Malaise autour du conseil de la Caisse de dépôt

Claude Béland s'interroge sur l'apparence de conflit d'intérêts qui résulte de la présence de Desjardins, de la FTQ et de la CSN au sein du conseil de la Caisse de dépôt.

CDPQ - Où va Michael Sabia?

Claude Béland s'interroge sur l'apparence de conflit d'intérêts qui résulte de la présence de Desjardins, de la FTQ et de la CSN au sein du conseil de la Caisse de dépôt. Photo: Pedro Ruiz
François Desjardins - Claude Béland, président du Mouvement Desjardins de 1987 à 2000, n'est pas convaincu que l'établissement coopératif devrait siéger au conseil d'administration de la Caisse de dépôt et placement, en raison de l'apparence de conflit d'intérêts qui peut en résulter.
Lors d'un entretien au Devoir, M. Béland, qui a été membre du conseil de la Caisse pendant plusieurs années, a dit que celui-ci discute parfois d'occasions d'investissement intéressantes, ce qui l'a déjà mis mal à l'aise en tant que patron d'un autre grand investisseur institutionnel.
Dans la loi sur la Caisse de dépôt, rien ne garantit un siège au Mouvement Desjardins. Cependant, le successeur de M. Béland, Alban D'Amours, a lui aussi été membre du conseil. Il a quitté le conseil la semaine dernière. L'actuelle présidente du Mouvement Desjardins, Monique Leroux, n'a pas encore été nommée.
«Mme Leroux va se trouver dans la même situation que moi, que M. D'Amours. C'est certain qu'on voit des dossiers qui pourraient nous intéresser», a-t-il dit. «À un certain moment, j'étais embêté par l'apparence de conflit d'intérêts», a dit M. Béland, qui s'est exprimé en son «nom personnel».
M. Béland, qui préside aujourd'hui le conseil d'administration du Mouvement d'éducation et de défense des actionnaires (MEDAC), fait référence à des occasions d'investissement potentielles qui font l'objet de discussions au conseil de la Caisse.
Intérêts communs
Le malaise, selon lui, vient du fait que dans certaines situations, la Caisse et le Mouvement Desjardins peuvent être attirés par les mêmes types de placements. Par exemple, il cite le placement privé, un investissement que l'on fait dans une entreprise en particulier. «La notion d'initié devrait s'appliquer ici aussi», a-t-il dit. Si le Mouvement Desjardins peut siéger au conseil, pourquoi pas la Banque Nationale, s'est-il demandé sur un ton blagueur.
«J'ai déjà dit à Bernard Landry que ce sont surtout les déposants, qui ont vraiment intérêt à ce que la Caisse fonctionne bien, qui devraient être autour de la table, et pas des gens qui pouvaient être en conflit d'intérêts. Ça n'a pas été retenu», a dit M. Béland.
Aussi, le fait de nommer des «personnes comme celles-là mène à des disponibilités qui ne sont pas très grandes», a-t-il estimé.
«Quand vous êtes patron d'une grande organisation, vous avez une préoccupation première qui est votre entreprise, et c'est une job à plein temps. Alors pouvez-vous vraiment vous engager comme administrateur et dire: "Là, je m'occupe des intérêts de la Caisse de dépôt, je connais les dossiers, je les suis"? Si vous avez une réunion importante chez Desjardins et une autre à la Caisse, vous allez choisir quoi? Vous allez choisir Desjardins, vous n'avez pas le choix.»
«Est-ce qu'on ne doit pas, avec un actif de 120 milliards, avoir un conseil qui est totalement engagé envers la Caisse, qui est disponible? Une job comme ça, on ne fait pas ça à temps partiel!»
Toujours pour éviter l'apparence de conflit d'intérêts, il se demande aussi s'il ne faudrait pas cesser la tradition qui réserve un siège au président de la FTQ puisque celui-ci est aussi président du conseil du Fonds de solidarité de la FTQ, et au président de la CSN, qui dirige le conseil de Fondaction.
Nomination improvisée
Par ailleurs, M. Béland estime que le processus de nomination qui a mené au choix de Michael Sabia à la présidence a «l'air improvisé», surtout si on le compare aux processus ayant mené à l'embauche des anciens présidents. Au moment où l'on se préoccupe des règles de gouvernance, «ça détonne», a-t-il dit en entretien.
Hier, lors d'une conférence de presse du Conseil d'éthique de l'industrie québécoise des boissons alcooliques, qu'il préside, il en a remis en disant que M. Sabia devrait peut-être même se retirer pour que le processus de sélection reprenne son cours. Il s'agirait là d'un «beau geste», selon lui.
«J'ai suivi le dossier BCE et je trouve qu'il n'a pas fait un travail extraordinaire. Est-ce que c'est le genre de travail qu'il va faire à la Caisse de dépôt? Ça m'inquiète un peu, a déclaré M. Béland. Ce qui m'inquiète un peu aussi, c'est que le président de la Caisse représente une institution québécoise fondamentale, culturelle, identitaire, et qu'il n'a pas le profil de ça.»
Avec La Presse canadienne


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