«Mange de la m... !»

«Misère ! ...»





Ce n’est pas d’hier que, au Québec, l’on s’exprime dans un langage ordurier, brutal et agressant pour les interlocuteurs. Mais cette pratique était avant tout réservée à des gens grossiers, malpolis au vocabulaire plutôt limi­té la plupart du temps.


L’école apprenait aux enfants à bien parler, ce qui leur interdisait de s’exprimer «comme des charretiers», comme on disait à l’époque. Et dans cette société d’avant l’éclatement de tous les tabou­s, il était non seulement mal vu d’envoyer promener quelqu’un en se réfé­rant aux matières excrémentielles, mais ceux qui s’y adonnaient étaient jugé­s socialement peu fréquentables.


Or, on assiste aujourd’hui à la glorification de cette langue contaminée. L’évolution – le mot est-il bien choisi? – s’est faite au gré de l’élargissement de la tolérance. Pour en arriver à un usage généralisé, vérifiable au quotidien dans les médias.


Invectives gratuites


D’abord, rares sont les séries télévisées québécoises où les personnages, quels que soient leur classe sociale, leur niveau de scolarité et leur sexe, ne s’invectivent pas en toutes circonstances. Fini donc les comités qui établissaient des règles de correction verba­les à Radio-Canada, par exemple. Alors les créateurs s’en donnent à cœur joie au nom de la liberté créatrice.


Mais dans tous les talk-shows, les artis­tes, invités selon le principe de la chaise musicale, car ils se retrouvent sur toutes les tribunes, usent, pour faire tendance, de cette langue dévoyée. Et à bien y penser, dans ce milieu des vedet­tes adorées du public, l’on associe cette manière de s’exprimer à l’authenticité et à la vérité émotionnelle. En fait, on reven­dique ainsi la libération des contraintes petites-bourgeoises de gens coincés, complexés, snobs et dépassés.


La retenue et le respect de soi et du public seraient donc des notions d’une époque révolue. Pourtant ce langage est aussi celui de tous les agresseurs et les intimidateurs qu’on n’a de cesse de dénoncer.


Ajoutons qu’il y a 25 ans les téléspectateurs auraient protesté contre ces pratiques. Aujourd’hui, ils applaudissent à tout rompre et en redemandent. Misère...!




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