec - La décision de Québec dans le dossier du mont Orford continue de causer des turbulences autour du gouvernement Charest. Même la fermeture du Zoo de Québec a ramené sur le tapis la controversée vente d'une partie du parc national.
Après avoir contredit publiquement le premier ministre Charest sur les raisons de son congédiement du Conseil des ministres, le député de Chomedey, Thomas Mulcair, a été sommé de s'expliquer ce matin devant le caucus des députés libéraux.
"On lui a demandé d'être là pour expliquer ses déclarations", a confirmé hier le président du caucus libéral, David Whissell.
La semaine dernière, dans des entrevues à La Presse et à d'autres médias, M. Mulcair a carrément contredit son patron, qui avait affirmé que le titulaire de l'Environnement s'était dit d'accord avec la cession d'une partie du parc du Mont-Orford au secteur privé.
Déjà, il est peu fréquent qu'un député contredise un ministre. On ne trouve guère de précédents où un député a croisé publiquement le fer avec le premier ministre.
Mais un vétéran libéral, le représentant de Westmount, Jacques Chagnon, croit que M. Charest serait bien mal avisé de montrer la porte au bouillant député de Chomedey. " Le chef a toujours l'autorité de faire ce genre de geste, mais ce n'est pas toujours souhaitable. Ce n'est pas ce que je lui conseillerais ", a soutenu M. Chagnon, ministre éjecté lui aussi qui, pendant des années, a présidé le caucus des élus libéraux.
Opposé lui aussi au projet d'Orford, le député de Brome-Missisquoi, Pierre Paradis, se faisait un devoir d'être au caucus ce matin afin que le dissident de Chomedey ne soit pas mis au ban par ses pairs, a-t-on appris dans les coulisses.
Habituellement, un simple député, Vincent Auclair, de Vimont, soulève les questions que ne veulent pas amener officiellement M. Charest et ses lieutenants.
Charest furieux
Par ailleurs, à l'Assemblée nationale, c'est un Jean Charest indigné qui a sommé Agnès Maltais de se rétracter. La députée péquiste a soutenu publiquement, la semaine dernière, que l'ancien ministre libéral Marc-Yvan Côté était de collusion avec le cabinet de M. Charest afin d'obtenir la fermeture du zoo de Québec, pour utiliser le terrain à des fins de développement.
Dans ces échanges, le spectre de la controverse autour du mont Orford est réapparu subitement. Pour la mise en demeure à Mme Maltais, M. Charest a eu recours à Me Jacques Jeansonne. Cet avocat a récemment été mandaté par André L'Espérance, l'acheteur potentiel d'une partie du parc du Mont-Orford, dans sa mise en demeure contre Fred Korman, son ex-associé, selon qui le centre de ski était rentable sans qu'il soit nécessaire de construire des condos au bas des pentes.
M. Charest a manifesté hier la même indignation qu'au moment où la députée péquiste Elsie Lefebvre avait laissé entendre que sa femme, Michèle, aidait la Croix-Rouge en sous-main, aux dépens de Centraide.
" Je la regarde, la députée de Taschereau. Si elle a un minimum d'honneur, elle va se lever pour retirer les propos diffamatoires qu'elle a tenus non seulement à l'endroit de ma personne, mais à l'endroit du premier ministre du Québec ", a lancé, en fulminant, M. Charest.
Pour le député péquiste Stéphane Bédard, M. Charest " joue les vierges offensées ", mais en utilisant le même avocat, il renforce " l'impression de proximité inquiétante et malsaine qui existe entre le premier ministre et son entourage, et les promoteurs de la vente du mont Orford ".
Bien avant Orford, M. Charest avait fait appel à Me Jeansonne, insistait-on hier du côté du premier ministre. L'avocat montréalais avait piloté une demande de rétractation obtenue, en décembre dernier, du Journal de Québec.
Indiscipline
C'est un caucus bien perturbé qu'affrontent aujourd'hui M. Charest et ses principaux lieutenants. La nouvelle chute dans les sondages- le mécontentement à l'endroit du gouvernement est remonté en mars après une embellie d'un mois- fait broyer du noir à certains députés, dont Pierre Moreau et Diane Legault, élus dans d'anciens châteaux forts péquistes sur la Rive-Sud. Il y a trois semaines, Russell Copeman, député de Notre-Dame-de-Grâce, s'est retrouvé malgré lui sous les feux des projecteurs quand La Presse a rapporté le flot de récriminations qu'il avait transmis lors des huis clos hebdomadaires du caucus. À Québec hier, Le Soleil a fait sa manchette des doléances de l'ancien ministre Marc Bellemare, qui se disait heureux d'avoir quitté un gouvernement qui ne respecte pas ses engagements électoraux.
Claude Lemieux, responsable des liens entre le cabinet Charest et les députés, a consulté des anciens collègues de l'ère Bourassa, pour savoir comment recoller les morceaux.
Après la rétrogradation de Thomas Mulcair, fin février, Pierre Paradis avait déclaré à deux quotidiens de l'Estrie qu'il était opposé lui aussi aux intentions du gouvernement pour le parc du Mont-Orford. Le projet initial avait été suffisamment modifié, selon lui, pour justifier un nouvel examen au BAPE. Bernard Brodeur, élu dans Shefford, a ajouté sa pierre, en fin de semaine, en soutenant que la déclaration de M. Paradis, son mentor politique, était " opportune ".
Joint hier, M. Paradis est resté avare de commentaires, mais la décision de Québec d'agrandir le parc pose bien des problèmes à ses électeurs. " Les gens nous demandent s'ils peuvent construire ou s'ils vont être expropriés ", se contente-t-il de dire. Dans les coulisses, on entend que le député de Brome-Missisquoi, écarté du Conseil des ministres, multiplie les présences dans les circonscriptions d'amis de longue date. Le ministre de la Santé, Philippe Couillard, fait aussi passablement d'assemblées dans les circonscriptions qui sollicitent la présence de ce ministre populaire pour leur financement. Mais il reste d'une prudence de Sioux.
Un autre prétendant éventuel au trône, le ministre Claude Béchard, a été carrément ramené à l'ordre par le cabinet de M. Charest l'automne dernier. Dans ses rencontres avec les militants en région, l'ex-ministre du Développement économique faisait trop explicitement allusion à une éventuelle succession à la barre du parti, ont confié des vétérans libéraux de Montréal.


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