Justin Trudeau doit cesser de qualifier Alexandre Bissonnette de terroriste, plaident les parents du tueur, car l’étiquette met leur sécurité et celle de tous les Canadiens à risque.
Le premier ministre du Canada, Justin Trudeau, devrait recevoir la troublante missive ce matin.
«Au lendemain du crime commis par mon fils Alexandre Bissonnette au Centre islamique de Québec (CCIQ), vous avez affirmé catégoriquement, avant toute enquête: il s’agit d’un acte terroriste», se plaint Raymond Bissonnette, père du tueur, dans une lettre obtenue par notre Bureau d’enquête.
Il estime que «les déclarations répétées» utilisant l’épithète «terroriste» pour désigner leur fils ont causé un sérieux préjudice à sa famille.
Le 29 janvier 2017, à la mosquée de Québec, Alexandre Bissonnette a tué six hommes venus prier.
En entrevue avec Le Journal, la famille a souligné que le tueur n’a pas fait l’objet d’accusations de terrorisme en vertu du Code criminel, même après l’enquête policière «où tous les aspects de la vie d’Alexandre ont été scrutés à la loupe» et après l’analyse «rigoureuse» de la preuve par les procureurs au dossier.
Aux yeux des parents, leur fils doit plutôt être considéré comme «un tueur de masse».
Un acte «terrible»
L’absence d’accusations de terrorisme «ne diminue en rien la gravité du crime», insiste pourtant Raymond Bissonnette dans la lettre.
«Je tiens à répéter que le crime commis est un acte des plus terribles», écrit-il, ajoutant que son fils «n’avait aucun lien avec le terrorisme ni aucune idéologie particulière».
Les parents du tueur ont rappelé au Journal les graves problèmes de santé mentale de leur fils, liés notamment à l’anxiété ou découlant de sa douloureuse expérience d’enfant intimidé à l’école, tel qu’exposé au tribunal.
Malgré «l’absence d’accusation», Justin Trudeau a continué de qualifier publiquement le crime de Bissonnette de «terroriste», à de nombreuses reprises, notent les parents.
Le discours de M. Trudeau, après un entretien avec la première ministre de la Nouvelle-Zélande, à la suite de l’attentat terroriste à Christchurch, a par exemple déplu aux Bissonnette.
«Vous lui avez rappelé l’attaque perpétrée au CCIQ, laissant entendre que les deux crimes avaient les mêmes motivations», déplorent-ils.
En mars, à l’ONU, la ministre des Affaires étrangères Chrystia Freeland a commis, selon eux, la même erreur, c’est-à-dire de qualifier «sans nuance» de «terroriste» le responsable de la tuerie de la mosquée de Québec.
Dangereux pour eux
Utiliser une telle étiquette est risqué, souligne M. Bissonnette: «Le danger pour ma famille est bien réel.»
En avril 2017, rappelle-t-il, une personne a pris l’avion de Londres pour Québec dans l’intention déclarée de «venger l’attentat terroriste à la mosquée». Cette personne cherchait la demeure des Bissonnette.
«Est-il irréaliste de penser que ce danger guette aussi tout Canadien, ici et à l’étranger, qui pourrait devenir la cible d’extrémistes pensant venger une “attaque terroriste” survenue dans une mosquée au Canada?» demande la famille Bissonnette à Justin Trudeau.
La lettre complète